Cette belle expression qui signifie pleurer abondamment ou à chaudes larmes n’a absolument rien à voir avec Proust et les petits gâteaux bombés du même nom ! Elle pourrait presque s'écrire "pleurer comme une Madeleine" avec un M majuscule car elle fait référence au personnage de Marie-Madeleine dans le Nouveau Testament.
Trois femmes sont généralement identifiées à Marie-Madeleine. Marie de Magdala, devenue l’une des plus fidèles disciples de Jésus après qu’il l’ait délivrée de sept démons (Lc 8, 2). Marie de Béthanie, sœur de Marthe et Lazare. Et la pécheresse anonyme, qui, alors que Jésus est invité à un repas, s’agenouille auprès de lui en pleurant, lui lave les pieds en confessant ses péchés et les couvre de parfum. "Tout en pleurs, elle se tenait derrière lui, près de ses pieds, et elle se mit à mouiller de ses larmes les pieds de Jésus" (Lc 7, 38). Devant l’abondance de ses larmes et la sincérité de son repentir, Jésus lui pardonne ses péchés. Saint Jean rapporte également une onction de parfum, cette fois par Marie de Béthanie mais Marie ne pleure pas, son geste est dicté par l’amour et le respect, non par les remords (Jn 12, 3).
Quant à Marie de Magdala, profondément attachée à Jésus et à sa parole, elle est présente tout au long de la Passion du Christ et c’est à elle que Jésus apparaît en premier alors qu’elle pleure toutes les larmes de son corps après avoir découvert son tombeau ouvert et vide. "Marie Madeleine se tenait près du tombeau, au-dehors, tout en pleurs. Et en pleurant, elle se pencha vers le tombeau". (Jn 20, 11) Les anges présents dans le tombeau, puis Jésus lui-même, qu’elle ne reconnaît pas et prend pour le jardinier, lui demandent alors : "Femme, pourquoi pleures-tu ?" (Jn 20, 13 et 15).
Du chagrin à la joie
Que ce soit Marie de Magdala ou la pécheresse anonyme (ou les deux !) qui ait inspiré l’expression, les larmes versées expriment un chagrin sincère et intense et trouvent en retour l’amour de Jésus qui transforme les larmes de peine en larmes de joie en pardonnant les péchés et en montrant que la vie est plus forte que la mort.
C’est au XIXe siècle que l’expression se popularise, notamment grâce à Honoré de Balzac dans les Petites misères de la vie conjugales de La Comédie Humaine. Auparavant (XIIIe siècle), une expression proche, "faire la madeleine", signifiait affecter le repentir ou l’humilité avec ostentation.