Oser ressusciter : un hebdomadaire titre cette semaine sur l’art de ressusciter. Car il s’agit bien d’un art, au sens étymologique du terme : habileté, connaissance technique... La résurrection ne peut s’entendre qu’intimement liée à la personne du Christ. C’est en Lui, avec Lui, par Lui, que nous ressuscitons. Il nous faut donc chercher à l’approcher, à en acquérir la connaissance.
Une connaissance intime, personnelle, non pas seulement conceptuelle et un peu froide. Une connaissance qui ouvre une relation, la nourrisse et l’entretienne. Et pour avancer sur ce chemin, il nous est nécessaire de faire preuve d’habileté, c’est-à-dire d’intelligence, de discernement afin de distinguer les faux-semblants qui peuvent nous conduire ailleurs, et nous attacher au Bien qui nous mène à lui.
Un rêve de résurrection
Alors que notre pays fulmine, que le discours profondément inquiétant du chef de l’État sur la fin de vie semble devoir se transformer en loi (laquelle tiendra plus du coup de com’ cynique que de la conviction personnelle), et que, dans le même temps, des évêques se mettent à régler leur compte entre eux sur la place publique, la question nous est donc posée avec une certaine urgence : allons-nous oser ressusciter ?
Plus encore : nos vies personnelles, dans leurs tensions secrètes et leurs troubles parfois, les révoltes qui nous habitent ou les peurs qui nous hantent, comme les joies auxquelles nous aspirons et les désirs qui nous meuvent, mais aussi nos habitudes, nos certitudes, nos points de fixations parfois un peu obsessionnels... tout cela laisse-t-il place à un rêve de résurrection ?
Une chose est de confesser chaque dimanche notre foi en la résurrection de la chair et en la vie éternelle. Une autre est de nous y sentir invité, dès maintenant. La résurrection n’est pas un principe ni une règle physique. Elle y échappe par définition puisque la seule vraie résurrection de l’histoire matérielle est par essence le fait invérifiable sur lequel la foi des croyants se fonde et s’enracine. Et, finalement, le seul témoignage qui manifeste la foi véritable en la résurrection est bien celui qu’en donnent ceux qui en proclament la vérité.
À reconnaître dès maintenant
Les Actes des Apôtres le soulignent en manifestant combien Pierre, puis Paul et avec eux tous les disciples, vivent dans leur chair ce que Jésus a vécu, connaissant comme lui l’expérience d’une descente vers les eaux de la mort, pour, avec lui, en remonter victorieux. Il n’y a pas une page de ce livre qui ne transpire cette réalité. Désormais ce que les yeux des premiers disciples ont vu, il appartient à tout baptisé de l’incarner. Jésus est le sauveur, il est ressuscité.
Oser ressusciter, c’est annoncer à nos prochains une bonne nouvelle que nous n’osons plus croire collectivement : qu’il n’est jamais trop tard pour que le meilleur advienne.
Et ce souffle renouvelé de la vie en plénitude n’est pas simplement à accueillir dans sa communion avec notre dernier soupir. Il est à reconnaître dès maintenant. En le laissant renouveler notre manière de vivre, de penser, d’aimer. En nous laissant guider par lui vers la Terre Promise. Ce souffle qui écarte les flots qui pourraient nous submerger est à l’œuvre dans le présent, notre quotidien. Autrement dit, proclamer notre Espérance en la résurrection sans manifester concrètement notre foi en la capacité de Dieu à faire de nous des hommes neufs aujourd’hui, ferait de nous des imposteurs.
Oser ressusciter, c’est affirmer que Dieu, qui rendit féconds Abraham et Sarah, qui fit renaître son Peuple en le libérant de l’esclavage, qui fit du plus petit fils de Jessé le grand roi d’Israël, peut en Jésus se donner à chacun et transfigurer toute existence à la lumière de son Éternité. C’est croire que Dieu aime toute vie et qu’Il la considère jusqu’à son terme comme le lieu par lequel Il veut manifester l’amour dont il aime. Oser ressusciter, c’est annoncer à nos prochains une bonne nouvelle que nous n’osons plus croire collectivement : qu’il n’est jamais trop tard pour que le meilleur advienne.