Pour qu'Aleteia poursuive sa mission, faites un don déductible à 66% de votre impôt sur le revenu. Ainsi l'avenir d'Aleteia deviendra aussi la vôtre.
*don déductible de l'impôt sur le revenu
Après avoir parcouru l’Amérique latine pendant plusieurs années à bord de leur minibus dans le cadre de Mission Tepeyac, Romain et Rena de Chateauvieux, un couple de quarantenaires, se sont installés au Chili et y ont fondé en 2013 Misericordia. Une œuvre de charité et d'évangélisation au service des plus pauvres qui intervient dans les quartiers en périphérie des grandes villes : Santiago, Buenos Aires, New York, Paris. Le couple décrit son aventure dans son récent ouvrage Misericordia (Première Partie), paru en janvier 2023.
Mariés depuis juillet 2006, Romain et Rena vivent avec leurs six enfants dans les quartiers les plus défavorisés de Santiago. Elle est brésilienne et lui français. Issus de milieux que tout oppose, ils ont pourtant fait l'un et l'autre l'expérience d'une conversion radicale au Christ, avant de se rencontrer. Pour eux, la mission est une vocation à temps plein, même mariés, même parents. Épouse, mère, missionnaire… Rena de Chateauvieux s'est confiée à Aleteia à l’occasion de leur passage en France.
Aleteia : Comment vous en sortez-vous à la tête d’une famille nombreuse ? Ce ne doit pas être évident tous les jours au vu de votre mode de vie atypique ?
Rena de Chateauvieux : Tout d’abord, je tiens à dire que je suis très heureuse d’avoir une grande famille. Heureusement que nous sommes deux, je sens qu’avec mon mari on se complète beaucoup et on s’aide. Quand on s’est marié, on avait ce rêve d’avoir beaucoup d’enfants et à la fois d’être missionnaires. Je pourrais dire que le Seigneur a comblé ce désir au-delà de nos espérances.
Les enfants sont venus au fur et à mesure de notre vie missionnaire en tant que couple. Théophane, 15 ans, est né aux États-Unis, tout comme Silouane, 14 ans. Juan Diego, 12 ans, lui, est né aux Mexique. Esteban, 10 ans, est né dans le Nord du Chili, tandis que son frère Pier Giorgio, 6 ans, est né dans la capital du pays, Santiago. Karol, est parti au Ciel tout petit, j’ai eu une fausse couche. Et la petite Teresa est née il y a deux ans à Santiago.
On a toujours connu ce mode de vie, tout comme nos enfants. On était toujours étonné de la Providence de Dieu dans les enfants qui naissaient durant nos voyages.
Avant de prendre le bus pour partir en Amérique latine pour aller dans des endroits inconnus, certaines personnes avaient peur pour nous et cela nous poussait parfois à nous poser des questions : Comment on va faire avec des enfants ? Et à chaque fois, le Seigneur nous soutenait. Pour chaque accouchement, nous avions tout ce dont nous avions besoin, et même plus.
Et puis, c’était un choix pour nous de vivre simplement et de n’avoir pas grand-chose. Et chaque fois, on a eu le nécessaire pour vivre. Chaque fois, nous étions étonnés de la générosité des personnes que nous rencontrions. La Providence de Dieu est concrète et réelle dans les petites comme dans les grandes choses.
Vous êtes mère de six enfants. Qu’est-ce que vous aimez le plus dans votre maternité ?
À chaque fois que je suis enceinte, c’est très émouvant pour moi. J’ai l’impression que le fait de porter un enfant me fait participer, comme toutes les autres femmes, à la Création de Dieu et à chaque fois je me sens indigne de ce grand cadeau que le Seigneur me fait en tant que femme. Je suis toujours émerveillée devant cette aventure que de porter et de donner la vie à un autre être humain.
Ce qui est aussi extraordinaire dans cette aventure d’être maman, c’est d’avoir de plus en plus cette certitude que ma vocation en tant que mère est, bien sûr de faire en sorte que mes enfants soient heureux sur terre et qu'ils se développent en tant que personne, mais surtout de les aider à devenir saints et les amener vers le Ciel. C’est quelque chose qui me rend hyper heureuse et me fascine dans mon rôle de maman.
Avec toutes vos responsabilités, comment faites-vous pour consacrer du temps à votre famille ? Et à votre mari ?
L’équilibre familial, c’est quelque chose à trouver et à chercher tout au long de la vie. Ce n’est pas quelque chose de donné ou naturellement acquis par avance. Comme toute autre famille, on a aussi ce défi : trouver l’équilibre entre la mission, notre couple, nos enfants, la vie de famille. On passe par des étapes. Il y a des moments où tout va très bien et tout d’un coup, nous sommes pris par la mission et nous avons beaucoup de choses à faire. À ce moment, on s’assoit et on remet les choses à plat. C’est important de discuter car, par expérience, je sais qu’on peut se faire bouffer par tellement de choses de l’extérieur. Le secret c’est donc avoir ce regard vigilant et attentif aux besoins de chacun, des enfants et du couple puis, savoir s’arrêter, reparler et organiser le temps. Mais en général, notre programme pour la semaine est assez organisé pour qu’on puisse avoir des moments pour nous et pour les enfants.
Quel est le début d’une journée idéale pour vous ?
Commencer la journée par un chapelet et une messe. Le matin, nous prions tous ensemble le chapelet et à l’école, nous avons aussi une messe, très tôt le matin. C’est un très bon moteur pour commencer la journée car on la débute avec l’essentiel : le Christ, qui nous habite ainsi pour toute la journée. Commencer la journée de cette manière avec mes enfants et mon mari me donne le sentiment très fort d’être en communion avec eux.
