Ses premiers mots donnent le ton de sa correspondance : "Salut Aliénor, comment vas-tu ? Sais-tu que le jour où tu m’as écrit pour la première fois est le jour de mon anniversaire ? Si si, c’est vrai !". Puis il raconte brièvement son histoire : depuis sa traversée pédestre du Guatemala aux États-Unis à l’âge de 16 ans, jusqu’à sa descente aux enfers suite à un vol à main armée dans une épicerie. À 21 ans, il est condamné à mort pour le meurtre d’un policier. Il en a aujourd’hui 50. Il a passé plus de la moitié de sa vie dans une prison hautement gardée de Californie.
À part quelques détails qu’il évoque sur sa routine quotidienne et ses "hobbys" (le basketball, les dominos et les échecs), Edgardo se concentre désormais dans nos échanges sur la spiritualité. Il aime à parler du grand Amour de sa vie : le Christ.
Une conversion extraordinaire
Dans sa première lettre, Edgardo résume avec pudeur sa conversion extraordinaire : "Jésus Christ est mon Seigneur, mon Roi et mon Sauveur. Il est entré dans ma vie peu après mon arrestation en 1992. Je passe désormais la majorité de mon temps à lire la Bible, l’étudier et à écrire des messages pour évangéliser. Il est le grand Amour de ma vie. Il est mon Tout."
C’est dans le couloir de la mort qu’Edgardo a découvert la miséricorde de Dieu. Après une puissante conviction de péché, il a réussi à avancer et à nouer un lien personnel et unique avec le Christ. Il écrit désormais tous les jours des textes d’évangélisation ou des poèmes, comme celui-ci :
Cette conversion au Christ a aussi radicalement changé son rapport au prochain. Plein de délicatesse et d’attention aux autres, Edgardo m’interroge dans ses lettres sur mes activités quotidiennes, mon travail et sur ma manière de vivre ma foi. S’oubliant soi-même, il m’encourage et me fait des compliments : "Est-ce que tes élèves de piano saisissent la chance qu’ils ont d’apprendre le piano avec toi ?".
Edgardo publie régulièrement des messages d’espérance dans le magazine Compassion destiné aux condamnés à mort américains. Il s’est fait le porte-parole de ses camarades dans un article intitulé "Ses nombreux péchés ont été pardonnés puisqu’elle a beaucoup aimé" (Lc 7, 47). Il y décrit la difficulté des condamnés à mort à croire en Dieu. La raison en est, selon Edgardo, qu’ils se sentent exclus pour toujours de la société, quels que soient leurs efforts pour devenir meilleurs. "Notre société a décidé de ne pas pardonner nos erreurs et nos fautes, mais au contraire de nous punir pour toute notre vie au nom de la justice".
Edgardo confie dans cet article la source de son espérance : "Ce n’est pas parce que je suis bon, noble et généreux que j’aime les autres et que je leur pardonne. C’est seulement par la grâce et l’amour avec lequel le Christ m’a aimé et pardonné que je suis en mesure maintenant de l’imiter."
La Communauté Sant’Egidio décrit la correspondance avec un condamné à mort comme un "fil de vie" pour les prisonniers. Ceux-ci souffrent en effet beaucoup dans l’attente indéfinie de leur exécution. La correspondance épistolaire avec une personne dans le monde leur donne un espace pour s’exprimer, découvrir leur intériorité, nouer une relation d’amitié profonde. Si vous aussi, vous souhaitez pratiquer cette œuvre de miséricorde spirituelle (la consolation des affligés), vous pouvez contacter la Communauté Sant’Egidio.
Communauté Sant’Egidio, Stefania Tallei (en charge de la correspondance avec les condamnés à mort et à qui vous pouvez écrire en français) : stefaniatallei@gmail.com
Aliénor Strentz est docteur en ethnologie-anthropologie et fondatrice du blog « Chrétiens heureux ».