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Que signifie faire pénitence ?

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Edifa - publié le 08/03/21 - mis à jour le 14/03/22
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Pénitence ! Le mot est lâché, il vient titiller nos oreilles sensibles et notre humeur délicate. C’est bien pourtant à la pénitence que nous invite l’Église en ce temps de Carême. Mais sait-on vraiment ce qu’elle est, ce qu’elle recouvre, ce qu’elle entraîne ?

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Le mot « pénitence » vient du latin poena, « peine » entendu au double sens de jugement et de tristesse : la pénitence est la peine « infligée » en réparation de nos offenses, mais elle est aussi, et surtout, celle que l’on éprouve d’avoir offensé Dieu par nos fautes. Même quand il est baptisé, le chrétien n’est pas débarrassé des faiblesses de sa nature humaine : il n’est pas toujours fidèle aux promesses de son baptême et commet bien souvent des fautes. Cette inclination au péché demeure en lui. Aussi, Jésus appelle-t-Il à la conversion.

Cet effort de conversion qu’il nous revient de pratiquer « n’est pas seulement une œuvre humaine », nous rappelle le Catéchisme de l’Église catholique (n° 1428). « Il est le mouvement du cœur contrit attiré et mû par la grâce à répondre à l’amour miséricordieux de Dieu qui nous a aimés le premier. » « Il conviendrait [donc] d’insister plutôt sur le second sens du mot poena », explique le père Matthieu Rouillé d’Orfeuil, directeur des études du séminaire français de Rome. « La pénitence exprime la tristesse d’avoir péché, afin de retrouver la joie du salut. » Rude pour certains, la pénitence n’est pas très en vogue. Le carême est l’occasion de dépoussiérer cette notion clé de la vie chrétienne.

Un effort essentiel, invisible, mais concret

« L’appel de Jésus à la conversion et à la pénitence ne vise pas d’abord des œuvres extérieures, “le sac et la cendre”, les jeûnes et les mortifications, mais la conversion du cœur et la pénitence intérieure », rappelle le Catéchisme (n° 1430). « Ce ne sont pas les pénitences visibles qui sont les plus importantes, mais les pénitences qui viennent du fond du cœur », souligne ainsi la sœur Philippine, religieuse de la Famille missionnaire de Notre-Dame et responsable du foyer du Grand-Fougeray (près de Rennes). D’ailleurs, insiste-t-elle, « la pénitence, pour un chrétien, n’a, normalement, rien d’extraordinaire, encore moins d’extravagant. Elle n’est pas non plus insurmontable. Elle consiste à vivre humblement les vicissitudes de cette vie en acceptant ce qu’elle peut recouvrir de peines, petites ou grandes. »

Bien souvent, la pénitence s’offre à nous sans que nous ayons à la mettre en œuvre à la force du poignet : « Un conjoint qui nous irrite, des enfants qui nous fatiguent, un plat trop cuit, une panne d’électroménager, une migraine, un embouteillage qui ralentit notre trajet, etc., sont autant d’occasions de conversion », rappelle l’abbé Marc Vaillot, auteur de Aimer, c’est... Petit livre de l’amour véritable. Il précise : « La théologie classique enseigne que l’acte principal, le plus difficile, de la vertu de force d’âme est de résister à ce qui nous tombe dessus plutôt que d’entreprendre des efforts ardus. » La patience est ainsi un effort essentiel, invisible, mais concret.

Les trois formes de pénitence

Si l’Écriture et les Pères de l’Église insistent surtout sur les trois formes de pénitence que sont le jeûne, la prière et l’aumône, c’est pour « exprimer la conversion par rapport à soi-même, par rapport à Dieu et par rapport aux autres », rappelle le Catéchisme de l’Église catholique (n° 1434). Et cela peut se traduire par des efforts auxquels nous n’aurions pas pensé spontanément. Pour l’abbé Marc Vaillot, « le jeûne concerne aussi l’intelligence et la volonté, pas seulement l’estomac : bien sûr, on peut prendre un sucre au lieu de deux, un ou deux chocolats au lieu de quatre ; mais le jeûne peut être aussi de s’abstenir d’être insolent avec ses parents, de ne pas se mettre en colère sans raison, etc. ».

La pénitence consiste à vivre humblement les vicissitudes de cette vie en acceptant ce qu’elle peut recouvrir de peines, petites ou grandes. 

De même pour la prière : « En Carême, on peut dire trois Ave de plus que d’ordinaire, mais on peut aller plus loin et vivre cette pénitence en se recueillant mieux à la messe, en envoyant des flèches d’amour à Dieu quand on marche dans la rue (prières jaculatoires), en n’oubliant pas de dire une prière avant de se coucher. » La prière ne se borne pas à quelques moments exclusifs, mais à chaque instant de la journée.

Et l’aumône ? Sa réalité n’est-elle pas immédiate ? « Faire l’aumône, répond notre interlocuteur, c’est aussi faire un sourire à une personne qui n’est pas forcément votre meilleur ami, c’est échanger deux minutes avec un SDF alors qu’on n’a plus deux euros en poche, c’est souhaiter bon anniversaire à sa belle-mère... Car l’aumône, c’est le don constant de soi-même et pas seulement l’obole de quelques sous. »

La pénitence, un acte d’amour et non une corvée

Malgré la douceur maternelle de l’Église et la sagesse de ses pasteurs, la pénitence sert pourtant bien souvent d’épouvantail. Elle a en tout cas mauvaise presse. « C’est un acte d’amour, pas un film d’horreur ! », met en garde l’abbé Armel d’Harcourt. « Il ne faut pas l’appréhender comme une corvée, mais comme la réponse libre à l’amour de Jésus qui s’est offert pour nous sur la croix », affirme-t-il. Et d’ajouter : « La pénitence n’est pas une punition de Dieu : elle a un côté joyeux, d’amour filial par lequel on sait que, malgré sa toute-puissance, Dieu nous permet de participer au salut. »

La pénitence procède donc de l’effort amoureux et invite à revenir au Père de tout son cœur. « Le but, prévient le père Matthieu Rouillé d’Orfeuil, c’est la charité : mieux aimer Dieu et son prochain. » C’est donc en fonction de ce seul but, plus qu’en une ascèse individualiste performante, qu’il faut choisir les pénitences à mettre en œuvre. « Plus on a d’amour pour Dieu, plus on met du cœur à se convertir et à faire des œuvres de pénitences », relève Sœur Philippine. « L’effort de pénitence doit donc d’abord se préparer et être porté dans la prière, conseille le père Rouillé d’Orfeuil. J’accepterai ainsi de recevoir, dans la mort et la résurrection de Jésus, tel progrès spirituel dont j’ai besoin et que je demande. Avec un peu de bonne volonté, j’accepterai de me laisser transformer par le Christ, à la manière dont Il voudra exaucer la prière qu’Il m’inspire. » Un peu de bonne volonté ? Tout semble dit...

Joseph Vallançon

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