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Le Jugement dernier, la rédemption par l’art

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Le Jugement dernier, de Raphaël Coxcie (1588-1589). Musée des Beaux-Arts de Gand.

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Philippe-Emmanuel Krautter - publié le 24/01/23
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L’art de la fin du Moyen Âge jusqu’à la Renaissance va développer le thème le plus porteur qui soit avec le Jugement dernier, un sujet d’inspiration pour les plus grands artistes et une source de méditation infinie pour les fidèles…

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Le thème du jugement de l’être humain au terme de sa vie remonte à la plus haute antiquité si l’on songe à la religion de l’Égypte antique et au jugement de l’âme du défunt sur une balance par le dieu Anubis, âme qui ne devait pas être plus lourde de péchés que la plume de la déesse Maat… Le Nouveau Testament reprendra cette image du jugement dans le texte de l’Apocalypse en son chapitre 20 (Ap 20, 11-12) :

"Puis j’ai vu un grand trône blanc et celui qui siégeait sur ce trône. Devant sa face, le ciel et la terre s’enfuirent : nulle place pour eux ! J’ai vu aussi les morts, les grands et les petits, debout devant le Trône. On ouvrit des livres, puis un autre encore : le livre de la vie. D’après ce qui était écrit dans les livres, les morts furent jugés selon leurs actes."

Prenant acte des termes mêmes de l’Apocalypse de Jean, le Christ sera, dès lors, très rapidement placé au cœur même des représentations artistiques du Jugement dernier, et ce dès le Moyen Âge, ainsi qu’en témoigne le magnifique tympan gothique de la cathédrale Notre-Dame de Paris représentant la pesée des défunts sur la balance divine.

Entre bien et mal

À partir du Moyen Âge, le thème du Jugement dernier va ainsi littéralement irradier les arts visuels inspirant les plus grands artistes tel Hans Memling (1466-1473) et son fameux triptyque. Ce chef d’œuvre de l’art primitif flamand conservé à Gdansk évoque de la manière la plus virtuose la place centrale du Christ, les pieds posés sur le globe terrestre, la main droite levée vers le salut, la main gauche baissée vers la condamnation éternelle aux enfers… Le panneau de gauche opère une lecture en effet plus qu’imagée du texte de l’Apocalypse en décrivant les feux infernaux dévorant les âmes des damnés (Ap 20, 14-15) :

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Hans Memling (vers 1435 - 1494) : Jugement dernier, tryptique, huile sur bois, 1465/67 - 1471. National Museum, Gdansk.

"Puis la Mort et le séjour des morts furent précipités dans l’étang de feu – l’étang de feu, c’est la seconde mort. Et si quelqu’un ne se trouvait pas inscrit dans le livre de la vie, il était précipité dans l’étang de feu."

La rédemption encouragée par l’art

L’omniprésence des ces représentations d’art sacré dans les églises aura pour but d’élever l’âme des fidèles et d’inviter à une prise de conscience des conséquences de leurs actes et pensées. En encourageant progressivement une représentation imagée et explicite des dangers de l’enfer, l’art sert non seulement la glorification de Dieu, mais acquiert également une dimension didactique pour la conduite des fidèles. 

Cette volonté va correspondre notamment à celle de l’Église dès la Contre-Réforme au XVIe siècle, en réaction à l’hostilité du message adressé par la Réforme protestante. Cet encouragement de la dévotion et de la mise en image de la foi catholique suscitera dès lors une créativité à nulle autre pareille chez les plus grands artistes tel Michel-Ange et son inoubliable Jugement dernier peint à fresque derrière l’autel de la chapelle Sixtine du Vatican et inauguré en 1541 par le pape Paul III. Cette œuvre éblouissante parvient en une virtuosité inégalée à éclairer le texte biblique de l’Apocalypse. Le tourbillon des couleurs célestes se développe à partir de la figure centrale et sculpturale du Christ. Véritable théologie imagée, le Jugement dernier de ce grand artiste du Cinquecento italien (XVIe siècle) magnifie la seconde venue sur terre du Christ, ou parousie, de manière inoubliable… 

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