Il est impossible d’enfermer Dieu dans une définition. Il en va même pour les mystères de la foi, et aussi pour les enseignements spirituels. L’expérience montre qu’il est souvent difficile d’expliquer la "petite voie" de Thérèse sans l’affadir par des platitudes. Il est en revanche plus facile de dire ce que la "petite voie" n’est pas.
La "petite voie" n’est pas une voie pour apaiser ses angoisses
Le génie contemplatif de Thérèse lui a permis de comprendre que la Miséricorde divine n’attendait qu’une chose : que nous lui présentions nos faiblesses, nos péchés et nos misères, pour qu’elle les consume dans le feu brûlant de son amour. Voilà du pain béni pour les angoissés que nous sommes ! L’écharde dans la chair, bien lourde à porter, qui me fait tout le temps souffrir, ne suffit-il pas que je l’offre à Jésus pour en être enfin délivré ?
Il n’est pas exclu que cet acte me procure un certain apaisement. Mais ce n’est pas automatique ni essentiel. Pourquoi donc offrir ses misères à la Miséricorde divine selon Thérèse ? Pour satisfaire le désir infini qu’a Jésus de s’abaisser jusqu’à notre néant. L’offrande de nos misères a une visée radicalement théologale dans la "petite voie". À l’inverse du développement personnel, elle cherche d’abord à réjouir le Cœur de Dieu qui aime notre petitesse. De là vient la joie véritable.
La "petite voie" n’est pas une voie confortable
Une autre pépite que Thérèse nous a transmise a été de nous faire comprendre que la sainteté ne consistait pas en des actions grandioses, visibles et extraordinaires. Une vie très ordinaire, aux yeux du monde, peut conduire à une très haute sainteté. Thérèse est-elle donc moins exigeante ? Certainement pas. Sa petite voie est décapante pour qui veut bien essayer de la suivre. Il est très difficile de consentir à cette disproportion radicale entre la petitesse des actes du quotidien, et la puissance de salut que Jésus veut leur conférer si nous les vivons avec Lui.
Notre "vieil homme" préfère s’occuper d’actions prestigieuses, surtout si elles ont une orientation religieuse ou humanitaire. Or, Thérèse nous attend à chaque acte posé : cette vaisselle à ranger, cette personne à qui sourire, cet appartement à nettoyer, cette facture à payer, cette grand-mère à appeler, vas-tu t’en occuper avec une immense charité ? Vas-tu enfin renoncer à ta recherche de prestige pour accomplir des actes certes humbles et cachés mais vraiment féconds et sanctifiants ?
La "petite voie" n’est pas une apologie de l’infantilisme
Mais l’insistance de Thérèse sur la petitesse n’a rien d’une apologie de l’infantilisme. Thérèse n’est pas recroquevillée sur elle-même. Thérèse, parce qu’elle consent à être petite sous le regard de Dieu, nous invite à la suivre, en laissant nos aspirations les plus folles se déployer : Tu voulais être astronaute ou princesse, pourrait-elle te dire, moi je voulais être missionnaire, zouave pontifical et martyre et j’ai été exaucée d’une manière exceptionnelle !
Présente tes désirs les plus fous au Seigneur, ne les enferme pas, ne les étouffe pas dans ton cœur. Ils se révolteraient contre cette violence que tu leurs imposes. Présente-les à l’Esprit saint. C’est Lui qui va les purifier, les agrandir, les dilater à l’extrême… et enfin les exaucer au-delà de ce que tu pouvais concevoir et imaginer. Mais pour cela, consens aussi comme moi à rester quelques instants au pied de la Croix.
Bref, la "petite voie" de Thérèse n’est ni un anti-dépresseur, ni un pieux prétexte pour entretenir notre médiocrité, ni une apologie de l’âme recroquevillée. Elle est un feu dévorant qui vise à satisfaire l’amour jaloux de Dieu sur nous, pour embraser nos âmes de charité dans l’humble accomplissement de notre devoir d’état et pour laisser l’Esprit saint réaliser les aspirations les plus folles de notre cœur.
Pratique :