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Odile Haumonté : “La tendresse, ce baume parfumé sur les blessures du monde”

Odile Haumonté, auteur de "Éloge spirituel de la tendresse" (Artège).

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Mathilde de Robien - publié le 09/06/23 - mis à jour le 09/08/23
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Odile Haumonté est l’auteur d’une soixantaine de livres de spiritualité, mais également éditrice jeunesse aux Éditions Pierre Téqui et rédactrice en chef du magazine Patapon. Elle confie à Aleteia sa relation à Dieu, aux saints, et aux siens.

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Auteur prolifique, Odile Haumonté s’intéresse à de nombreux sujets : les saints, les anges, la Bible et tout dernièrement, la tendresse. Elle vient de publier chez Artège un Éloge spirituel de la tendresse, ouvrage dans lequel elle invite, à l’instar du Pape François, à une révolution de la tendresse. Originaire de Nancy, mère de cinq enfants âgés de 23 à 32 ans et jeune grand-mère de deux petits-enfants, elle livre à Aleteia un peu de son quotidien, entre un travail intense, une vie intérieure profonde et cette tendresse qu’elle s’applique à donner à ceux qui l'entourent.

Aleteia : Vous êtes l’auteur d’une soixantaine de livres, allant d’essais de spiritualité aux vies de saints en passant par des romans jeunesse, qu’est-ce qui vous pousse à écrire autant ?
Odile Haumonté : J’ai commencé à écrire très tôt. Jeune, j’étais très timide jusqu’au lycée, presque muette ! Alors je me suis rapidement exprimée par écrit. Je lisais beaucoup et j’ai eu assez vite envie de raconter des histoires. Plus tard, quand j’ai eu des enfants, c’est l’envie de transmettre la foi qui m’a motivée, notamment à travers la vie des saints. Et puis un jour, une éditrice des Éditions des Béatitudes m’a dit : "Tu ne peux pas toujours te cacher derrière les saints ! Un jour, il faudra que tu parles de ta propre foi !" C’est ainsi que sont venus tous les livres de spiritualité qui ont suivi. J’aime alterner ces genres différents qui se nourrissent mutuellement : les vies des saints nourrissent mes réflexions spirituelles, qui elles-mêmes enrichissent mes romans jeunesse.

Vous avez à cœur de transmettre la foi, comment l’avez-vous reçue vous-même ?
J’ai eu la chance de naître dans une famille croyante, mes grands-parents, surtout, étaient très pratiquants. Je suis allée dans une école catholique tenue par des sœurs dominicaines, à Nancy. Leur témoignage, comme religieuses joyeuses et proches des enfants, m’a profondément marquée. Quand j’étais adolescente, mes parents sont revenus à la pratique religieuse et nous avons vécu notre foi en famille. Ma foi a permis aussi que je rencontre mon mari, lors d’un rassemblement à Taizé. Et puis elle s’est affermie. En couple, nous nous sommes engagés au sein du diocèse et de notre paroisse dans l’aumônerie, l’animation liturgique et dans la préparation au mariage.

Vos livres permettent de se ressourcer en nous faisant plonger dans la Bible ou dans la vie des saints, mais vous, comment vous ressourcez-vous spirituellement ?
D’abord par la pratique, en allant à la messe, en recevant les sacrements, en faisant des retraites régulières, et puis par la prière. La prière personnelle et la prière conjugale. Avec mon mari, nous essayons de prier les Laudes tous les matins, c’est parfois difficile la semaine mais nous essayons de nous y tenir. Autre source de ressourcement, énormément de lectures ! En tant qu’éditrice jeunesse, je suis dans les livres chrétiens toute la journée ! C’est un ressourcement permanent. Je découvre des livres que je n’aurais pas forcément choisis moi-même en librairie, cela donne une ouverture d’esprit.

Vous évoquiez la prière personnelle, comment priez-vous ?
J’aime beaucoup la prière du chapelet. J’habite à la limite entre la ville et la campagne, je peux aller me promener facilement et me retrouver dans les champs, au milieu de la nature. Et là, je contemple, en méditant ou en priant le chapelet. Pour moi, la contemplation de Dieu à travers sa création est très importante, je ne pourrais pas m’en passer ! Et puis j’essaie de faire oraison tous les jours, quinze minutes. Avant j’avais le temps de prier une heure, mais avec un agenda très bousculé, je vise un quart d’heure, je sais que j’en ai vraiment besoin. Mon mari et moi nous sommes formés à l’oraison carmélitaine. Ce sont les textes de sainte Thérèse de Lisieux et de sainte Thérèse d’Avila qui m’ont véritablement permis de plonger dans l’oraison. Avec la première, c’est un délassement, une récompense, avec la seconde, c’est sûr que c’est plus ardu !

