En accueillant cet évangile de ce deuxième dimanche du temps ordinaire, dans ces temps si particuliers que nous vivons, nous sommes appelés à l’espérance. Comme le bon vin arrivant en fin de repas à Cana, nous entendons que le meilleur est à venir et que la joie nous est promise (Jn 2, 2-11). Nous ne devons nous laisser ni abattre ni décourager par la situation du moment, par les contraintes et les incertitudes liées à cette pandémie que nous traversons. Car il y a un chemin qui nous ouvre à la joie véritable, et pas uniquement celle provoquée par le vin consommé !
Participer au miracle
En effet, lorsque le maître du repas goûte le vin, saint Jean écrit qu’il ne savait pas d’où venait ce vin, mais ceux qui servaient le savaient bien, eux qui avaient puisé l’eau. Cela me fait penser à cette parole dans l’évangile de Mathieu : « Ce que tu as caché aux sages et aux savants, tu l’as révélé aux tout-petits » (Mt 11, 25). Oui Dieu révèle aux petits et aux humbles les mystères du Royaume. Les serviteurs ont non seulement connaissance de ce miracle réalisé sous leurs yeux, mais aussi la connaissance de Celui qui en est l’auteur. Ils sont même appelés à participer à ce miracle en y exerçant leurs propres compétences. Ils savent désormais où se trouve la source de la joie et le chemin qui y conduit. Voilà pourquoi cette figure du serviteur dans ce récit des noces de Cana est éclairante et encourageante pour nous-mêmes. Ils nous font entrer dans la compréhension du mystère de la joie véritable, ils nous font entrer dans les coulisses du cœur de Dieu qui, en Jésus Christ manifeste aux hommes le désir de son Père de nous offrir le bonheur véritable, ce dont notre monde et nous-mêmes avons sans doute le plus besoin en ces temps qui sont les nôtres.
Avec Marie
Trois étapes conduisent ainsi les serviteurs vers cette joie. Ils vont tout d’abord faire confiance à Marie et à son invitation : « Tout ce qu’il vous dira, faites-le » (Jn 2, 5). On peut être surpris en effet que les serviteurs se laissent ainsi « commander » par une femme ! Ce n’était pas vraiment une habitude à l’époque. Pourtant, ils l’écoutent car la servante du Seigneur (Lc 1, 38) ne peut pas ne pas être écoutée par eux. Elle est comme eux, non pas au-dessus d’eux. Elle est l’une des leurs, l’humble servante parmi les serviteurs de Dieu. Sa parole peut alors être reçue et entendue. Au pied de la croix Jésus invitera le disciple bien-aimé à prendre chez lui Marie, puisque selon cette belle prière de saint Bernard au sujet de Marie : « En la suivant, on ne dévie pas. En la priant, on ne désespère pas. En pensant à elle, on ne se trompe pas. Si elle te tient par la main, tu ne tomberas pas. Si elle te protège, tu ne craindras pas. Si elle est avec toi, tu es sûr d’arriver au but. » Nous aussi prenons à cœur les paroles et les attitudes de Marie. Elles nous conduiront à la joie sereine et paisible.
Ils accomplissent leurs tâches du moment sous l’inspiration du Christ et cela change tout.
Les serviteurs obéissent ensuite à Jésus. Il leur dit de remplir les jarres et c’est ce qu’ils font. Il leur dit de puiser, et ils puisent. Ce ne sont pas des choses extraordinaires que Jésus leur demande. Non, de simples choses, ce qu’ils faisaient d’ordinaire pour le service des repas. Mais cette fois-ci ils le font, guidés, conduits par le Christ. Ils accomplissent leurs tâches du moment sous l’inspiration du Christ et cela change tout. Jésus valorise ce travail si humble, il lui donne une signification profonde puisque à travers ces simples gestes opérés par les serviteurs, le miracle peut se réaliser. N’est-ce pas ce que saint Paul veut nous dire dans sa lettre aux Corinthiens : « Les dons de la grâce sont variés, mais c’est le même Esprit. Les services sont variés, mais c’est le même Seigneur. Les activités sont variées, mais c’est le même Dieu qui agit en tout et en tous » (1 Co 5-7). Oui lorsque nous faisons les choses, par Dieu, avec Dieu et en Dieu, avec amour, celles-ci acquièrent une grande valeur et prennent tout leur sens. Le pape François nous le rappelle dans son exhortation Gaudete et Exultate : « Le défi, c’est de vivre son propre engagement de façon à ce que les efforts aient un sens évangélique et nous identifient toujours davantage avec Jésus-Christ » (GE, 28). Et cela est aussi source de joie.
Dans l’amitié de Dieu
Enfin les serviteurs vont apporter le vin au maître du repas pour que les invités puissent le recevoir. Ils sont les serviteurs de la joie pour tous les convives. Rappelez-vous les paroles de Jésus : « Je ne vous appelle plus serviteurs, car le serviteur ne sait pas ce que fait son maître ; je vous appelle mes amis, car tout ce que j’ai entendu de mon Père, je vous l’ai fait connaître » (Jn 15, 15). Les serviteurs sont en effet les amis de Dieu puisqu’ils participent à son œuvre de salut en Jésus Christ. Ils sont aux premières loges de l’action de Dieu pour les hommes et ils sont les premiers bénéficiaires de la joie véritable. N’y a-t-il pas en effet plus de joie à donner qu’à recevoir (Ac 20, 35) ? En servant les autres, nous nous sauvons nous-mêmes et faisons l’expérience de la joie véritable qui vient de Dieu.
Aujourd’hui encore, dans le contexte qui est le nôtre, il y a une joie possible à recevoir pour en vivre chaque jour. Il s’agit de nous laisser inspirer par toute la vie de la Vierge Marie, d’entrer dans une obéissance confiante en la Parole de Jésus et de choisir le service du frère dans le don de nous-mêmes. Ce sera alors l’assurance d’une vie, tel le bon vin aux noces de Cana, plus riche, plus savoureuse développant tous ses arômes. Oui, le meilleur est à venir.