La France fête cet automne l’anniversaire de l’abolition de la peine capitale dans sa Constitution. Il y a 40 ans, le 9 octobre 1981, la France l’abolissait sous la présidence de François Mitterrand. Si la peine de mort relève de la législation de chaque pays, qu’un nombre assez important applique encore, les pontifes catholiques, de Pie XII à François, se sont tous exprimés sur cette question qui touche aussi bien au droit qu’à la morale, à l’éthique et à la religion. Tous, successivement, ont contribué à ce qu’elle soit supprimée de la Constitution du Vatican en 2001, et qu’en 2018 le pape François décide de la rayer du Catéchisme de l’Église catholique.
En 1952, Pie XII affirme que : "Même quand il s’agit de l’exécution d’un condamné à mort, l’État ne dispose pas du droit de l’individu à la vie. Il est réservé alors au pouvoir public de priver le condamné du bien de la vie, en expiation de sa faute, après que, par son crime, il s’est déjà dépossédé de son droit à la vie." En 1954, dans un discours adressé aux Juristes Catholiques d’Italie, il précise que "la peine proprement dite ne peut avoir d’autre sens et d’autre but que de ramener de nouveau dans l’ordre du devoir le violateur du droit qui en est sorti. Cet ordre du devoir est nécessairement une expression de l’ordre de l’être, de l’ordre du vrai et du bien, qui seul a droit à l’existence. La peine remplit son office à sa manière dans la mesure où elle contraint le coupable, à cause de l’acte accompli, à une souffrance, c’est-à-dire à la privation d’un bien et à l’imposition d’un mal."
Rien n’était encore formulé en faveur de l’abolition de la peine de mort. Il faut attendre le pape Paul VI, son successeur, pour que celle-ci soit abolie en 1969 ; et 2001 pour qu’elle soit officiellement supprimée de la Constitution du Vatican, datant de 1929.
Le Saint-Père Jean Paul II a été un abolitionniste convaincu. Dans son Message de Noël de 1998, il appelle le monde à un "consensus en faveur de mesures urgentes et adaptées pour bannir la peine de mort". Un mois plus tard, il s’adresse de même à la population américaine, qui recourt encore à la peine de mort, dans un plaidoyer résolument contre en janvier 1999, à Saint Louis dans le Missouri. La qualifiant de "sanglante et d'inutile", il suscite quelques sifflements dans la foule parmi les 120.000 fidèles rassemblés. Il rappelle à cette occasion que "l’avortement, l’euthanasie et le suicide assisté sont un terrible rejet du don de la vie et de l’amour par Dieu".
Le pontife Benoît XVI s’est exprimé contre cette peine, dans son exhortation apostolique post synodale Africae munus (19 novembre 2011), attirant "l’attention des responsables de la société sur la nécessité de faire tout ce qui est possible pour arriver à l’élimination de la peine capitale". Deux semaines plus tard, il s’adresse aux fidèles de l’Audience générale en ces termes : "Que vos débats encouragent les initiatives politiques et législatives actuellement promues dans un nombre croissant de pays en vue d’abolir la peine de mort et de poursuivre les progrès importants accompli afin de rendre le droit pénal plus conforme à la dignité humaine des prisonniers et au maintien efficace de l’ordre public".
En 2018, le pape François supprime la peine capitale du Catéchisme de l’Église catholique, notamment à l’éclairage de l’enseignement du saint pape Jean Paul II dans l’Encyclique Evangelium vitae qu’il juge "d’une grande importance". Et, le citant, de rappeler comme signe d’espérance "l’aversion toujours plus répandue de l’opinion publique envers la peine de mort, en raison des possibilités dont dispose une société moderne de réprimer efficacement le crime de sorte que, tout en rendant inoffensif celui qui l’a commis, on ne lui ôte pas définitivement la possibilité de se racheter". Justifiant la révision du Catéchisme sur la peine de mort, il la déclare "inadmissible, quelle que soit la gravité du délit commis par le condamné, car elle attente à l’inviolabilité et à la dignité de la personne". Quelles que soient les modalités d’exécution, la peine de mort "implique un traitement cruel, inhumain et dégradant". Ainsi, dans le sillage de son prédécesseur Benoît XVI et de Jean Paul II, cette nouvelle formulation se situe dans la continuité du Magistère et renforce la cohérence du développement de la doctrine catholique.