Une pensée qui vous aide lorsque vous êtes de mauvaise humeur ?
La première chose qui me vient à l’esprit, quand je suis de mauvaise humeur ou triste, c’est l’image de la Vierge Marie. Je la contemple simplement dans mon cœur et tout de suite je ressens une paix intérieure. Je sens que je ne suis pas seule en tant que femme et mère. En la regardant dans les moments les plus difficiles, je retrouve ce dont mon cœur a besoin.
Quels saints vous aident dans votre quotidien de mère et d’épouse ?
Il y en a beaucoup, mais ma sainte préférée est Thérèse de Lisieux. Elle est d’ailleurs la sainte patronne de Misericordia. Elle m’aide dans mon quotidien de mère et d’épouse. Avec elle, j’ai découvert beaucoup de choses mais surtout le secret de faire les petites choses avec un grand amour et que cela peut tout changer. Quand je fais le ménage, la cuisine, change les couches… ces petites choses du quotidien qui font partie de la vie de mère de famille, je sens sainte Thérèse à côté de moi qui me dit qu’avec ces petites choses faites avec un grand amour, on peut tout changer.
Quels sont selon vous les bienfaits de l’évangélisation et de la mission, tant pour les enfants que pour les adultes ?
Ça fait plus de 17 ans que je suis dans la mission et par mon expérience de mission je peux dire qu’elle apporte beaucoup tant aux enfants qu’aux adultes. C’est en tout cas notre expérience. Pour les enfants, du moins je l’ai remarqué pour les miens, elle apporte une dimension d’ouverture aux autres qui produit beaucoup de fruits dans leur cœur. Ne pas être enfermés sur soi-même et vivre dans une bulle, être à l’écoute de l’autre surtout ceux qui sont différents. Nous visons dans un quartier pauvre et nos enfants se rendent compte que des gens souffrent et ont besoin de réponses à leurs souffrances. C’est quelque que chose de vécu dans le concret et non à travers l’écran.
Pour nos enfants, la mission c’est aussi le fait de savoir que Dieu est très présent dans notre vie de manière simple. Il fait partie de notre vie missionnaire. Dieu n’est pas un concept.
Puis la mission permet aussi de vivre la foi de manière concrète. Notre foi est aussi appliquée dans les actes et non pas juste dans des paroles. Je trouve que ça porte beaucoup de fruits dans le cœur des enfants. Ils sont très heureux de voir leurs parents missionnaires. Ils en parlent à leurs copains à l’école. C’est une foi cohérente avec les œuvres.
J’aimerais arriver à la fin de ma vie en ayant cette impression que tout ce que j’ai vécu était le bon combat.
Pour les adultes, il y en a beaucoup de bienfaits aussi mais je retiens surtout trois choses. Pour nous de manière personnelle, c’est un privilège de vivre en intimité unique avec le Christ et son Église. La mission permet d’avoir une intimité avec le Christ et son Église. On se sent comme les premiers apôtres, même si on est loin de ça.
C’est aussi un privilège d’être témoins de miracles que le Seigneur réalise aujourd’hui dans la vie des gens. Parfois, on raconte les histoires de miracle, on les lit dans les livres, mais le fait d’être missionnaire permet de les comprendre vraiment, d’en être témoins. Le fait de voir des personnes rencontrer le Christ qui peut changer leur vie, c'est un privilège. Nous sommes témoins oculaires de ces conversions.
Nous avons le sentiment de travailler pour le Ciel. On ne travaille pas pour des chiffres ou pour de l’argent mais pour le Royaume de Dieu. Ainsi, on sait qu’on vit dans l’essentiel, du moins c’est ainsi pour nous.
Votre mission vous aide-t-elle dans votre rôle de mère et d’épouse ?
Oui bien sûr. Dans Misericordia, l’un des aspects de notre charisme est de contempler le Christ présent dans l’Eucharistie et le contempler dans les pauvres que nous servons. Le fait de vivre ça au quotidien m’aide à rechercher le Christ présent dans mon mari et surtout dans mes enfants. Malgré parfois leurs caprices, leurs difficultés à obéir, leurs bagarres etc., j’essaie toujours de chercher le Christ qui est présent en eux, et ça, ça change tout! C’est vraiment quelque chose que j’ai reçu de la mission.
Comment vous ressourcez-vous spirituellement ?
La prière est mon combustible quotidien, tout comme la messe et l’adoration. C’est un soutien particulier, un roc pour notre famille. Si on n’avait pas ça, ça serait impossible de vivre ce que nous vivons aujourd’hui. La vie des saints me nourrit aussi beaucoup. J’apprécie surtout le livre Je veux voir Dieu du père Marie-Eugène de l'Enfant-Jésus. Je me ressource aussi grâce aux retraites. J’essaie de partir en retraite seule au moins une fois par semestre. C’est important !
Pour finir, une citation qui vous inspire ?
"J'ai mené le bon combat, j'ai achevé ma course, j'ai gardé la foi" (2 Tm. 4, 7). J’aimerais arriver à la fin de ma vie en ayant cette impression que tout ce que j’ai vécu était le bon combat. C’est-à-dire que ma vie était donnée jusqu’au bout pour l’amour de Dieu et pour l’amour des pauvres et que j’y suis arrivée à la fin de ma vie avec une foi ardente, un amour brûlant et une confiance sans limite en Jésus et dans sa Miséricorde.
Pratique