Vigne, vin et saints sont intimement liés. À commencer par la Bible qui mentionne les mots vin, vigne ou vigneron à 441 reprises. Le premier miracle de Jésus est également lié au vin (Jn 2, 1-11). Pas étonnant donc que de nombreux domaines viticoles et les appellations d’origine protégée portent le nom d’un saint. Une tradition qui serait due tout d’abord au fait que bon nombre de moines ont réimplanté la culture de la vigne dans l’Hexagone et ont ainsi contribué à donner des noms de saints à leurs vins. Autre explication, en France, beaucoup de terroirs et d’AOC sont appelés par les noms des villages et villes d’où les vins proviennent, certains de ces lieux-dits portent des noms de saints.
Ainsi, des saints, il y en a dans toutes les régions viticoles. Au sud du Libournais, on trouve par exemple Sainte-Foy-Bordeaux, Saint-Macaire et Sainte-Croix-du-Mont. Dans le Sud-Ouest, on peut goûter les Saint-Sardos ou encore les Saint-Mont. L’appellation Saint-Chinian propose dans le Languedoc des vins bien structurés autant en blanc qu'en rouge. Dans la vallée du Rhône, les dénominations Saint-Andéol, Sainte-Cécile, Saint-Gervais ou encore Saint-Maurice complètent certains Côtes-du-Rhône-Villages. Le Beaujolais possède le Saint-Amour. La Loire célèbre son Saint-Nicolas-de-Bourgueil en Touraine. Quant à la Bourgogne, elle compte aussi de nombreux saints (rouge ou blanc) : Morey-Saint-Denis, Nuits-Saint-Georges, Saint-Romain, Saint-Aubin ou Saint-Véran. Alors que la saison des vendanges bat son plein, Aleteia vous propose un petit tour des grands vins rattachés aux divers saints :
1Saint Martin
Si saint Martin de Tours n’a jamais donné son nom à une appellation, plusieurs producteurs de vins l’utilisent : le Château de Saint-Martin en Provence, le domaine de la Ferme Saint-Martin à Beaumes-de-Venise, l’Oratoire Saint-Martin à Cairanne. Un domaine Saint-Martin existe même près de Carcassonne. Et si ce saint du IVe siècle jouit d’une telle notoriété auprès des vignerons, dont il est le saint patron, c’est à cause de son âne. Celui-ci aurait brouté quelques sarments de vigne près de Tours, révélant ainsi, aux vendanges suivantes, les bienfaits de la taille. En l’an 380, l'évêque de Tours aurait aussi accompli un miracle. Il aurait creusé, à l’abbaye de Marmoutier de Tours, une fontaine qui donna du vin plutôt que de l’eau.
2Saint Vincent
Le plus respecté des saints patrons des vignerons : saint Vincent. Si comme saint Martin, il n’a pas eu droit à une appellation, sa fête est particulièrement célébrée dans le vignoble bourguignon depuis le Moyen Âge. Ce diacre et évêque de Saragosse aurait joué un rôle posthume très important lors du siège de la ville espagnole en 542. Childebert, roi de Paris, et Clotaire, roi de Soissons, auraient été touchés par la piété des habitants entrés en procession derrière les reliques de saint Vincent. Ils auraient donc négocié les reliques contre la levée du siège. Celles-ci ont alors été déposées à Paris, à l'abbaye Sainte-Croix-Saint-Vincent, devenue Saint-Germain-des-Prés, où les moines cultivaient la vigne. Ainsi, un autre saint patron du vin est né !
3Saint Vernier
Une autre figure bien connue des vignerons : celle de saint Vernier (ou, selon les lieux, Werner ou Verny). Son nom a traversé les vignobles depuis le Rhin allemand : Bourgogne, Franche-Comté, Auvergne. Fêté le 19 avril, saint Vernier protègerait contre les gelées printanières. On trouve son nom sur des bouteilles de vin blanc comme du vin rouge.
4Saint Amour
Saint-Amour est un vignoble petit par la taille (320 ha), mais grand par ses vins que dégustent les amoureux à la Saint-Valentin. Selon une légende, ce cru le plus glamour du Beaujolais doit son nom à un soldat romain, nommé Amor. Il se serait réfugié en Franche-Comté au VIIIe siècle, après sa conversion au christianisme. Ses reliques sont d’ailleurs conservées dans l'église du village de Saint-Amour dans le Jura.
5Saint Emilion
Dans le Bordelais, les saints sont partout. Mais avec ses 5.400 hectares de vignes, Saint-Emilion (et ses grands crus) en est le plus puissant. Il peut en effet compter en plus sur différentes appellations satellites : Lussac-Saint-Emilion, Montagne-Saint-Emilion, Saint-Georges-Saint-Emilion, Puisseguin-Saint-Emilion. Saint Émilion ou Émilian (Emilianus) était un intendant du comte de Vannes, moine et ermite breton.
L’histoire raconte que lors d’un pèlerinage sur la route de Saint-Jacques de Compostelle, il se serait installé à Ascumbas, l’ancien nom de la ville Saint-Emilion et y aménagea une église dans le roc. Très vite sa réputation attira autour de lui une petite communauté religieuse. Après sa mort en 767, ses disciples ont creusé au-dessus du sanctuaire initial la fameuse église monolithe que l’on visite toujours aujourd’hui. Fêté le 16 novembre, il est le saint patron des marchands et négociants en vin.
6Saint Joseph
Dans la vallée du Rhône, Saint-Joseph, du haut de ses 1.100 hectares de vignes, n’est pas regardant sur la couleur. Il est rouge ou blanc. Il a été très longtemps connu sous le nom de "vin de Mauves". Et ce sont les jésuites de Tournon, propriétaires du vignoble, qui lui ont donné au XVIIIe siècle le nom du père adoptif de Jésus.
7Saint Pourçain
Dans la région viticole de la Vallée de la Loire se niche le vignoble de l'appellation d'origine contrôlée Saint-Pourçain. Ce nom viendrait de l’abbé Porcianus, fondateur de la ville, qui a défendu en 525 le territoire viticole menacé. Dès le Moyen Âge, les vins de Saint-Pourçain sont présents à la table des rois et sont par la suite très appréciés par les papes en Avignon.
8Saint Chinian
Dans le Languedoc, l’appellation Saint-Chinian doit son nom à saint Benoît d'Aniane, fêté le 12 février. En 782, il fonda le monastère de Saint-Laurent, autour duquel il développa la vigne. Par la suite, le monastère prit le nom de Saint-Anian, qui devint Saint-Chinian au Moyen Âge (dérivé en occitan en Sanch Inhan puis avec mécoupure en San Chinian).
9Châteauneuf du pape
Au nord d'Avignon, l’appellation Châteauneuf du Pape n'est pas dédiée à saint précis mais a bien un côté spirituel puisqu'elle doit son nom et son histoire à la papauté qui, installée à Avignon, choisit Châteauneuf comme résidence d'été au XIVème siècle. Sept papes successifs (Clément V, saint Jean XXII, Benoît XII, Clément VI, Innocent VI, Bienheureux Urbain V et Grégoire XI) y vécurent et favorisèrent la production du vin. Aujourd'hui l'appellation est réputée pour ses grands vins rouges, mais on y produit aussi des vins blancs secs acidulés et très fins.