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Qu’adviendra-t-il après Emmanuel Macron ?

Attal-Macron

Emmanuel Macron et Gabriel Attal.

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Xavier Patier - published on 10/01/24
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Le président de la République vient de nommer son quatrième Premier ministre, Gabriel Attal, mais que restera-t-il d’Emmanuel Macron après son départ en 2027 ? Pour l’écrivain Xavier Patier, les Français mécontents se résoudront à le regretter, parce qu’il aura tenu un cap.

Qu’adviendra-t-il après Emmanuel Macron ? Cette question, nous ne cesserons de nous la poser à mesure que nous nous approcherons de l’échéance de 2027 et qu’il nous faudra nous résoudre à désigner un nouveau président qui, par la faute d’une réforme malencontreuse de la Constitution, pourra être n’importe qui, sauf le président sortant. Curieuse manie que de faire progresser notre démocratie en multipliant les freins à l’expression de la volonté de l’électeur : on interdit les cumuls, on limite le nombre des mandats, on entrave les candidatures, comme si les électeurs étaient incapables de faire le bon choix tout seuls. Si les Français ne veulent pas d’Emmanuel Macron pour un troisième quinquennat, ils devraient être assez grand pour le décider dans les urnes. Mais non ! On ne leur fait pas confiance. Et l’on s’étonne que le statut non rééligible du président installe un climat de fin de règne permanent, dévalorise la fonction et prive le pays, en pleine tempête, d’un leader capable de s’engager dans le long terme. Après moi le déluge, disait Louis XV. Il y a dans la réforme constitutionnelle de 2008 un peu de cet esprit désinvolte. Par les temps qui courent, nous ne gagnons rien à avoir un président faible : c’est pourtant le luxe que nous a offert Nicolas Sarkozy par une réforme qui mériterait un examen psychanalytique. 

Fascination de soi et autodénigrement

Mais ce n’est pas mon propos. Ce que je voudrais dire, c’est que la France en colère s’achemine insensiblement vers quelque chose qui bientôt ressemblera à une réhabilitation des deux mandats du président Macron et qu’il faut chercher à comprendre pourquoi. Vous en doutez ? Il y a pourtant des indices intéressants. "Naguère encore, les Français ne doutaient pas qu’à l’exception de la France, l’univers ne fût dans un état voisin de la sauvagerie, et de cette France d’ailleurs ils se montraient très mécontents." Cette formule écrite par Gobineau au lendemain du désastre de 1870 pourrait l’être aujourd’hui par beaucoup d’observateurs, tant le mélange de fascination de soi et d’autodénigrement continue de définir notre caractère national éprouvé par la transformation du monde et la torture du déclassement.

Le désamour des Français pour leurs dirigeants constitue l’état naturel de notre climat politique. Il ne date pas d’aujourd’hui, même si la fièvre des sondages et le bavardage des réseaux sociaux lui donnent une visibilité inédite. Le président Macron est donc hué. Il le sera jusqu’à la fin de son mandat. C’est la règle. Et cependant les Français attendent de lui qu’il ne cesse pas de gouverner. Et sur ce point il les satisfait : il continue de gouverner. Il met au travail un nouveau gouvernement. Voilà le point intéressant.

Il aura tenu un cap

Les Français mécontents vont se résoudre à réhabiliter Emmanuel Macron quand il sera parti parce qu’il aura tenu un cap. Macron les aura mis souvent en colère, mais il ne leur aura pas fait honte. Il aura misé sur des idées simples, en dépit de ses discours compliqués. Et il ne laissera après lui aucun héritage politique. Aucun héritage, et plus précisément aucun héritier. C’est son point faible et c’est sa chance : il joue perso. Les Machiavels au petit pied qui prendront sa suite en 2027 risquent de ne pas savoir où ils iront, pour avoir été élus sur un rêve dégagiste. 

Regardons en arrière. La réforme du Code du travail, la réforme de la SNCF, ou encore la suppression de l’impôt sur la fortune demandaient un courage politique qu’aucun des deux prédécesseurs d’Emmanuel Macron n’avait eu. Il les a menées à bien. Il laissera une France mal en point, en déficit et endettée, mais plus attractive que celle qu’il avait trouvée. Elle est redevenue la première destination des investissements étrangers en Europe. Même sans majorité à l’Assemblée nationale, Emmanuel Macron aura assumé des réformes insuffisantes, peut-être, mais nécessaires, qu’il eût été tentant pour lui de différer : sur les retraites et sur l’immigration. La crise du coronavirus n’a pas été gérée par lui plus mal qu’ailleurs sur le plan sanitaire, et plus tôt mieux sur le plan économique. La loi sur le séparatisme a été critiquée, mais au moins elle a été promulguée. Elle n’aurait pas été adoptée sans une forte dose d’opiniâtreté. Le bilan d’Emmanuel Macron sera contesté, mais au moins il y aura un bilan. 

Un homme de sa génération

L’homme lui-même, qui nous agace tellement, aura su à l’occasion trouver des formules justes, que bientôt on redécouvrira dans le fatras de ses trop longs discours. Il a montré qu’il était libre : sur les chrétiens d’Orient, sur la chasse, sur la présomption d’innocence, sur le statut de l’artiste, sur Gérard Depardieu, sur Notre-Dame de Paris, il a tenu des propos dont il savait qu’ils n’étaient pas de nature à plaire à une majorité. Sur les sujets stratégiques comme la Défense ou le nucléaire, il aura fini par rejoindre des positions de bon sens après avoir trop longtemps divagué. On peut appeler cela inconstance, mais on eut aussi appeler cela pragmatisme. Sur les sujets sociétaux, en revanche, il aura cédé à l’air du temps. Il reste l’homme de sa génération. Pouvait-il en être autrement ? Et que fera son successeur ? 

Pour toutes ces raisons, et malgré la dernière, Emmanuel Macron sera aimé dès que la personne qui lui succédera commencera à décevoir. Il aura exercé deux mandats actifs grâce au génie constitutionnel de Michel Debré et malgré les réformes ineptes de Nicolas Sarkozy. Les Français, qui le détestent cordialement, se rappelleront qu’il l’ont élu deux fois, et même, la seconde, sans lui donner de majorité à l’Assemblée nationale, preuve que c’est bien sa personne et non pas son parti que finalement ils désiraient. Après lui, les regrets.

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