1Ukraine : la réaction de la Russie illustre la logique du "silence" papal
Dans son interview accordée au magazine jésuite America, le pape François s'est défendu contre les accusations de silence excessif à l'égard de la Russie. Certains observateurs pensent que, tout comme le pape Pie XII est parfois critiqué aujourd'hui pour son "silence" pendant l'Holocauste, le pape François pourrait un jour faire l'objet d'un jugement historique négatif pour sa discrétion à l'égard de Moscou. Mais les propos du pape François sur les exactions commises par les troupes de la Fédération de Russie dans le cadre de leur offensive en Ukraine ont suscité une telle colère de Moscou qu’ils donnent un autre éclairage sur le sens de sa parole plutôt nuancée et prudente jusqu’à présent. "En règle générale, les plus cruels, peut-être, sont ceux qui viennent de Russie, mais n'adhèrent pas à la tradition russe, comme les Tchétchènes, les Bouriates et ainsi de suite", a déclaré le Pape, faisant référence à deux minorités ethniques qui fournissent souvent des troupes de première ligne dans les conflits en Russie. Les Tchétchènes, originaires du sud-ouest de la Russie, sont majoritairement musulmans. Les Bouriates, quant à eux, sont un groupe ethnique mongol originaire de Sibérie orientale, qui suit traditionnellement des croyances bouddhistes et chamaniques.
"Il est fort possible que François ait voulu faire ce commentaire comme une ouverture indirecte à Moscou, une façon de dire que les Russes eux-mêmes ne sont peut-être pas aussi sanguinaires qu'on le dit", relève Crux, tout en remarquant que le résultat obtenu a été exactement l’inverse. La porte-parole du ministère russe des affaires étrangères, Maria Zakharova, a en effet dénoncé dans les mots du Pape une "perversion de la vérité", accusant l'évêque de Rome de vouloir diviser les forces russes : "Nous formons une seule famille avec les Bouriates, les Tchétchènes et les autres représentants de notre pays multinational et multiconfessionnel", a-t-elle écrit sur Telegram. Plusieurs dirigeants politiques et religieux de ces régions ont également condamné les propos du pape.
Par ailleurs, l'organisation pontificale Aide à l'Église en Détresse a signalé l'arrestation de deux prêtres catholiques dans la ville portuaire de Berdiansk, occupée par les Russes, dans le sud-est de l'Ukraine. Un journal italien a déjà suggéré qu'il s'agissait d'une forme de "chantage pour forcer François au silence". Cette situation risque de contraindre le pape à revenir sur le rapprochement avec l’Ukraine manifesté ces derniers jours.
2Des questions posées au Concile Vatican II sur le célibat des prêtres
L’enseignant en religion Gilberto Borghi pose des questions au décret du Concile Vatican II sur le sacerdoce, Presbyterorum Ordinis, qui traite de l’obligation du célibat des prêtres dans l'Église latine. Il souligne notamment que le texte admet que la décision de l'Église ne découle pas de la manière dont le Christ a constitué le sacrement de l'Ordre, mais de son propre choix, “qui en soi n'est pas divinement contraignant et peut donc également être révoqué”. Pour se justifier, le décret explique qu'avec le célibat la mission du prêtre atteint une perfection potentielle. Or, soulève Gilberto Borghi, si tel est le cas, "il est difficile de se défaire de l'idée que les prêtres mariés [de l’Église orientale ou d’origine anglicane] sont de seconde zone".
Celui qui est aussi psycho-pédagogue estime également que si le célibat doit être librement embrassé par le prêtre, cela serait plus logique qu’il soit rendu facultatif, plutôt qu'obligatoire pour avoir vraiment le choix en-dehors "d’une règle extérieure". Enfin, le même texte du Concile affirme "la supériorité de la virginité consacrée au Christ". Or saint Jean Paul II, note Gilberto Borghi, est allé à l’encontre de cette affirmation lors de l'audience du 14 avril 1982, où il a déclaré que "dans les paroles du Christ sur la continence pour le Royaume des Cieux, il n'est pas question de l'infériorité du mariage". Les paroles du Nouveau Testament "ne fournissent aucune raison de soutenir l'infériorité du mariage ou la "supériorité" de la virginité ou du célibat", a dit le pape polonais.
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