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Après les JO d’été de 2008, la Chine reçoit les JO d’hiver de 2022. Mais quatorze ans plus tard, l’ambiance est totalement différente. En 2008, George Bush et Nicolas Sarkozy étaient présents à la cérémonie d’ouverture, orchestrée en grande pompe par Hu Jintao. À travers ces JO, le monde occidental accueillait la Chine dans le cénacle mondial et se réjouissait de son développement et de sa grandeur naissante. En 2008, cela faisait sept ans que la Chine avait intégré l’OMC. Atelier du monde, elle convergeait vers l’Occident, et les États-Unis la voyaient comme un partenaire essentiel. Il y avait certes des frictions et des mésententes, mais cela n’était, pensait-on, que soubresaut vers l’alignement.
Boycott, arme politique
La situation n’est plus du tout la même en 2022. Certes, ni les États-Unis ni le Royaume-Uni n’ont été jusqu’à organiser un boycott total, comme en 1980 lors des JO de Moscou. Si les hommes politiques seront absents de la cérémonie d’ouverture, les athlètes seront bien là. Ils pourront en découdre avec les Chinois et mener dans le sport la bataille des corps et des médailles, comme supplétif à la bataille armée. La Chine excellant davantage dans les sports d’été que dans ceux d’hiver, la victoire finale des États-Unis est tout à fait possible.
Le souci humanitaire et la posture politique trouvent une limite dans les exportations et les dépendances économiques.
Une nouvelle guerre froide donc, qui semble reprendre les codes de l’ancienne. Joe Biden a justifié son refus de participer à la cérémonie d’ouverture par le sort réservé aux Ouïgours du Xinjiang. Les pays anglo-saxons, Royaume-Uni et Australie en tête, ont suivi, comme pour manifester la réalité du partenariat de l’Aukus qui se réalise dans les stratégies industrielles et dans le sport. L’Autriche en revanche a refusé ce boycott. Il est vrai qu’elle excelle dans les sports d’hiver. La donne économique est aussi différente. En 1980, peu de pays d’Europe de l’Ouest dépendaient de l’URSS. En 2022, le lien économique avec la Chine est intense. Le souci humanitaire et la posture politique trouvent une limite dans les exportations et les dépendances économiques.
Nouvelle carte du monde
Vladimir Poutine sera présent à Pékin pour l’inauguration. Ainsi que le président du Kazakhstan, qui vient d’échapper à un coup d’État et qui est parvenu à stabiliser son pays. Si l’Occident se refuse à la Chine, l’Eurasie est bien là et réaffirme ses liens avec l’Asie. Alors que les États-Unis tentent de recréer un containement maritime, comme pour encercler la Chine en passant par la mer ; la Russie, puissance continentale, témoigne de sa proximité avec la Chine et réactive le lien terrestre. Deux blocs sont donc en train de se constituer : le bloc maritime autour des États-Unis et le bloc terrestre autour de Moscou et de Pékin. Et comme à l’époque de la Guerre froide, figurent des non-alignés. S’ils sont plutôt sur la ligne des États-Unis, la France et les autres pays d’Europe de l’Ouest tentent de ménager le chou chinois et de ne pas heurter sa sensibilité.
Revoilà donc les JO rendosser le maillot de la politique. Il en a toujours été ainsi. Parce que c’est un événement mondial, qui rassemble des millions de téléspectateurs, parce que les athlètes sont adulés et reconnus, et qu’ils sont des modèles pour de nombreux jeunes, les Jeux olympiques ont toujours eu une dimension politique. Cette année, il n’y aura pas de trêve olympique. Même si la guerre est froide, le bras de fer se poursuit. De même qu’il n’y aura pas de trêve pour les contrats et les sponsors. Certes les États-Unis boudent la cérémonie d’ouverture, mais les marques américaines seront bien présentes dans le marché publicitaire. Difficile de se passer de la manne de ces millions de téléspectateurs. Mais c’est aussi parce qu’ils sont très regardés et suivis que les JO cristallisent cette opposition politique. Une opposition qui relève davantage de la posture et de la communication internationale, comme pour dire au reste du monde que les États-Unis sont bien là, qu’ils ont des ennemis et que les autres doivent choisir leur camp.