L’évangile de Luc rapporte cette visite à Élisabeth de manière détaillée et commence par nous rappeler que Marie se mit en route "avec empressement vers la région montagneuse, dans une ville de Judée" (Lc 1,39). La tradition a retenu pour cette Visitation le lieu nommé Aïn Karem, tout proche et à l’ouest de Jérusalem, lieu même où résidaient Élisabeth et son époux Zacharie. À peine entrée dans leur maison, Marie salua sa cousine qui aussitôt sentit son enfant tressaillir et fut remplie d’Esprit saint.
Élisabeth prononça alors ces mots passés à la postérité : "Tu es bénie entre toutes les femmes, et le fruit de tes entrailles est béni". La conversation prend immédiatement une tonalité qui dépasse celle de deux parentes partageant la joie de leur maternité respective avec cette question posée par Élisabeth : "D’où m’est-il donné que la mère de mon Seigneur vienne jusqu’à moi ?" et encore : "Heureuse celle qui a cru à l’accomplissement des paroles qui lui furent dites de la part du Seigneur."
Magnificat anima mea…
Lors de cette Visitation, les tout premiers mots en latin de la prière de la Vierge Marie– "Magnificat anima mea…" qui signifient "Mon âme exalte le Seigneur…", prière bien connue de tous les catholiques – et des lecteurs de Magnificat ! – rendent gloire à la grandeur divine. Dieu a su une nouvelle fois écouter les plus petits et l’humble servante de reconnaître la magnificence de ses œuvres en un vibrant rappel de tout ce que le Seigneur accomplit sous l’Ancienne Alliance.
Marie s’associe avec sa cousine Élisabeth pour louer Dieu de ce qu’Il accomplit miraculeusement, mais aussi permettre la rencontre future de leurs deux enfants à naître, Jésus et Jean-Baptiste.
Avec cette vibrante prière, Marie s’associe avec sa cousine Élisabeth non seulement pour louer Dieu de ce qu’Il accomplit miraculeusement pour elles, mais également de permettre la rencontre future de leurs deux enfants à naître, Jésus et Jean-Baptiste… Ce dernier avant même d’être mis au monde reconnaît déjà, en effet, par son tressaillement la grandeur de Celui dont il ira préparer le chemin, jusqu’à leur rencontre ultime lors du Baptême de Jésus par Jean-Baptiste. La tradition célèbre cette rencontre tous les 28 mai depuis 1969 (auparavant la date du 2 juillet était retenue depuis le Moyen Âge).
La Visitation de Giotto
Le thème foisonnant de la Visitation a su inspirer les plus grands artistes tel le célèbre artiste italien Giotto de Bondone pour la basilique d’Assise au début du XIVe siècle. Un siècle après la mort de saint François, ses frères franciscains redécorèrent l’église inférieure d’Assise en son hommage et eurent recours au grand artiste Giotto di Bondone (1266 ou 1267 – 1337) pour réaliser les fresques dans le transept nord. L’artiste italien a alors retenu le thème de la Visitation et fit le choix pour cette biblique rencontre entre Marie et Élisabeth d’une représentation troublante de simplicité et de partage ainsi qu’il ressort de l’accolade entre les deux femmes.
Sa manière de représenter ses personnages qui s’écarte de l’abstraction "figée" de l’art byzantin pour proposer des évocations vibrantes de l’âme humaine sera à l’origine de l’humanisme développé par la Renaissance. L’expressivité toute nouvelle née sous son pinceau dans cette Visitation souligne à la fois le tendre rapprochement entre les deux parentes, mais également le respect de chacune pour ce qu’elles représentent. Avec Giotto, le traitement hiératique byzantin se trouve relégué au rang de l’histoire, sa peinture faisant littéralement vibrer le récit évangélique de Luc…