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Blanc, brun, bleu, noir ou gris, le voile est l’attribut par excellence des religieuses consacrées. Son usage est antérieur aux premiers temps de l’Église, et est historiquement traditionnel et culturel, bien avant de recouvrir la fonction religieuse qu’on lui connaît aujourd'hui et qui anime régulièrement le débat public. Ainsi, à l’époque du Christ, les femmes étaient voilées car culture : en Orient comme en Occident, on retrouve cette tradition antérieure même aux religions révélées sans qu’on n’ait encore identifié la date précise de son apparition.
Selon Odon Vallet, historien des religions, la première mention de son port obligatoire pour les filles, épouses et concubines d’hommes libres et pour les prostituées sacrées mariées est attesté dès le règne du roi assyrien Téglat Phalazar Ier (vers 1100 av. J.-C.). Il assurait à celles qui le portaient la protection en manifestant que leur corps ne devait pas être touché, contrairement aux femmes non voilées.
L’Ancien Testament fait lui aussi mention de son usage : la tradition veut alors que la fiancée n’ôte son voile que dans l’intimité de la chambre nuptiale. C’est ainsi que Jacob, qui croit épouser Rachel, se voit finalement uni à Léa (Gn 29, 26). Dans le Nouveau Testament, le voile chrétien de l’Eglise primitive dont saint Paul recommande le port lors du culte n’est quant à lui pas sans rappeler celui des vestales romaines qui constitue déjà un signe distinctif de consécration pour finir par constituer un véritable "symbole du métaphysique" selon Gertrud Von Le Fort dans Die ewig Frau [La femme éternelle], puisqu’il est ce qui rend invisible l’objet qu’il couvre et en préserve l’intimité.
Un signe visible donné au monde
Gertrud von Le Fort poursuit en soulignant que traditionnellement, tous les grands moments de la vie d’une femme sont marqués par le port du voile : le mariage, le deuil et la consécration religieuse. Le voile de l’épouse au jour des noces n’est qu’image éphémère de celui que l’épousée porte quotidiennement dans la vie religieuse. La religieuse porte le voile comme signe de sa consécration. Il n’est pas négation de la féminité, mais signifie qu’elle est désormais toute offerte à Dieu et de même, il n’est pas obligation, mais sacrifice consenti car renoncement à "dévoiler" au monde l’attribut féminin qu’est la chevelure. L’habit est donc signe visible donné au monde qui met à part celle qui le porte et marque ainsi sa consécration religieuse.
"Nous qui portons cet habit du Carmel, souligne sainte Thérèse d’Avila, nous sommes appelés, il est vrai, à l’oraison et à la contemplation ; c’est là notre première institution, et nous sommes les filles de ces saints Pères du Mont Carmel qui, foulant aux pieds toutes les choses du monde, cherchaient au sein de la plus profonde solitude ce riche trésor et cette perle précieuse dont nous parlons".