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Pour quelques semaines, Bethléem, comme chaque année, est le centre du monde. Car c’est bien ici qu’est né le Sauveur, il y a quelques deux mille ans. La ville, dorénavant très construite, a d’ailleurs bien changé depuis cette nuit obscure durant laquelle la lumière a resplendi. Mais les traditions, elles, demeurent vivaces. À commencer par celle qui situe les premiers gazouillis du Christ dans la grotte sur laquelle est bâtie la basilique de la Nativité depuis 565.
Une autre tradition se maintient, malgré les aléas historiques et géopolitiques qui secouent sans cesse la Terre sainte. Une tradition qui permet à toutes les communautés de se rencontrer et, même formellement, de se parler. C’est l’entrée solennelle du Patriarche latin de Jérusalem dans la petite ville de David, Bethléem, le 24 décembre de chaque année pour aller y célébrer la Nativité. Un trajet de huit kilomètres seulement : un petit – quoique – pas liturgique, un plus grand œcuménique.
Un périple hérité de l'histoire
Parce que la plupart des règles cultuelles chrétiennes (liturgies, offices, processions…) est régie par des textes diplomatiques du XIXe siècle, Israël et l’État palestinien y ont aujourd’hui leur part. Le Patriarche effectue ainsi la première partie de son périple, en voiture et de la Vieille ville au Mur de séparation avec les Territoires palestiniens, escorté par la cavalerie israélienne.
Parvenu à côté du Tombeau de Rachel, le cortège passe le mur de huit mètres de haut qui empêche les Palestiniens d’entrer en Israël par une porte qui n’est ouverte qu’à cette occasion. L’État israélien, en effet, a dû pratiquer cette ouverture sur la route d’Hébron pour se conformer aux garanties diplomatiques qui le précédaient.
C’est sur cette place, entre la mosquée, la basilique chrétienne et la mairie – tout un symbole – qu’est piqué le traditionnel grand sapin.
Désormais passé à Bethléem, le patriarche et les autorités latines qui le suivent sont accueillis par les représentants palestiniens et le maire de cette ville, statutairement chrétien même si la population est à 70% musulmane. Là, la procession se fait joyeuse et populaire et Mgr Pizzaballa, très apprécié, est entouré d’une foule de scouts et de Bethléemites qui chantent au son des cornemuses dans la rue qui mène à la place de la Mangeoire.
C’est sur cette place, entre la mosquée, la basilique chrétienne et la mairie – tout un symbole – qu’est piqué le traditionnel grand sapin. Quelques semaines plus tôt, son illumination a été l’occasion d’une belle fête au milieu de Bethléem, source de joie pour disciples du Christ et de Mahomet réunis.
Plusieurs instants œcuméniques
Avant d’aller dire les premières vêpres de la solennité de la Nativité de Notre-Seigneur Jésus-Christ (respiration), le Patriarche est accueilli devant l’édifice de l’époque justinienne par les trois représentants des confessions qui prient dans la basilique : Latins, Arméniens et Grecs-orthodoxes. Cet instant œcuménique n’est pas le seul de la journée. Passée devant le monastère grec de Mar Élias, côté israélien, la procession s’était déjà arrêtée pour de fraternelles salutations.
Désormais au plus près de la crèche ou naquit l’Emmanuel, le Patriarche peut honorer cet événement inouï en président la messe de Minuit avec, au premier rang, Abu Mazen (Mahmoud Abbas, président de l’État palestinien) et les consuls des nations chrétiennes. Le Roi d’humilité, Prince de la paix, est assurément celui qui vient, pour réconcilier les hommes.