Vous avez beaucoup écrit sur les saints. Quelle place ont-ils dans votre quotidien ?
Ils ont une place énorme ! Je fais bien attention à ce qu’ils ne prennent pas la place de Jésus, à ce qu’ils restent à leur place de témoins. Pour moi ce sont vraiment des témoins car j’ai l’impression qu’ils ont vécu tout ce que nous vivons nous-mêmes. Il est certain que j’ai davantage de prédilection pour les saintes mères de famille que pour les ermites par exemple ! J’aime les saints qui ont laissé des écrits, cela permet de mieux les connaître, de mieux les rencontrer.

J’aime regarder comment les saints ont vécu, toujours main dans la main avec Jésus.

Les saints prennent plus ou moins de place selon les périodes de ma vie. Si depuis toute petite saint Joseph et sainte Thérèse de Lisieux ont été comme deux phares qui m’ont toujours accompagnée, d’autres sont venus quand j’avais besoin d’eux puis sont repartis. Quand j’ai connu des moments d’aridité, je me suis tournée vers les saints qui ont vécu la même chose. Lorsque j’ai eu des enfants, j’ai davantage prié des saintes qui avaient été mères de famille. Mais ils demeurent tous des témoins, et j’aime regarder comment ils ont vécu, de quelle manière ils ont traversé les difficultés, toujours main dans la main avec Jésus.

Avez-vous une sainte mère de famille préférée ?
J’aime beaucoup Zélie Martin. Toute sa correspondance, on aurait pu l’écrire aujourd’hui ! Quand elle raconte qu’elle a une commande urgente de dentelles, mais qu’elle a passé sa soirée à jouer avec ses enfants qui avaient reçu des nouveaux jouets et donc une partie de la nuit à travailler, c’est d’une incroyable actualité ! Elle a vécu la vie active des femmes d’aujourd’hui, tout en ayant une vie de foi profonde et une vie familiale où elle voulait être présente à ses filles.

Daphrose Rugamba me touche beaucoup aussi. Ce couple de rwandais montre que la sainteté n’est pas la perfection. Ce n’est pas un couple parfait, ils ont des problèmes de couple, mais la grâce de Dieu passe finalement dans ces imperfections. C’est très rassurant ! La sainteté est au bout du chemin, il ne s’agit pas de chercher la perfection mais de dialoguer, de prier ensemble. Je pense que le ciment du couple, c’est la prière conjugale.

Dans votre dernier ouvrage, vous faites l’éloge de la tendresse, pourquoi est-elle si importante ?
Ce qui me bouleverse dans la tendresse, c’est sa gratuité. Il y a une gratuité dans la tendresse. Elle est ce débordement, ce surcroît d’amour que l’on donne alors même qu’on a fait le nécessaire. On le voit bien dans la tendresse d’une mère à l’égard de son enfant : elle en prend soin, l’habille, le nourrit, mais la tendresse va au-delà du nécessaire, elle est ce superflu d’amour. Elle est illustrée dans l’Évangile de Marc lorsque Jésus demande de laisser venir à lui les enfants. Les disciples les rabrouent mais Jésus les rappelle : il les embrasse et il les bénit (cf Mc 10, 16). Il aurait pu se contenter de les mettre au milieu des apôtres mais non, il a ce débordement du cœur, qui touche la personne, tel un baume parfumé sur les blessures du monde.

Soyons des anti-distance, des anti-froideur, des anti-indifférence !

Il en va du monde de demain. Car il sera ce que nous en faisons dès maintenant. Si nous le décidons, si nous y travaillons, il sera joyeux, fraternel, douillet. Préparons la révolution de la tendresse : soyons des anti-distance, des anti-froideur, des anti-indifférence !

Tout être humain aspire à la tendresse, mais s’il est aisé de manifester de la tendresse à des petits enfants, comment faire avec des enfants adolescents ou adultes ?
Quand les enfants grandissent, la mère, elle, ne change pas. Elle a toujours autant envie de câliner, de prendre dans les bras… Mais l’enfant a changé et n’a plus les mêmes attentes. Il faut alors accepter de lâcher l’enfant et laisser la tendresse s’exprimer autrement. Lorsqu’ils sont adolescents, je crois beaucoup à l’écoute, à l’accueil de ce qu’ils ont à nous dire, sans les étouffer de conseils, de recommandations, de nos peurs… Oui, une écoute joyeuse, accueillante, bienveillante. Ce n’est pas facile car il arrive que l’enfant prenne une autre route que celle espérée. Mais je pense que la bienveillance est le premier pas de la tendresse.

Pratique

Éloge spirituel de la tendresse, Odile Haumonté, Artège, mai 2023, 9,90 euros.
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