Vous ne parvenez pas à donner à vos enfants le goût et l’amour de la lecture ? Suivez ces quelques conseils et vos petites têtes blondes prendront plaisir à se plonger dans les livres.
Pour qu’Aleteia poursuive sa mission, faites un don déductible à 66% de votre impôt sur le revenu. Ainsi l’avenir d’Aleteia deviendra aussi la vôtre.
*don déductible de l’impôt sur le revenu
Si les plus petits portent aux livres un amour unanime, les choses se compliquent à l’heure de l’apprentissage de la lecture. Or, c’est à ce stade que tout se joue. Par ailleurs, nos enfants ne savent plus à quel livre se vouer : la littérature pour enfants s’est énormément diversifiée ces dernières années. Entre les dévoreurs et les allergiques, à nous, parents, d’être des guides avertis. La lecture est bien plus qu’un loisir, c’est une incomparable école de vie !
Qui a lu petit, lira grand
Rappelez-vous : le titre de cet album qui vous a tant marqué enfant, le craquement de votre livre préféré lorsque vous l’ouvriez « à la bonne page »… Quel adulte ne garde, dans un coin de mémoire, le souvenir ému de lectures enfantines ? Le livre est bien plus qu’un objet de papier. « C’est un ensemble d’idées, d’émotions, de sentiments, quelque chose qui a bouleversé notre vie et nous a aidé à grandir », précise Hélène Montardre, chercheur spécialiste de la littérature de jeunesse, et auteur de Mais que lisent-ils ?. Ces « Comtesse de Ségur » ou « Signe de Piste » qui ont bercé nos jeunes années sont riches d’une puissante charge affective. Quoi de plus naturel alors que d’ouvrir notre progéniture, le moment venu, à ce monde qui nous a tant marqués ? Le livre est un extraordinaire passeport pour l’évasion que tout parent souhaite remettre à son enfant.
L’entreprise n’est pas de tout repos, à une époque où notre bonne vieille bibliothèque est dangereusement chahutée par la télévision, les jeux vidéo et autres insolents. A l’heure des écrans triomphants, pas facile de convaincre nos petites têtes blondes de s’asseoir avec un livre. « J’ai un mal fou à déloger mon fils des émissions du mercredi », se plaint Isabelle, qui reconnaît : « C’est tellement plus tentant d’appuyer sur le bouton que de prendre un roman ». Séduisante facilité qui ramollit le sens de l’effort ! Toutefois, gardons-nous de diaboliser les nouvelles technologies. Elles ont un rôle éducatif indiscutable, et font partie du quotidien de nos jeunes. Médias et lecture se complètent, même si le livre a une valeur irremplaçable : il permet la réflexion, il développe la créativité et l’initiative.
Bien plus, qui a goûté aux joies de la lecture au berceau, aura plus de chances d’être passionné par les livres. « Axelle a 2 mois… et déjà de petits albums en tissu dans son lit ! confie Corinne, mère de quatre enfants. Le livre est un merveilleux moyen d’éveiller les tout-petits. » « Je conseille aux parents de montrer des ouvrages à leurs enfants le plus tôt possible, dès 8 ou 9 mois, prévient-elle. C’est si important de faire découvrir le plaisir du livre avant la lecture ! En manipulant l’objet, en le tripotant, en se l’appropriant, le tout-petit éprouve des émotions et s’imprègne de sensations nouvelles. N’oublions pas que l’enfant est une éponge qui absorbe tout ce que lui donne l’adulte ! », conseille une directrice de médiathèque.
Des moments de complicité inoubliables
Mais l’intérêt de l’objet ne s’arrête pas là. Regarder un album est l’occasion pour tout enfant d’ouvrir une parenthèse tendre et complice avec l’adulte. « Voyez le petit juché sur les genoux de sa mère pour écouter l’histoire qu’elle va lui raconter : dans ses bras rassurants, il va entrer dans le mystère de la lecture », explique Marie-Brigitte Lemaire, psychopédagogue dont la méthode pédagogique « Jean Qui Rit » fait merveille depuis des années auprès des apprentis lecteurs. Cette ancienne institutrice a l’énergie et l’enthousiasme contagieux des passionnés. Elle insiste : « Le rôle des parents est essentiel pour éveiller l’enfant à la lecture : il va s’imprégner des paroles lues par sa mère et découvrir le sens du beau par ses yeux. Les couleurs de l’illustration, le message de l’histoire, et la manière de la lire, vont l’ouvrir à la beauté ».
