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BRICS : un sommet pour changer de dimension

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Sommet des BRICS de 2022, accueilli par la Chine.

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Jean-Baptiste Noé - publié le 04/05/23
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Depuis leur création officielle en 2009, les BRICS ont la volonté de peser sur la scène mondiale et de concurrencer l’Occident. Mais partagés par des intérêts divergents voire antagonistes, observe le géopoliticien Jean-Baptiste Noé, ils ne parviennent pas à aller au-delà de leur unité factice.

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C’est à un économiste de Goldman Sachs, Jim O’Neill, que l’on doit l’invention du terme BRIC en 2001. Il s’agissait alors de montrer que ces pays — Brésil, Russie, Inde, Chine — ayant abandonné le communisme et adopté l’économie de marché, allaient connaître une forte croissance économique et pourraient ainsi concurrencer l’Occident. La Chine venait d’intégrer l’OMC, la Russie, nouvellement dirigée par Vladimir Poutine, avait stabilisé sa situation après la dépression des années 1990, le Brésil faisait rêver et l’Inde s’annonçait comme un grand. Il y avait donc l’Occident et les BRIC, qui n’étaient certes pas l’Occident mais qui, en adoptant la démocratie et l’économie de marché, deux valeurs occidentales, allaient pouvoir le concurrencer. Afin de témoigner de l’universalité des BRIC, on lui adjoignit en 2009 un pays d’Afrique, d’où le "S" pour Afrique du Sud. Ces pays se sont pris au jeu et ont officialisé leur groupe lors d’un sommet tenu le 16 juin 2009 à Iekaterinbourg. D’une idée d’un économiste américain, on passait à une réalité géopolitique. Depuis, un sommet des BRICS se tient tous les ans.  

Quelle réalité commune ? 

Mais qu’est-ce qui unit ces pays entre eux, si ce n’est le fait de ne pas être Occidentaux ? C’est là toute l’ambiguïté des BRICS. Ils n’ont pas les mêmes intérêts, ni les mêmes valeurs, ni les mêmes soucis. Ils veulent montrer qu’un autre monde est possible, non dominé par les États-Unis et qu’une puissance géopolitique émerge à côté de l’Occident. Mais l’Inde et la Chine sont opposées sur de nombreux dossiers, l’Afrique du Sud n’en finit plus de s’enfoncer dans la violence et la pauvreté, le Brésil n’a guère atteint les rêves des années 2000 et la Russie est mise au ban du monde depuis l’invasion de l’Ukraine. Dans un groupe de forts, il faut un chef. À la tête de l’Occident, il y a les États-Unis. Qui pour diriger les BRICS si ce n’est la Chine ? Mais comment l’Inde et la Russie pourraient accepter d’être vassalisées par leur voisin ? L’Occident a pour lui une même culture, une même vision du monde, un même être. Quoi de commun entre un Brésilien et un Chinois, un Indien et un Russe ? L’Occident dispose de leviers pour opérer sur la scène mondiale : l’OTAN pour la scène militaire, la Banque mondiale et le FMI pour la scène économique, les États-Unis pour la scène politique. Les BRICS n’ont rien de tout cela et on voit mal une alliance militaire s’opérer entre l’Inde et la Chine. Les BRICS font beaucoup parler les commentateurs, mais ils demeurent sans existence réelle autre que verbale. 

Des outils d’action

Bien conscients de cela et bien décidés à rivaliser avec l’Occident, les BRICS se sont dotés d’outils d’action. Lors du sommet de Fortaleza (2014, Brésil), ils ont créé une banque de développement chargée de concurrencer la Banque mondiale. Basée à Shanghai et dotée d’un capital de 50 milliards de dollars, elle est chargée d’accorder des prêts aux pays émergents pour financer leurs travaux d’infrastructures. Là aussi, cela fonctionne sur le papier, moins dans la réalité. Une banque est toujours au service de projets politiques. Qui celle-ci peut-elle servir dans la mesure où les intérêts géopolitiques de ces membres sont souvent différents, voire divergents ? Le fait que la banque soit basée en Chine démontre bien que c’est ce pays qui en a la direction intellectuelle. Les autres pays peuvent-ils s’en satisfaire ? 

Le prochain sommet des BRICS se tiendra en août à Durban. Une quarantaine de pays ont annoncé vouloir rejoindre ce groupe, ce qui en ferait l’alliance mondiale la plus importante tant sur le plan démographique qu’économique. Mais l’addition de PIB ne fait pas une puissance. C’est lors d’un précédent sommet à Durban, en 2013, que les BRICS avaient annoncé la création d’une banque commune destinée à concurrencer la Banque mondiale et à se passer du dollar. Dix ans plus tard, le processus est au même point. Certes le dollar est moins utilisé qu’il y a deux ans, du fait notamment des sanctions contre la Russie, mais il conserve toujours son hégémonie et sa suprématie. Pour l’instant, comme depuis 2001, les BRICS sont davantage un élément pour commentaires géopolitiques qu’une réalité politique.

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