Le 24 décembre 2024, l’Église catholique universelle entrera dans une année sainte ordinaire. Tous les 25 ans, depuis le XVe siècle, vingt-six années jubilaires ont ainsi été célébrées. La dernière se déroula en 2000. On l’appela le Grand Jubilé parce qu’elle correspondait au bimillénaire de l’avènement de Jésus-Christ. Mais les papes ont aussi créé des années saintes extraordinaires, hors du rythme ordinaire des jubilés. Leur but : mobiliser l’attention des communautés chrétiennes sur des articles fondamentaux de la foi. En 2015, deux ans seulement après son élection, le pape François a ainsi proclamé une Année sainte de la miséricorde sous l’égide de laquelle il a souhaité placer son pontificat.
Trente millions de pèlerins attendus à Rome
Cette tradition jubilaire, qu’elle soit ordinaire ou extraordinaire, cherche à raviver la foi des catholiques du monde entier. Laïcs, clercs ou religieux, tous sont conviés à converger vers Rome, cœur de la catholicité, pour prier sur les tombeaux des apôtres. C’est un temps exceptionnel de conversion, de pénitence et de pardon pour tous les baptisés. Le thème du jubilé ordinaire de 2025 est "Pèlerins de l’espérance". Des statistiques effectuées à la demande du Vatican tablent déjà sur la participation d’environ trente millions de pèlerins — dont 800.000 Français — aux innombrables événements qui se dérouleront dans la Ville éternelle. Si toutefois l’actualité internationale ou ecclésiale ne vient pas perturber le cours prévu des célébrations...
Le premier grand événement, aura lieu la veille de Noël, le 24 décembre 2024 : le pape procèdera à l’ouverture de la Porte Sainte de la basilique Saint-Pierre. Cette porte, habituellement murée les autres années, sera symboliquement ouverte pour appeler les pèlerins du monde entier à venir la franchir pour vivre une rencontre personnelle avec le Christ. Ce même rituel de passage pourra être effectué dans les trois autres basiliques papales de Rome qui disposent elles aussi d’une Porte Sainte : ils s’agit de Saint-Jean-du-Latran, de Saint-Paul-Hors-les-Murs et de Sainte-Marie-Majeure. Cette expérience donne la possibilité d’approfondir le sens de la définition que Jésus fait de lui-même : "Moi, je suis la porte. Si quelqu’un entre en passant par moi, il sera sauvé ; il pourra entrer ; il pourra sortir et trouver un pâturage" (Jn 10, 9).
Le jubilé, "une expérience spirituelle"
À l’initiative de la Conférence des évêques de France, 150 chargés de communication dans des diocèses ou dans des associations ou mouvements catholiques sont venus à Rome du 9 au 12 janvier pour se préparer à être les artisans de "l’annonciation" du Jubilé dans leurs divers milieux. Ce jubilé n’est certes pas pour l’heure dans les têtes plus préoccupées par la préparation de la deuxième phase du Synode sur la synodalité (en octobre prochain) et peut-être aussi par le grand événement national et international que constituera la réouverture au culte et au tourisme, le 8 décembre prochain, de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Néanmoins, les participants à cette session de formation doublée d’un pèlerinage dans les haut-lieux chrétiens de Rome, avec en apothéose une audience privée avec le pape François, se sont montrés avides d’informations, d’explications et de synergie renforcée avec les protagonistes romains du jubilé, dont Mgr Fisichella à qui le Pape a confié l’organisation du Jubilé. Le nouvel évêque coadjuteur de Fréjus-Toulon, Mgr François Touvet, par ailleurs chargé de la communication à la Conférence épiscopale française, a souligné l’importance du binôme évêques-responsables diocésains de communication pour rejoindre, sensibiliser des pans de la société non seulement distants de l’Église, mais indifférents à son message.
Tâche souvent difficile et ingrate à mener sur le terrain, confient plusieurs communicants : communiquer sur le synode ou sur le jubilé tient en effet pour eux de la gageure. Car ces rendez-vous ne sont pas seulement des événements réductibles à un calendrier de manifestations. C’est aussi et surtout une "expérience spirituelle" comme l’ont rappelé plusieurs conférenciers basés à Rome, en particulier sœur Nathalie Becquart, sous-secrétaire du secrétariat du synode.
Ouvreurs de porte
Comment donc faire une bonne communication sur une "expérience spirituelle" faisant part à l’intime, à l’invisible et à la discrétion ? Les 150 communicants s’en sont retournés chez eux en méditant deux conseils au moins qu’on leur a suggérés : l’un est du prêtre Gautier Mornas. Sa catéchèse portait sur le sens spirituel de la porte. Aussi il invita ses auditeurs à être eux-mêmes des portes, mieux, des ouvreurs de portes dans l’Église et dans la société, à l’instar de la métaphore christique de saint Jean. L’autre conseil vient du pape François. Se référant au patron des journalistes et communicants catholiques, saint François de Sales, il leur a recommandé de soigner leur témoignage : nos contemporains "cherchent à rencontrer Dieu à travers vous ! […] Pour nous, communiquer, ce n’est pas s’abandonner à la culture de l’agressivité et du dénigrement ; c’est construire un réseau de partage du bon, du vrai et du beau..."
Ouvrir la porte et partager l’espérance de manière constructive : les communicants ont du pain sur la planche quand l’air du temps pousse plutôt à la fermeture des portes et au commentaire pessimiste et méchant. Mais sans en avoir l’air, ils se sont déjà lancés sur l’orbite du Jubilé, en éclaireurs des "Pèlerins de l’espérance" à venir.