A nous, parents, de prendre à cœur l’éveil littéraire de notre progéniture. A chacun sa méthode et son rythme, le tout est d’y croire et d’y consacrer du temps. « Regarde Marlaguette, elle a apprivoisé le loup et se promène avec lui dans la forêt ! » Votre enfant suit des yeux l’image que vous lui montrez et vous écoute. Pas de doute : ces mystérieux signes noirs ont un lien direct avec les mots qui sortent de votre bouche. Bien plus : le moment de la lecture vous isole tous deux dans une bulle où il se sent bien. « Dans la mémoire de votre enfant, ces moments de complicité seront pour toujours associés à la tendresse », promet Hélène Montardre.
Lire aussi :
Les 50 livres à lire tant qu’on est vivant (1/3)
Laissons se mettre en place le cérémonial de l’histoire, bien souvent réservé au soir. « Les enfants se brossent les dents, on fait la prière en famille, puis tout le monde s’installe autour du livre », raconte Anne, dont le joyeux trio a ainsi le temps de se calmer avant la nuit. Chez Sophie et Xavier, pas question de manquer le rituel : Antoinette a 3 ans et vibre pour ces personnages, qu’elle retrouve chaque soir avec le même plaisir. Pas question non plus de changer un mot au récit – notre cerbère veille et rappelle à l’ordre régulièrement le parent distrait ou pressé : « Tu as oublié un mot, Maman ! » Car le petit entend et mémorise chaque mot, se l’approprie. Apprivoiser le langage écrit lui fait entrevoir l’immensité des possibilités qu’il offre. « L’enfant sent instinctivement que ce second langage est plus élaboré que le premier », explique Hélène Montardre. Séduit par la magie du récit, il va se prendre au jeu et assimiler la plus indigeste syntaxe le plus naturellement du monde !
Ensorcelantes sonorités !
Quel enfant reste insensible à la musique des mots ? Qu’importe parfois le sens, si votre petit semble envoûté par ces phrases qui s’enchaînent comme une mélodie : « Il était une fois un roi qui régnait sur un pays prospère et verdoyant… » Comme les comptines et les contes oraux, le livre participe à la passionnante découverte de la langue. « Pimpanicaille, roi des papillons, en s’faisant la barbe, s’est coupé l’menton ! », articule Louise avec gourmandise, visiblement charmée par ces sonorités, qu’elle répète sans faute du haut de ses 2 ans.
Familiarisé avec l’écrit et bercé par toutes ces histoires entendues, l’enfant va grandir, enrichi d’un vrai patrimoine. Ces personnages et ces paysages, il les connaît par cœur, ce sont les siens, et c’est un peu lui-même qui vit les aventures de ses héros. « Robert la colère » et ses rages mémorables, c’est un peu Antoinette ! Le jeune héros retrouve sa joie de vivre à la fin de l’histoire et tout rentre dans l’ordre. « J’ai souvent ce livre à portée de main quand je sens ma minette s’échauffer ! », avoue Sophie dans un sourire. Ogres terrifiants ou séduisantes princesses, bons ou méchants, marâtres ou fées bienfaisantes, les personnages rencontrés permettent à l’enfant de s’identifier, de régler ses conflits et d’exorciser ses frayeurs : le livre a une valeur psychologique indéniable. Quelle délicieuse angoisse de suivre le Petit Chaperon Rouge dans le grand bois, à la merci du loup… Le conte fait partie de ces récits qui font grandir : ces foules de personnages et d’animaux mis en scène parlent à l’enfant de lui-même, de ses sentiments et de ses émotions, mais aussi des grands événements de l’existence. Ils vont l’aider à maîtriser la réalité et à envisager l’avenir… En deux mots, à devenir grand !
“Familiarisé avec l’écrit et bercé par toutes ces histoires entendues, l’enfant va grandir, enrichi d’un vrai patrimoine.”
« Les contes débutent là où se trouve en réalité l’enfant dans son être psychologique et affectif », développe Bruno Bettelheim son ouvrage Psychanalyse des contes de fées. Qu’il se sente Vilain Petit Canard de la couvée ou vulnérable comme le Petit Poucet, l’enfant apprendra que rien n’est inéluctable et que tout peut évoluer pour peu que l’on s’en donne la peine. Les personnages rencontrés au fil des contes symbolisent des sentiments ou des situations qu’il connaît : peur, mort, courage ou abandon, les formidables aventures de ses héros lui apprennent beaucoup sur lui-même ! N’oublions pas qu’un conte finit toujours bien : une belle école de confiance en soi !
