Jéroboam 1er n’est pas un inconnu lorsqu’il accède de force au trône et au pouvoir royal face à son rival Roboam, fils de Salomon. La Bible nous enseigne, en effet, que Jéroboam issu de la tribu d’Ephraim au nord du royaume d’Israël avait été précédemment reconnu "homme de grande valeur" par Salomon lui-même (1 Rs 11,40). Mais, les Saintes Écritures nous précisent également qu’avant qu’il ne devienne roi du royaume d’Israël du Nord, "Salomon chercha à faire mourir Jéroboam" Rs 11,40). Visiblement, cette reconnaissance avait fait naître chez Jéroboam bien des velléités de pouvoir qui le conduisirent à s’opposer au grand roi… Alors, poursuit le récit biblique, "Jéroboam se leva et s’enfuit en Égypte auprès de Shishaq, roi d’Égypte, et il vécut en Égypte jusqu’à la mort de Salomon". (1 Rs 11,40) Mais, le récit ne pouvait s’arrêter là, car cette personnalité à la fois brillante mais si ambitieuse méditait sa revanche dans le pays de pharaon dont il épousa la fille, revanche qui survint à la mort de Salomon…
Deux rois pour un royaume
Face à Roboam, légitime descendant de Salomon, Jéroboam opposa, en effet, la prophétie d’Ahiyya qui avait prédit qu’il règnerait sur dix tribus du nord, conformément à la volonté divine venant condamner les manquements de Salomon à la fin de son règne. Fort de cette prophétie et appui divin, Jéroboam enleva effectivement le pouvoir à Roboam qui n’eut alors d’autre choix que de s’enfuir vers le sud à Jérusalem, le monarque n’ayant plus que le soutien de la tribu de Juda et de Benjamin. Le royaume d’Israël se voyait ainsi divisé avec deux monarques pour un seul peuple élu, tel fut le triste résultat des nombreux manquements de Salomon aux injonctions divines.
Quel allait être l’avenir de ce nouveau roi Jéroboam, naguère exilé, aujourd’hui tout puissant et régnant sur dix tribus d’Israël et un vaste royaume ? Étrangement, rien de bon ne s’ensuivit, et une succession de mesures malencontreuses allait encore venir accentuer les divisions et les malheurs. Jéroboam n’arrivait pas à organiser, en effet, les cultes qui dépendaient de la ville de Jérusalem et de son Temple au sud et donc sous l’autorité de son rival Roboam. Le roi du nord décida alors de fonder de nouveaux lieux de culte avec notamment les sanctuaires de Béhel et de Dan où il aura recours à l’image du veau d’or alors encore très populaire ainsi que le rappelle le Livre des Rois dans la Bible (1 Rs 12,28-31) :
"Jéroboam fit fabriquer deux veaux en or, et il déclara au peuple : "Voilà trop longtemps que vous montez à Jérusalem ! Israël, voici tes dieux, qui t’ont fait monter du pays d’Égypte." Il plaça l’un des deux veaux à Béthel, l’autre à Dane, et ce fut un grand péché. Le peuple conduisit en procession celui qui allait à Dane. Jéroboam y établit un temple à la manière des lieux sacrés. Il institua des prêtres pris n’importe où, et qui n’étaient pas des descendants de Lévi".
Ce symbole païen hérité du polythéisme ne pouvait que violer manifestement l’interdiction posée par le Décalogue selon lequel aucun fidèle ne devait se prosterner devant des images et statues, et donc encourir la colère divine…
La colère divine
La sanction divine contre les agissements de Jéroboam n’allait, en effet, pas tarder ; elle survint lors d’un épisode resté célèbre et que nous relate la Bible : un envoyé de Dieu annonça au roi Jéroboam (1 Rs 13, 4-5) :
"Voici le signe montrant que le Seigneur a parlé : l’autel va se fendre et la cendre qui est dessus se répandra." Furieux, le roi ordonna d’arrêter l’individu en le désignant de la main à ses gardes, c’est alors, nous précise le récit biblique que "la main qu’il avait tendue contre l’homme sécha, et il ne pouvait plus la ramener à lui. L’autel se fendit, et la cendre se répandit de l’autel, conformément au signe qu’avait donné l’homme de Dieu par ordre du Seigneur".
La suite des évènements ne fera que confirmer cette déchéance de Jéroboam qui subira de nombreuses guerres lancées du sud par son rival le roi Roboam avant de mourir en 910…
Le legs de Jéroboam
L’impiété du monarque fut soulignée par le grand peintre et graveur Jacob Jordaens au XVIIe siècle. Sur un dessin conservé au musée des beaux-arts de Grenoble, l’artiste flamand a représenté le roi biblique connu pour son idolâtrie pour une série de tapisseries dont nous avons malheureusement perdu la trace. Sur ce dessin qui nous est cependant parvenu, on distingue le roi qui va subir le châtiment divin, sa main devenant "sèche" pour avoir enfreint les commandements de la Bible.
Le peintre français Jean-Honoré Fragonard livrera également au XVIIIe siècle une évocation éloquente des égarements de Jéroboam en le représentant sacrifier aux idoles avec faste, le veau d’or trônant au-dessus des vapeurs d’encens…
Enfin, de manière plus prosaïque, le nom de Jéroboam est parvenu jusqu’à nous sous la forme d’une bouteille de contenance imposante de 3 à 5 litres selon les régions, puisque cette forme et contenance de bouteille en a pris, en France, son nom en raison de la puissance légendaire de ce roi…