Alors que la communauté chrétienne du Nigeria a été une nouvelle fois douloureusement frappée à Noël lors d’attaques qui ont coûté la vie à au moins 160 personnes et fait plus de 300 blessés, elle a témoigné ce lundi 8 janvier d’un beau courage et d’une grande abnégation. Plusieurs milliers de chrétiens se sont rassemblés à Jos, ville du centre du Nigeria, afin de protester contre l'insécurité. Vêtus de noir pour marquer leur deuil, les manifestants se sont réunis devant le bureau du gouverneur de l’État du Plateau pour réclamer la paix et la sécurité.
Situé sur la ligne de démarcation entre le nord du Nigeria, majoritairement musulman, et le sud, majoritairement chrétien, l’État du Plateau connaît régulièrement des flambées de violences religieuses et ethniques. "Nous demandons sans équivoque et avec insistance qu'il soit mis fin à ces attaques et à ces meurtres dans le Plateau et dans l'ensemble du pays", a déclaré le révérend Stephen Baba Panya, organisateur du rassemblement. "Le personnel de sécurité devrait être déployé dans tous les points chauds de l'État afin d'éviter que les massacres de Noël ne se répètent", a-t-il ajouté.
Lors des attaques menées le mois dernier dans les circonscriptions de Bokkos et de Barkin Ladi, des hommes armés ont attaqué une vingtaine de villages la veille de Noël et les jours suivants. Des milliers de personnes ont également été déplacées lors de ces attaques, qui ont touché principalement des villages chrétiens.
60.000 chrétiens tués en 20 ans
Depuis plusieurs années maintenant, les populations des régions du nord-ouest et du centre du Nigeria vivent dans la terreur des attaques des groupes djihadistes et des bandes criminelles qui pillent les villages et tuent ou enlèvent leurs habitants. Et les chrétiens sont particulièrement ciblés. En cause, des raisons à la fois ethniques, religieuses et climatiques : les Peuls, musulmans, s’opposent aux Biroms chrétiens, les groupes terroristes djihadistes restent très actifs dans la région et à cela s’ajoutent des conflits de ressources naturelles entre les éleveurs transhumants et les agriculteurs sédentaires.
Les chrétiens demeurent particulièrement visés dans le pays. Pour rappel, le Nigeria détient le sinistre record du plus grand nombre d’enlèvements de chrétiens dans le monde, toutes confessions confondues : sur les 5.259 chrétiens enlevés en 2022, 4.726 sont nigérians, d’après l’ONG Portes Ouvertes. Les prêtres, qui se déplacent beaucoup pour assurer leur ministère, sont particulièrement ciblés par les enlèvements dont la plupart ont lieu sur les routes. En 17 ans, de 2006 à 2023, 53 prêtres ont été enlevés, 16 tués et 12 attaqués au Nigeria, a indiqué en avril 2023 la conférence épiscopale nigériane. Au total, en 20 ans, plus de 60.000 chrétiens ont été tués et 5 millions déplacés.