Il apprend à lire ? Continuez à lui lire des histoires
Arrive enfin l’année de CP, et l’heure de décoder ces fameux signes noirs devenus familiers au fil des lectures. Enseignante en grande section de maternelle, Marguerite initie les petits tout au long de l’année au décryptage des lettres. Et la jeune classe se prend gaiement au jeu : « Nous apprenons à reconnaître les mots de tous les jours : affiches, paquets de céréales ou menus de cantine, les enfants en redemandent ! » Aux parents de relayer l’enseignante à la maison : « La lecture doit être une joie et un plaisir pour l’enfant ! souligne, passionnée, Marie-Brigitte Lemaire. Proposons-lui des livres attrayants pour que lire ne soit pas une corvée rébarbative ».
Comment faire ? « Avant tout, continuer à lire des histoires à notre enfant, même s’il sait lire », insiste Hélène Montardre. Quelle tentation pourtant de laisser notre « grand » de primaire aux prises avec un bon livre, avec ce bon prétexte : « Tu n’es plus un bébé, lis tout seul maintenant ! » Combien d’enfants vont alors décrocher, découvrant, à ce stade délicat, que le livre n’est plus ce plaisir pur partagé avec l’adulte mais un objet d’apprentissage ?
Lire aussi :
Quels passages de la Bible lire aux enfants le soir ?
« L’année de son CP, se souvient Marie, ma fille me réclamait souvent des histoires le soir. Au début, cette exigence m’agaçait, je pensais que c’était du caprice… Mais j’ai compris qu’Alice avait peur de se lancer toute seule et qu’elle avait besoin de moi. Aujourd’hui, elle a 12 ans, et il m’arrive encore de lire un roman avec elle… pour le plaisir ! » La période de rodage va prendre quelques mois pour notre apprenti lecteur : sachons l’accompagner, le relayer au besoin, pour parer au découragement. Anne a trouvé la solution avec sa fille en CP : « C’est devenu un jeu entre nous : Alix lit une page et moi la suivante ».
Choisir un livre en famille et en faire la lecture pour tous, encore un moyen efficace pour stimuler un petit lecteur timoré. Le livre devient ainsi prétexte à des instants complices et de joyeux fous rires. On l’aura compris, tous les moyens sont bons, pourvu que l’enfant sente que nous sommes là et qu’il ne saute pas sans filet !
Fouiner ensemble dans les rayons de livres…
Aventure ou roman policier, histoire animalière ou conte traditionnel… l’apprenti lecteur a besoin de l’adulte pour se lancer dans la jungle. Sachons guider ses choix, et éveiller son sens critique. Attention par exemple à ces collections policières morbides, à ces ouvrages au style hasardeux, à ces albums au graphisme agressif : ils font plus de mal que de bien. Béatrice a toujours un œil sur les choix de sa fille : « Voulant comprendre le phénomène Harry Potter, j’ai demandé à Agathe de me prêter le premier tome, qu’elle venait de terminer… Je suis vite devenue aussi mordue qu’elle, et j’ai eu le plus grand mal à attendre qu’elle ait fini le deuxième pour le lui arracher ! », confie-t-elle en riant.
Echanger sur une lecture commune est un moment fort de dialogue et de complicité ; fouiner ensemble dans les rayons d’une librairie peut être un moment de fête. Corinne emmène régulièrement Blanche choisir un roman : « A 9 ans, elle a du mal à passer à des livres de son âge », s’amuse la jeune femme, qui observe : « Ce petit cadeau la stimule, quel plaisir d’ouvrir un livre neuf ! »
Revenant moins cher et tout aussi éducative, la bibliothèque est un incomparable lieu de mémoire : « Nos plus grands lecteurs sont… les petits ! », note avec humour Jacqueline Goachet-Marc, qui multiplie les initiatives pour attirer ce jeune public. L’espace-jeunes remporte un franc succès : « Les parents vont à la pêche aux livres avec leurs enfants, ils observent, comparent et choisissent ensemble. La lecture est souvent une affaire de famille ». Après cette expédition guidée au pays des livres, gageons que nos apprentis deviendront vite des lecteurs mordus, avec au cœur la conviction que la lecture rend libre !
Pascale Albier
Lire aussi :
« Non, la littérature jeunesse n’est plus un territoire protégé »