Avant de réciter le chapelet, il faut s’en saisir d’une certaine manière. Pas comme n'importe quel objet. Le chapelet est d'abord une grâce, c'est-à-dire un cadeau merveilleux que le Seigneur nous offre pour nous unir plus étroitement à lui. Au moment où nous portons la main dans notre sac ou dans notre poche, disons : « Merci, Seigneur ! Ce n'est pas moi qui tiens ce chapelet, c'est toi qui me tiens. Ne me lâche pas ». Dans la chapelle Sixtine, Michel-Ange a admirablement représenté la puissance de cette prière sous la forme d'un homme agrippé au chapelet que lui tend l'un de ses frères.
Tout commence avec le signe de croix
À lui seul, le signe de croix récapitule toutes les richesses auxquelles la prière nous donne accès. La croix est l'ancre du Salut à laquelle les maillons du chapelet nous amarrent. Ce signe que, si souvent, nous faisons d'une façon distraite, il faut le recevoir comme une grâce, lui aussi.
Le Credo rappelle que le chapelet est un acte de foi en Jésus
Cet acte de Foi, nous le faisons avec l'Église entière, avec Marie. Celle-ci, dans la gloire de son Assomption, jouit de la vision béatifique, mais la foi qui fut la sienne durant sa vie terrestre demeure pour toujours principe et modèle de la nôtre. Nous communions à la Personne du Sauveur en chacun de ses mystères, et ce faisant, "nous participons, en un sens, à la Foi de Marie".
Le chapelet, « l'Évangile tourné en prière »
Au fil des dizaines, c'est tout le Mystère du Salut qui se déploie sous nos yeux. D'abord l'enfance de Jésus avec les Mystères joyeux ("mystère" a ici le sens d'« événement"), puis sa Passion avec les Mystères douloureux, enfin sa Résurrection avec les Mystères glorieux. C'est bien le Christ qui est au centre de chacun de ces Mystères, depuis l'Annonciation (Jésus s'incarnant en Marie) jusqu'au couronnement de la Vierge (Jésus couronnant Marie). De même que, dans chaque Ave, le nom de Marie prépare le chemin à celui de Jésus, dans chaque dizaine, nous apprenons de la Mère à regarder le Fils.
Une pratique héritée des saints consiste à introduire des « clausules » dans chaque Ave. C'est très simple : il suffit de glisser un ou deux mots qui nous aideront à fixer notre esprit sur le Mystère contemplé. On dira par exemple : "Jésus présenté au Temple", ou bien "Jésus ressuscité... est béni". Cela peut nous aider, surtout si nous prions au milieu des occupations de la journée. Ainsi nous en arriverons à faire de notre journée un chapelet, avec ses faces joyeuses, douloureuses et glorieuses, bien unis à Jésus comme le fut Marie, sous la conduite féconde de l'Esprit saint.
Le caractère litanique et répétitif ne doit pas nous arrêter
Souvenons-nous que cette prière a été demandée par la Vierge en toutes ses apparitions. Tous les papes la recommandent avec insistance. Le Rosaire était d’ailleurs la prière préférée de saint Jean Paul II. C'est la prière des pauvres, que l'on peut dire en toutes circonstances, même et surtout si l'on est fatigué. Il y a des jours où l'on se sent incapable de rien dire, et d'autres où l'on ne supporte plus ce qui ressemble aux rabâchages que Jésus dénonce dans l'Évangile. La petite sainte Thérèse de Lisieux avait beaucoup de mal à dire le chapelet. Or, c'est chez elle que nous trouvons l'une des paroles les plus à même de nous éclairer sur la nature réelle du chapelet. De quoi s'agit-il en effet, sinon de « regarder Marie et dire : Jésus » ? Tout est là. Pour n'être pas négligeable, le chapelet n'en reste pas moins un moyen. Le but, lui, quel est-il ? Avec Marie, nous tourner vers Jésus qui veut nous unir à Lui. Dieu fasse qu'il en soit ainsi, même si, certains jours, il nous arrive de balbutier.
Louis Sankalé