Comme il en a pris l’habitude depuis le début de son pontificat, le pape François a répondu aux questions des journalistes qui l’accompagnaient durant son voyage à Bahreïn. Dans l’avion du retour pour Rome, ne pouvant pas rester debout à cause de son genou, c’est depuis son fauteuil roulant qu’il a accordé cette conférence de presse devenue une tradition attendue. Liban, migrants, droits des femmes, Ukraine… Le pontife argentin s’est exprimé pendant une cinquantaine de minutes avec une certaine capacité à éluder quelques questions sensibles, comme celle sur les abus et la transparence de la justice canonique.
Mais alors que la conférence allait toucher à sa fin, une dernière question a semblé particulièrement revigorer le pontife de 85 ans : la crise de l’Église catholique en Allemagne qui, comme l’a rappelé le journaliste allemand dans sa question, perd chaque année 300.000 fidèles.
"Il faut partir de la rencontre avec Jésus-Christ"
Entrée en 2019 dans un synode à la suite de nombreuses révélations d’abus sexuels commis en son sein, cette Église fait aujourd’hui figure de trublion dans le catholicisme mondial, avançant des positions réformistes radicales, comme l’ordination des femmes, le mariage des prêtres et ou une nouvelle approche doctrinale de l’homosexualité. Sans mentionner directement ce synode et ses propositions, le pape François a réaffirmé que l’Allemagne possédait déjà "une grande et belle Église protestante" et qu’il "n’en voudrai[t] pas une autre". Et d’insister : "Je la veux catholique !".
S’il n’y a pas la rencontre avec Jésus-Christ, il y aura un moralisme vêtu de christianisme.
Semblant vouloir remettre les pendules à l’heure, le chef de l’Église catholique a assuré que la racine de la religion" était "la gifle que te donne l’Évangile". Il s’est désolé des "discussions moralisantes" et "politico-ecclésiastiques" qui sont loin du "saint peuple fidèle de Dieu". "Allez-y et cherchez comment il écoute", a alors encouragé le pape, désireux de voir les catholiques emplis de "courage apostolique" et capables de se rendre aux périphéries. Pour cela, "il faut partir de la rencontre avec Jésus-Christ", a-t-il insisté. Et le pape d’avertir : "S’il n’y a pas la rencontre avec Jésus-Christ, il y aura un moralisme vêtu de christianisme".
En juin dernier déjà, le pape François avait sévèrement critiqué le chemin synodal allemand dans un entretien aux revues jésuites. Il avait considéré que le problème outre-Rhin pouvait venir du fait que la voie synodale était pilotée par des élites intellectuelles et théologiques influencées par des pressions extérieures. Cet été, le Saint-Siège a aussi vertement recadré le processus allemand en le mettant en garde dans une note contre le risque de provoquer "une blessure pour la communion ecclésiale et une menace pour l’unité de l’Église".