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Quand la société se conduit comme si Dieu n’existait pas

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Église Saint-Pierre de Prades (Pyrénées-Orientales).

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Xavier Patier - published on 12/07/23
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Les papes l’avaient annoncé, remarque l’écrivain Xavier Patier : le vide spirituel encouragé par la séparation entre l’Église et l’État aura indirectement préparé le terrain à des injustices d’un genre nouveau. Vivre comme si Dieu n’existe pas ne peut pas être sans conséquence.

Lu tôt ce matin d’été — Dieu sait ce qui m’y a poussé — la lettre encyclique Vehementer nos publiée par Pie X pendant l’hiver 1906, quelques semaines après le vote de la loi de séparation de l’Église et de l’État inspirée par le cabinet d’Émile Combes et rapportée par Aristide Briand. Texte de circonstance, sans doute, et document d’archives pour historiens. "Qu’il faille séparer l’Église de l’État, c’est une thèse absolument fausse, une très pernicieuse erreur", y explique le Saint-père. On pourrait souligner le caractère daté de ce propos à visée politique, tellement éloigné de la constitution Gaudium et Spes approuvée par le concile Vatican II soixante ans plus tard, qui fonde sur la séparation de l’Église et de l’État notre doctrine de la liberté religieuse et le cadre de nos engagement dans la cité. Il n’empêche, la lecture de la lettre apostolique de Pie X donne des réponses inattendues à certains tracas de notre temps, pour nous catholiques français qui sommes si souvent crucifiés d’être catholiques et Français, en ce rude été 2023. 

La notion de vrai

Par exemple ceci : "Qu’entre l’État et l’Église l’accord vienne à disparaître […] la notion de vrai en sera troublée, et les âmes remplies d’anxiété", dit Vehementer nos. Plus d’un siècle après la loi de séparation, qui pourrait nier que la notion de vrai dans la société civile est troublée, qui peut nier que les âmes sont remplies d’anxiété ? D’une certaine façon, nous n’avons plus en France ni Église, ni État. La séparation a fini par avoir raison des deux. Le spirituel s’efface, le temporel s’égare. Il arrive ainsi qu’en voulant séparer deux frères siamois, le chirurgien les tue l’un et l’autre. J’exagère ? Avant Pie X, Léon XIII avait annoncé :

Les sociétés humaines ne peuvent pas, sans devenir criminelles, se conduire comme si Dieu n’existait pas.

Il le disait dans un document que cite justement Vehementer nos. Nos sociétés émancipées de Dieu ne sont-elles pas tentés de devenir criminelles ? Jean Paul II n’a-t-il pas eu raison de dénoncer la culture de mort ? La loi civile n’a-t-elle pas subi les conséquences de la sécularisation de l’État ? 

Le vide spirituel encouragé par la séparation aura indirectement préparé le terrain à des injustices d’un genre nouveau. La laïcité aura donné à l’État, ou à ce qu’il en reste, quelques outils pour défendre nos libertés contre la charia. C’est déjà ça. Mais à regarder le temps long de la Révélation, il semble probable que la fusion de l’Église et de l’État ayant connu une fin conflictuelle, leur séparation connaîtra un jour le même sort : elle aussi, elle finira. Espérons que, ce jour-là, l’Église qu’il sera question de rapprocher de l’État sera chrétienne et que l’État de ce futur lointain n’aura pas sombré dans le crime. 

Nous relever inlassablement

Revenons sur terre. Tentons de vivre au présent sans nous soucier de ce qui ne dépend pas de nous. "Toute littérature dérive du péché", disait Baudelaire. Il aurait pu aussi bien le dire de la politique, y compris de la politique ecclésiale. Il aurait même pu le dire de la théologie. Le péché, voilà le problème. Il nous arrive de le regarder comme une solution et c’est alors qu’il triomphe. Nous sommes incarnés. Nous nous débattons. Nous cassons des œufs pour faire nos omelettes. Quelle misérable condition ! Il nous faut nous relever inlassablement : toute la vie chrétienne se résume à cette patience. 

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