Comment repérer parmi le flux des pensées anodines ou toxiques qui traversent l’esprit les inspirations venant vraiment de l’Esprit saint ? Voici la méthode de saint François de Sales en quatre exercices.
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Pourquoi est-il si difficile de prendre au sérieux ce conseil de saint Paul : "Laissez-vous mener par l’Esprit" (Ga, 5,16) ? En effet certains considèrent qu’une vie guidée par l’Esprit saint n’est réservée qu’à une élite pratiquant un sport extrême, d’autres s’imaginent tout de suite un style "catho baba cool" en marge de toute vie "normale". Pourtant, pour saint François de Sales, célébré ce 24 janvier, il ne s’agit ni d’un luxe ni d’une extravagance, mais d’un fondement essentiel de toute vie chrétienne. Dans l’Introduction à la vie dévote, le religieux recommande de se rendre attentif aux "inspirations intérieures", c’est-à-dire à "tous les attraits, les mouvements, les sentiments de contrition, les lumières, les connaissances que Dieu fait connaître en nous."
Cependant, comme l’explique le père Joël Guibert dans son livreLe secret de la sérénité, la confiance en Dieu avec saint François de Sales(Artège), ces inspirations soufflées par l’Esprit sont d’une extrême délicatesse, "elles ne s’imposent jamais de force à la liberté humaine". Elles sont si subtiles qu’elles peuvent passer tout simplement inaperçues. "La personne qui ne cultivera pas un certain silence dans sa vie, pourra difficilement entendre la voix de l’Esprit", explique-t-il.
Seulement – une fois l’oreille intérieure attentive et la prière centrée sur l’essentiel –comment discerner cette voix subtile et discrète de l’Esprit de sa propre petite voix intérieure ? Comment repérer dans le flux des pensées qui traversent l’esprit les inspirations venant de l’Esprit ? Voici la méthode de saint François de Sales en quatre exercices.
1Repousser les pensées toxiques
Afin de se mettre à l’écoute des suggestions de l’Esprit, saint François de Sales conseille de repérer systématiquement toutes les pensées toxiques, comme celles liées à l’amertume, à la colère, à la jalousie ou encore à la vengeance… Dès qu’une telle pensée est identifiée, elle doit être immédiatement repoussée :
Une astuce qui peut aider à mieux repérer ces "mauvaises pensées" ? À la différence des inspirations de l’Esprit, les pensées toxiques font beaucoup plus de bruit et créent un certain trouble intérieur.
Qui n’a pas un jour ruminé jusqu’à l’obsession autour d'un souci du quotidien ? Qui n’a pas cultivé par anticipation le scénario noir d’un entretien ou d’une rencontre qui suscite l’inquiétude ? On peut avoir l’impression que ces pensées sont anodines et sans importance, mais en réalité elles peuvent finir par créer un mur intérieur tel que l’Esprit saint n’arrivera pas à le briser. Pourquoi ? "Plus le souci nous submerge, plus nous cherchons par nous-mêmes et avec tension une solution pour le maîtriser", analyse le père Joël Guibert pour qui le piège est justement là : "nous sortons peu à peu de la confiance en la puissance de l’Esprit à notre égard en tenant à se débrouiller tout seuls". Saint François de Sales le précise bien dans une lettre à une amie :
Pour lui il y a une seule voie : pratiquer la "prière du cœur". À chaque moment de trouble, elle consiste à répéter avec foi : "Seigneur Jésus-Christ, Fils de Dieu, aie pitié de moi pécheur !" Appelée aussi "prière de Jésus", elle vise à rendre présent le Christ dans le cœur de celui qui prie.
L’Esprit saint agit dans la mesure de la confiance accordée en son action. Les guérisons relatées dans l’Evangile l’illustrent très bien. En conséquence, le couper-court aux pensées toxiques "ne relève pas seulement de la vertu ou de l’ascèse, il relève de la foi en l’influence réelle de Dieu à notre endroit", explique dans son livre Joël Guibert. Avoir la foi c’est donc faire le choix de se décharger du souci qui submerge l’esprit et de le confier à Dieu. En stoppant ainsi cette "mauvaise pensée", on laisse l’Esprit saint à l’œuvre, qui prend alors les choses en charge. C’est ce que François de Sales explique dans une lettre à sainte Jeanne de Chantal :
Entre le flot de pensées trop tapageuses et les inspirations subtiles de l’Esprit, cet exercice de discerner demande une certaine discipline intérieure. Pourtant, il ne s’agit surtout pas de tomber dans certain perfectionnisme. Saint François de Sales l’explique très bien en donnant ce conseil précieux à une connaissance visiblement impliquée dans les œuvres de charité :
Pour le religieux, il y a une seule règle d’or : l’amour. Il faut rejeter les pensées toxiques par amour pour Dieu. Ce qui compte dans cet exercice, ce n’est pas le nombre de petites victoires, mais une attitude humble et un profond désir d’avancer sur cette voie, pour se laisser de plus en plus guider dans sa vie par l’Esprit saint.