Des centaines de milliers de jeunes chrétiens, les paroles d’un Pape et la présence du Christ. Voilà les trois ingrédients qui rendent les Journées mondiales de la jeunesse (JMJ) si exceptionnelles et, pour certains, si profondément marquantes. Depuis les premières JMJ – que l’on peut faire remonter à 1984, à Rome, où 300.000 jeunes étaient rassemblés pour célébrer un jubilé spécial pour la jeunesse – nombreux sont ceux qui ont vécu une expérience forte, à la fois fraternelle et spirituelle. Mais les JMJ s’avèrent aussi être une expérience fondatrice. Pour certains, il y a un après.
En effet, loin d’être un feu de paille, la flamme des JMJ a pour ambition d’embraser le monde. Jean Paul II, Benoît XVI ou François, tous trois à leur manière ont exhorté la jeunesse à mettre le feu au monde : en inventant de nouvelles manières d’évangéliser pour le premier, en recherchant la rencontre personnelle avec Jésus pour le second, en devenant des disciples missionnaires pour le troisième. Ces appels à brûler du feu de l’Esprit saint ont résonné dans les oreilles et le cœur de milliers de jeunes, faisant ainsi jaillir des vocations de prêtres, de religieux, de laïcs missionnaires ou engagés au service du bien commun.
Des paroles marquantes
Il suffit parfois d’une phrase ! La parole d’un pape, qui semble être adressée personnellement tellement elle touche juste, ou qui résonne en soi, pendant plusieurs jours ou plusieurs années… et c’est le déclic. Glorious, le groupe de pop louange, l’a rappelé à l’occasion de ses 20 ans l’année dernière : c’est lors des JMJ à Rome, en 2000, que les trois frères Aurélien, Benjamin et Thomas Pouzin ont décidé de témoigner de leur foi à grand renfort de guitares et de batteries. Le pape Jean Paul II, citant sainte Catherine de Sienne, avait lancé : "Si vous devenez ce que vous devez être, vous mettrez le feu au monde !" Cette promesse, "c’était la petite étincelle qui manquait pour que nous passions de la cave de nos parents au Zénith !", a confié Thomas Pouzin au journal La Vie. Deux ans plus tard, leur premier album sortait.
Une phrase. C’est aussi ce qui a fait basculer l’existence de Christine. Aujourd’hui âgée de 68 ans, Christine du Coudray a œuvré pendant 30 ans au service de l’Église d’Afrique au sein de l’Aide à l’Église en détresse (AED). Une mission qu’elle n’avait pas imaginée un seul instant lorsqu’elle travaillait dans le service communication d’une grande entreprise pharmaceutique à Dijon. "Je ne savais pas même placer correctement les pays africains sur une carte !", confie-t-elle en souriant. Mais les JMJ de Saint Jacques de Compostelle, en 1989, ont fait résonner un appel qui a profondément modifié le cours de sa vie. C’était le dimanche 20 août 1989, sur le "Monte del Gozo", "tout boueux car fauché quelques jours avant", se souvient-elle.
Dans son homélie, le pape Jean Paul II s’est adressé aux "jeunes des années 90 et du XXe siècle", les appelant à suivre le Christ et se mettre à son service : "Je vous invite, chers amis, à découvrir votre véritable vocation à coopérer à la diffusion de ce Royaume de vérité et de vie, de sainteté et de grâce, de justice, d'amour et de paix". "Cette invitation à mettre son savoir-faire au service de l’Église m’a touchée, je l’ai gardée en moi pendant quatre ans, - quelle patience du Seigneur ! -, elle me tarabustait, jusqu’à ce que je finisse par envoyer mon CV à l’AED", confie Christine du Coudray à Aleteia.
"Invitée à dîner chez le Saint Père, j'ai pu lui dire que j'étais là suite à son appel à Saint Jacques de Compostelle !"
Trois jours après, elle reçoit un appel du siège de l’AED, depuis Königstein, en Allemagne. Avant son entretien, face au bâtiment, elle "sait" que sa place est ici. On lui propose de diriger la section Afrique. Un an après, elle est la seule femme laïque européenne à participer au premier synode sur l’Afrique initié par Jean Paul II. "Lors du synode, invitée à dîner chez le Saint Père, j'ai pu lui dire que j'étais là suite à son appel à Saint Jacques de Compostelle !", se réjouit-elle.
Éveil d’un élan missionnaire
Prise de conscience de l’universalité de l’Église, appel à se mettre au service des plus faibles, désir d’aller aux périphéries pour témoigner de sa foi… Les JMJ sont pour beaucoup de jeunes l’occasion d’un éveil missionnaire.
