En canonisant l'évêque italien Mgr Jean-Baptiste Scalabrini, le pape François donne "un père aux migrants". Né en 1839, ce prêtre italien du XIXe siècle était particulièrement touché par les questions liées à l’émigration, voyant nombre de ses compatriotes émigrer vers les Amériques à la recherche d'une vie meilleure. Ainsi, à la fin des années 1800, il fonda deux Congrégations, les Missionnaires de Saint-Charles en 1887, et sa branche féminine, les Sœurs Missionnaires de Saint-Charles Borromée, en 1895, consacrées à l'aide aux migrants à travers le monde. Aujourd'hui, le charisme de Scalabrini est toujours vivant et actif, grâce au travail acharné de ses "fils et filles" spirituels au service des migrants à travers le monde.
"Le pape canonise notre fondateur parce qu'il veut donner un père aux migrants", confie à Aleteia sœur Lina Guzzo, vice-postulatrice de la cause de canonisation de Mgr Scalabrini. Membre de cette Congrégation depuis 57 ans, sœur Lina a aidé des Italiens à l'étranger, en Allemagne et en Suisse, assisté des migrants déplacés par la chute du communisme en Albanie dans les années 1990 et œuvre aujourd'hui pour deux communautés, l'une de Philippins et l'autre de Sri Lankais, à Messine, en Sicile.
"Ma force, c'est d'être avec les migrants", explique-t-elle. "Nous voulons et sentons que la canonisation [de Jean-Baptiste Scalabrini, ndlr] sera un grand moment pour l'Église et un grand coup de pouce pour nous, pour nous aider à être plus fidèles à notre charisme".
Aider les migrants de tous bords
Les deux congrégations du bienheureux Scalabrini comptent environ 500 sœurs, présentes dans 27 pays, et 600 frères et prêtres, présents dans 33 pays. La famille religieuse comprend également, depuis 1990, l'Institut Séculier des Missionnaires Séculiers Scalabriniens. Ensemble, ils servent environ 12.000 migrants par jour en travaillant dans des centres de santé, des hôpitaux, des écoles, des prisons, des centres d'accueil et plus encore. Des personnes déplacées à cause des conflits, des catholiques dans des pays étrangers, des travailleurs à la recherche de meilleures opportunités économiques… Il n'y a pas de définition de migrant que leur Congrégation ne couvre pas.
Par exemple, depuis 2017, les sœurs scalabriniennes à Rome gèrent deux maisons dans le cadre d'un projet appelé "Chaire Gynai", qui signifie "Bonjour/Bienvenue, femme !" en grec. Le pape François avait demandé aux sœurs de fournir un programme de "double assistance" destiné aux mères réfugiées avec enfants et aux femmes migrantes en situation de vulnérabilité.
Parmi ces femmes, les Scalabriniens ont également accueilli des ex-sœurs qui ont quitté la vie religieuse et se retrouvent dans un pays étranger sans nulle part où aller. Certaines des histoires de ces femmes sont présentées dans le livre de 2021 "Il Velo del Silenzio" ("Le voile du silence"), écrit par le journaliste italien de Vatican News Salvatore Cernuzio, qui partage les expériences de religieuses qui ont subi des violences psychologiques ou physiques dans leur communauté.
Dans ces foyers tenus par les Scalabriniens, ces ex-sœurs reçoivent une aide psychologique, une assistance juridique pour mettre leurs papiers en règle et apprennent des compétences professionnelles, explique le livre. Cernuzio décrit le projet de la Scalabrinienne comme une "initiative sans aucun doute louable", qui est cependant "une goutte d'eau dans un océan de besoins" et pourrait devenir "un modèle à imiter" dans d'autres Congrégations, pour aider les femmes qui quittent la vie religieuse.
L’histoire de Jean-Baptiste Scalabrini
Jean-Baptiste Scalabrini est né à Côme, en Italie, en 1839. Il a été ordonné en 1863 et en 1876, à seulement 36 ans, il est devenu évêque de Plaisance. En 1880, il se trouvait à la gare centrale de Milan lorsqu'il vit un groupe de migrants italiens pauvres partirent pour les Amériques dans des conditions désastreuses.
À partir de ce moment, il a commencé à essayer d'influencer l'Église et l'État italien pour qu'ils prêtent attention à ces personnes. Il écrivit des textes et des études sur l’émigration, fonda deux Congrégations, et proposa même au Vatican, en 1905, quelques mois avant sa mort, de créer une Commission centrale pour tous les émigrés catholiques. Initialement prévu pour aider les Italiens à l'étranger, Scalabrini envisageait déjà qu'à l'avenir, il pourrait aider tous les migrants. Bien qu'il soit décédé avant sa mise en œuvre, son projet est considéré comme les prémices des diverses commissions et conseils pontificaux qui ont été créés dans les décennies suivantes, devenus aujourd'hui la Section des migrants et des réfugiés du Dicastère pour le développement humain intégral.
"Scalabrini nous rappelle que les migrants sont des gens dans la rue, ils sont sans abri, ils sont sans droits et sans papiers. Dans la fidélité et l'adhésion à notre charisme, il nous transmet cette sensibilité aux migrants. Il est de notre grande responsabilité de le connaître, de le prier, de le sentir comme un père pour que nous puissions aussi le présenter comme tel à toutes ces personnes que nous rencontrons", a déclaré sœur Lina.