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Dans l’Évangile, le cœur de Marie apparaît dès l’origine. Le cœur de Marie est d’abord sollicité pour donner son "oui" à l’Annonciation. On pourrait aussi évoquer la prophétie de Syméon lors de la Présentation de Jésus au Temple, mais c’est l’âme et non pas le cœur de Marie qui, selon lui, sera transpercé d’un glaive. En revanche, c’est bien du cœur qu’il s’agit dans le récit d’aujourd’hui, qui se conclut par ces mots : "Marie gardait dans son cœur tous ces événements" (Lc 2, 51). Le cœur de Marie est là dès le début de l’Évangile, alors que le cœur de Jésus n’apparaît qu’à la fin. Le cœur de Marie est visible dès le début, le cœur de Jésus est caché et n’apparaît qu’à la fin. Et encore, le cœur de Jésus est plutôt suggéré puisque c’est son "côté" qui est ouvert et d’où jaillissent le sang et l’eau.
Le cœur qui reçoit et le cœur qui donne
Il y a là comme une inversion des rôles. Jésus a prêché publiquement, a fait des miracles, tandis que Marie se tenait dans l’ombre, et c’était bien normal : il n’y a qu’un seul Sauveur, qu’un seul Médiateur, qu’un seul Fils de Dieu qui soit vrai Dieu et vrai homme, et c’est Jésus. Mais pour ce qui est du cœur, celui de Marie apparaît en premier et celui de Jésus en dernier.
Mais le cœur de Jésus et le cœur de Marie, en plus d’apparaître à des moments différents, apparaissent dans des rôles différents. Le cœur de Jésus s’épanche, à la Croix, tandis que le cœur de Marie reçoit, tout au long de sa vie. Et le cœur, qui dit le plus intime de la personne, ne trompe pas : dans l’économie du salut, Jésus est d’abord celui qui donne et se donne, Marie est d’abord celle qui reçoit, pour donner à son tour. Le cœur de Marie reçoit la Parole de Dieu, et la Parole de Dieu s’y trouve bien, de l’Annonciation à Noël et de Noël à l’Assomption jusque dans la gloire. Dans nos cœurs à nous, la Parole de Dieu est un peu à l’étroit, il y a quelques obstacles. Dans le cœur de Marie, la Parole de Dieu peut demeurer comme en son lieu propre, elle peut s’y déployer, grandir.
Deux cœurs à l’unisson
Au risque d’être un brin sentimental, j’aime à imaginer les battements du cœur de Jésus enfant se confondant avec les battements du cœur de Marie qui le berce. Normalement, quand deux personnes sont en silence l’une à côté de l’autre, il faut un peu de temps et un effort conscient pour arriver à ce que les battements du cœur soient synchronisés. Entre le cœur de Jésus et le cœur de Marie, l’harmonie s’est faite spontanément, dès le début et jusqu’à ce jour. Plus tard, Jean s’est penché à son tour sur la poitrine de Jésus pour mettre lui aussi son cœur à l’unisson du cœur de son maître. Ce n’est pas un hasard si Jean et Marie se trouvaient ensemble au pied de la Croix pour être les témoins privilégiés de la révélation du cœur de Jésus ouvert sur le monde, de l’amour à cœur ouvert de Jésus pour les pécheurs.
Le cœur de Marie est aussi ce cœur qui comprend la souffrance qu’on ressent lorsque Jésus paraît absent.
C’est ce qu’ils ont transmis ensuite à l’Église, à cette communauté de disciples qui est décrite dans les Actes comme "n’ayant qu’un seul cœur et qu’une âme". Dans l’Église, le cœur immaculé de Marie nous invite chaque jour à n’avoir qu’un seul cœur et qu’une âme, entre nous et avec Jésus. Mais pour tous les contemplatifs, le cœur de Marie est aussi ce cœur qui comprend la souffrance qu’on ressent lorsque Jésus paraît absent, comme c’est le cas dans l’Évangile d’aujourd’hui. C’est capital !
L’expérience douloureuse de l’absence de Jésus
Car après tout, on pourrait dire que tout ce que le cœur de Marie nous apporte, le cœur de Jésus nous l’apporte déjà. Mais il y a une chose que le cœur de Jésus, qui a tout vécu et tout souffert, ne peut pas nous apporter, par définition, c’est cela : l’expérience douloureuse et aimante de l’absence de Jésus. Dans ce domaine, le cœur de Marie est au-dessus de tout. Quand elle a cru perdre Jésus, Marie l’a retrouvé et l’a pressé contre son cœur. Lorsque nous avons l’impression que Jésus est absent, demandons au cœur de Marie de nous aider à le retrouver.