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Géraud est né dans le Quercy, au XIIe siècle, d’une famille de petite noblesse qui le confie très jeune aux moines de l’abbaye bénédictine de Moissac. Le jeune garçon s’y trouve si bien qu’il décide d’y rester et y prononce ses vœux de religions dès qu’il en a l’âge. Ses qualités intellectuelles lui valent d’être nommé professeur de grammaire, matière qui, au Moyen Âge, recouvre tous les savoirs littéraires, et la musique, art dans lequel Géraud, passionné de chant grégorien, excelle. Le jeune professeur se voit donc confier la charge de maître de chœur, et celle de bibliothécaire. Ces fonctions, s’ajoutant à la prière et aux offices, lui laissent peu de loisirs mais il est parfaitement heureux dans cette existence et ne voudrait surtout pas en changer.
Un maître de chœur d’exception
Hélas pour lui, dans les années 1090, Bernard de Sedirac, nommé archevêque de Tolède, ville récemment reconquise par les Espagnols sur les Maures, rentrant de Rome avec le titre de légat pontifical et en route pour son nouveau diocèse, fait halte à Moissac. Assistant aux offices, il est charmé par la beauté du chant liturgique et le degré de perfection où Père Géraud a amené ses choristes. Dès lors, Sedirac n’a plus qu’une idée : emmener avec lui ce maître de chœur d’exception afin qu’il forme la maîtrise de sa cathédrale tolédane. Certes, le père abbé de Moissac, qui tient à Géraud, tâche de le soustraire à ce caprice épiscopal, mais, arguant de son titre de légat, qui fait de lui le représentant du pape, Bernard de Sedirac est décidé à emmener le pauvre moine, dont personne ne demande l’avis. Il déclare péremptoirement que lui dire non équivaut à dire non au souverain pontife, de sorte que l’abbé, n’osant courir pareil risque, ordonne à Géraud de partir. Ne reste à ce dernier qu’à obéir.
On vante son inépuisable charité, son amour des pauvres, on lui attribue des dons de prophétie.
Au vrai, arrivé à Tolède, Géraud ne risque guère de s’ennuyer. Tombée aux mains de l’islam depuis quatre siècles, la région est presque totalement déchristianisée et tout y est à refaire : rebâtir les églises, reconsacrer celles transformées en mosquées, convertir les populations… La tâche est immense, Géraud s’y emploie sans que son archevêque lui laisse perdre de vue la raison de sa venue : le chœur de la cathédrale auquel il faut donner la perfection de celui de Moissac. Peu à peu, la réputation de Géraud se répand dans toute la péninsule ibérique. On vante son inépuisable charité, son amour des pauvres, on lui attribue des dons de prophétie de sorte que, la Reconquista se poursuivant et les chrétiens ayant libéré la cité portugaise de Braga, on lui en offre en 1100 le siège épiscopal.
La recréation du diocèse de Braga
S’il n’a toujours pas pris le goût des honneurs, Géraud a découvert, en revanche, le lamentable état de ces anciens diocèses tombés en déshérence où ne restent que de rares communautés catholiques, assez attachées à leur foi pour avoir enduré si longtemps sans apostasier les brimades et supplices infligés aux dhimmi qui refusent de renier le Christ. Comme si cela ne suffisait pas, un autre fléau s’est abattu sur le Portugal : la soif de richesse de certains chevaliers venus en libérateurs mais qui, les musulmans chassés, s’attribuent sans vergogne, non seulement les terres des notables mahométans, mais aussi les anciennes propriétés de l’Église et les revenus qui leur sont attachés. Il faut donc à Géraud lutter à la fois sur le plan spirituel, en faisant œuvre infatigable de missionnaire, sur le plan matériel en reconstruisant des édifices religieux détruits ou tombant en ruine, et sur le plan juridique, en faisant rendre gorge à ces seigneurs mauvais chrétiens qui n’hésitent pas à spolier l’Église.
Des fruits superbes, comme aux plus jours de l’été
Neuf années durant, l’évêque de Braga se bat pour recréer son diocèse. Fin novembre 1109, Géraud, qui n’est plus jeune, tombe malade et s’alite. Et voilà que, sur son lit de mort, cet homme si mortifié qui, toute sa vie s’est privé des plaisirs terrestres et a fui avec horreur la gourmandise, éprouve soudain le désir déraisonnable de manger des fruits frais, pêches, cerises, abricots, figues qui, en cette saison, ont disparu des jardins et des étals… Impossible de satisfaire cette absurde envie de mourant que certains clercs, inquiets, prennent pour une tentation démoniaque destinée à faire perdre à Géraud le mérite de ses longues pénitences. Mais voilà qu’en regardant par la fenêtre de la chambre de l’évêque, ses prêtres, ahuris, constatent que, dans le verger, les arbres se sont couverts de fruits superbes, comme aux plus beaux jours de l’été. Ainsi le Ciel a-t-il exaucé l’innocent désir de son serviteur.
Géraud s’éteint le 5 décembre. Dans la chapelle de sa cathédrale où il repose, les guirlandes de fruits qui ornent sa tombe rappellent le miracle.