Lorsque Christine du Coudray, à 38 ans et "partant de zéro pour ce qui était de la culture africaine", choisit de se mettre au service de l’Église d’Afrique, elle ressent ce désir de "rentrer dans la réalité des projets". Pendant 30 ans, elle œuvrera à développer "une communion entre ces frères et sœurs dans la foi", en écoutant et en aidant les évêques, les prêtres et les religieuses du continent africain. "En relisant mon histoire, je réalise combien tout cela a été donné, conduit, depuis ce dimanche des JMJ où le Seigneur m’a appelée. Et à partir du moment où j’ai dit oui, tout m’a été donné point par point. Je ne peux que dire "Merci Seigneur !"".
Aujourd’hui, nous répondons "nous voici" à l’appel du Pape François pour vivre comme disciples en mission.
C’est ce même élan missionnaire qu’ont éprouvé Hubert et Weronika, un jeune couple qui s’apprête à partir en Thaïlande avec Fidesco. Un appel qui remonte à 2019, aux JMJ de Panama : "Nous sommes invités depuis notre rencontre aux JMJ à Panama à vivre et partager une longue aventure missionnaire". Ils ont décidé de consacrer leur première année de mariage au service des plus pauvres et de l'Église. "Aujourd’hui, nous répondons "nous voici" à l’appel du Pape François pour vivre comme disciples en mission et offrir notre temps, notre énergie et nos compétences au service des plus vulnérables", témoignent-ils.
Des expériences spirituelles fortes
Des millions de jeunes rassemblés pour prier, louer et adorer le Christ, cela change un homme ! Beaucoup de jeunes témoignent de la joie de se sentir tout d’un coup moins seul. C’est l’expérience qu’a faite à 17 ans Ludovic Frère, aujourd’hui prêtre du diocèse de Gap et d'Embrun. "À l’époque des premières JMJ, beaucoup de jeunes comme moi y ont trouvé un véritable élan dans la foi, en constatant qu’on n’était pas chrétien dans son coin et surtout pas jeune chrétien tout seul", se souvient-il.
Ses premières JMJ sont celles de Czestochowa, en Pologne, en 1991, un an et demi après la chute du mur de Berlin. "Ce contexte historique était marquant, comme une ouverture entre les jeunes d’Europe de l’Ouest et ceux d’Europe de l’Est. Mais c’était aussi l’occasion pour moi de vivre pour la première fois un événement au niveau international, avec une participation dépassant 1,5 million de personnes à la messe dominicale. Je garde le souvenir de cette foule immense, comme un grand signe d’espérance pour ma foi d’adolescent."
C’est aussi en Pologne, mais aux JMJ de Cracovie en 2016, que Sandrine vit une expérience spirituelle qui bouleverse sa vie et renouvelle sa foi. Elle a alors 27 ans, vient de perdre son emploi et n’a pas du tout la tête aux JMJ. "Je ne m’étais pas inscrite, je ne suis pas une aventurière et la Pologne me paraissait le bout du monde !" Mais à la suite d’un désistement et sur l’invitation du prêtre de sa paroisse de Saint-Arnoux à Gap, elle s’est finalement retrouvée dans le car. "Mes freins se sont levés, quand le Seigneur veut quelque chose, les obstacles tombent !", relit-elle.
Pendant un temps d’adoration au sanctuaire marial de Czestochowa, elle vit quelque chose d’extraordinaire. Elle qui pratiquait plus par habitude fait l’expérience d’une rencontre personnelle avec le Seigneur. "Je me suis sentie aimée, non pas d’un amour humain, mais d’un amour sans limite et sans condition. J’ai été transportée dans cet amour pendant quelques minutes, et cela a changé ma vie". Depuis, sa relation avec le Seigneur est toute autre. "Ma prière est différente, avant, je m’adressais au Seigneur sans savoir à qui je m’adressais, maintenant, je parle à Jésus, de manière proche, intime", confie-t-elle. Sa vie entière est transformée, pas uniquement sa vie de prière. "A mon retour, tout est devenu cohérent, j’allais à la messe tous les jours, j’ai trouvé un emploi au sanctuaire de Notre-Dame du Laus, j’ai vraiment touché du doigt la miséricorde de Dieu". Le thème des JMJ d'alors y était-il pour quelque chose ? : "Heureux les miséricordieux, car ils obtiendront miséricorde" (Mt 5, 7).