L'image restera dans l'histoire. Celle d'un pape, la main posée sur le cercueil de son prédécesseur, en bruit de fond les applaudissements respectueux des fidèles réunis place Saint-Pierre. La scène est inédite. C'est le dernier adieu de François à Benoît. Après près de dix ans de vie retirée dans le monastère Mater Ecclesiae du Vatican, le pape Benoît XVI sera inhumé peu après dans la crypte de la basilique Saint-Pierre, à l'endroit même où le cercueil de Jean Paul II reposa entre son décès en 2005 et sa béatification en 2011. Au Vatican les symboles sont importants : la séquence, pleine d'émotions, vient relier en quelques instants trois pontificats et plus de 40 ans d'histoire.
Plus tôt, dans la matinée, le cercueil de Benoît XVI avait fait son apparition sur la place qui se remplissait encore timidement. Seulement 50.000 personnes seront venues entourer le pontife allemand pour ces funérailles sobres et solennelles, bien loin du million de fidèles réunis pour les obsèques de Jean Paul II.
"On lui avait déjà fait nos adieux"
Une mobilisation plus faible qu'attendue, qui s'explique notamment par le fait que Benoît XVI s'était effacé pour une vie de prière. "On lui avait déjà fait nos adieux en 2013, glissait un employé du Vatican ; aujourd’hui, c’est le dernier chapitre de la vie de Benoît qui se referme. Une page se tourne, mais pas celle de sa papauté".
Revivez en images les funérailles de Benoît XVI
Dans la foule toutefois, beaucoup étaient arrivés aux aurores pour s'approcher au plus près de la basilique, encore recouverte d'un épais brouillard. Non loin d'une impressionnante délégation de Bavarois en tenues traditionnelles se trouvait Carmen, une octogénaire originaire de Calabre, au sud de l'Italie. Depuis la mort de Benoît XVI, le 31 décembre, elle "campait" à Saint-Pierre pour veiller sur le défunt pontife, "quitte à ne pas manger pour éviter de sortir du Vatican et de refaire la queue", raconte-t-elle en souriant. Son lien avec le pape allemand était profond. Le 28 février 2013, le jour du départ officiel de Benoît XVI, elle était déjà place Saint-Pierre pour saluer l’hélicoptère blanc du pape qui devenait alors émérite.
Alors, lundi, mardi, et mercredi, Carmen était venue dans la basilique pour honorer la dépouille de Benoît exposée sur un catafalque, devant le baldaquin du Bernin. En tout, près de 200.000 personnes auront comme elle rendu hommage au pontife allemand.
La veille de l'enterrement, au moment de la mise en bière, Mgr Georg Gänswein, le secrétaire particulier de Benoît XVI depuis plus de 20 ans, avait recouvert le visage du 265e pape d'un linge blanc. Avant de refermer le cercueil de bois, le Rogitum de Benoît XVI avait été placé aux côtés du corps du pontife décédé à 95 ans, conformément à la tradition de consigner en un bref texte la vie et les œuvres les plus importantes du pontife.
Une homélie sobre
Lors de la messe de funérailles, nul éloge funèbre comme cela avait pu être le cas en 2005, lorsque l'alors cardinal Joseph Ratzinger avait retracé le parcours de Jean Paul II. Mais une homélie sobre du pape François, bâtie comme une méditation autour des dernières paroles du Christ - "Père, entre tes mains, je remets mon esprit". Pour Mgr Vincent Jordy, archevêque de Tours et vice-président de la Conférence des évêques de France, "le pape François a voulu s’effacer d’une certaine manière, et laisser passer Jésus devant, parce que c’est lui que Benoît XVI suivait".
Devant ce tombeau épuré sur lequel un Évangile avait été placé, François a souhaité à son successeur le bonheur de la rencontre avec Dieu : "Benoît, fidèle ami de l’Époux, que ta joie soit parfaite en entendant sa voix définitivement et pour toujours !".