Du petit enfant qui n’a encore jamais communié à l’adulte conscient de ne pas être prêt à accueillir Jésus dans l’hostie, il est courant de voir se présenter devant le ministre qui distribue la communion des personnes les bras croisés sur la poitrine. Au lieu du Corps du Christ, réellement présent dans le petit bout de pain qu’est l’hostie, ils viennent recevoir une bénédiction. Qui n’est jamais tout à fait la même, dans les mots et les gestes, allant du signe de croix sur le front à l’imposition du ciboire sur la tête.
Quand on ouvre un missel, on comprend cette diversité. Aucune phrase ne mentionne la manière concrète de distribuer la communion et, a fortiori, le cas de ceux qui viennent sans vouloir communier. Même le texte Redemptionis Sacramentum, écrit de la Congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements et datant de 2004, précis et rigoureux, ne parle pas du sujet. La liturgie ne semble donc pas prévoir cette situation, peut-être parce que le geste accompli ne correspond pas toujours au désir qu’il exprime.
Si l’on veut ne pas communier, c’est d’abord parce que l’on n’est pas prêt. Pour l’enfant qui n’a pas encore communié, c’est une question de temps. Pour l’adulte, c’est parce que son état ne permet pas qu’il le fasse : conscience d’un péché mortel, manque au jeûne eucharistique… En s’avançant tout de même pour être béni par le ministre qui distribue la communion, le fidèle manifeste en fait son désir de communier, impossible pour le moment.
Ce désir se rapporte à ce que l’on appelle la « communion spirituelle », expression qui porte à confusion. Non sacramentelle, elle est réelle si celui qui la pratique s’unit de toute son âme au mystère célébré : il reçoit alors les grâces inhérentes à l’eucharistie.
La même situation se retrouve lorsque l’on est empêché, pour une raison grave, de se rendre à la messe dominicale. Ce fut le cas lors des différents confinements des années passées qui ont permis de redécouvrir la beauté de la communion de désir. L’idéal étant, évidemment, que celle-ci ne fasse qu’un avec la communion sacramentelle. Le contraire, une communion sacramentelle sans désir spirituel, étant une forme d’hypocrisie ou d’inconscience.
Manifester publiquement le désir de communier plus tard
Après ce détour, revenons au geste de la bénédiction. En s’avançant avec les autres fidèles, celui qui ne communie pas manifeste publiquement le désir de le faire plus tard. Par là, il rappelle aussi à ses coreligionnaires que recevoir le Corps du Christ n’est pas un acte anodin, mais qu’il nécessite la préparation du corps et de l’âme, et l’exercice de la volonté. Celle de s’unir au Christ et de construire son corps qui est l’Église. Pour les enfants, participer à la procession fait également partie de la préparation à la communion.
En même temps, il est vrai que la bénédiction n’est pas nécessaire en soi. Si la liturgie ne la prévoit pas, c’est parce que la communion spirituelle est une démarche avant tout intérieure, surtout quand elle est vécue par celui qui n’a pas pu se rendre à l’église. L’habitude de se faire bénir est en fait venue avec celle de communier. Quand, au tout début du siècle dernier, communier était encore rare, la majorité des fidèles restait à sa place, s’unissant à la communion du prêtre. Sans compter le fait que, la messe, quelques minutes après la communion, se termine par… une bénédiction !