D’abord parce que l’expérience serait trop horizontale, alors que l’Église doit proclamer la Bonne nouvelle du salut, révélée en Jésus. Le processus, qui consistait à se regrouper en équipe pour parler de l’Église et évoquer joies, besoins et souffrances a pu laisser sceptiques ceux pour qui elle est avant tout un don du Père pour parvenir au ciel. Si la démarche fait appel au discernement grâce à l’Esprit saint, elle a pu devenir l’occasion de doléances parfois éloignées du souffle divin. Mgr Marc Aillet rappelle à ce sujet, dans le journal du diocèse de Bayonne de juillet, une citation de saint Antoine de Padoue : "Heureux celui qui parle selon le don de l’Esprit et non selon son propre sentiment".
Des revendications qui ne sont pas nouvelles
Parmi les points qui reviennent, la place des femmes, le gouvernement jugé trop pyramidal ou l’ordination de "diaconesses" ou "prêtresses". Des sujets, des questions, parfois des revendications, qui ne sont pas nouveaux. Et qui semblent opposer deux franges de l’Église de France, depuis le Concile : l’une plus traditionnelle – parfois dans la liturgie aussi mais pas seulement – et l’une plus tournée vers le monde. Avec l’accusation réciproque d’être dans l’entre-soi ou de vouloir se conformer au monde. Rien de nouveau sous le soleil.
Un document a créé la confusion : la collecte nationale. Par la logique même du processus synodal, les fidèles qui y ont participé – et peu avaient en-dessous de 40 ans – ont fait remonter dans les synthèses plusieurs suggestions. Que les laïcs, et notamment les femmes, puissent prêcher à la messe, que des femmes soient ordonnées prêtre ou diacre, que des baptisés élus forment un collège en contre-pouvoir de celui de l’évêque…des propositions qui ont été fidèlement reproduites dans la collecte nationale écrite par l’équipe nommée par la Conférence des évêques de France autour de Mgr Joly.
Pas de jugement théologique
Mais cette collecte, c’est écrit en introduction, n’a pas pour objet de produire un jugement théologique. Elle veut davantage reproduire honnêtement ce que les fidèles catholiques français ont dans leur cœur. Envoyée à Rome, elle sera la contribution de ceux-ci au synode de l’Église universelle. Si les évêques ont voulu l’envoyer sans la modifier, ils l’ont accompagnée d’une lettre, laquelle est déjà le fruit d’un discernement sur ce que le peuple de Dieu qui est en France vit dans l’Église. Parmi d’autres espérances et manquements, ils notent la nécessité de mieux expliciter le mystère de l’Église, sacrement du salut et Épouse du Christ, de faire droit aux souffrances des femmes ou de prendre soin des prêtres. Sans avaliser aucune des idées reproduites dans la collecte. Sans les contredire non plus.
En lisant la collecte, on prend également conscience que les propositions les plus débattues ne sont pas celles mises en avant et qu’elles ne constituent pas la majeure partie du document. Quelques phrases seulement, à côté de paragraphes entiers sur la Parole de Dieu ou le désir de vivre dans l’Église en frères et sœurs et de poursuivre dans l’élan du synode en formant des équipes fraternelles à même de manifester la proximité du Christ pour chacun.
Une participation de... 10% des pratiquants
Dans leur lettre, les évêques de France notent aussi des absences : celle de la mission, alors que c’est la nature même de l’Église de rendre le Christ présent au monde, et la communion, qui, par la grâce de Dieu, relie tous les chrétiens, morts et vivants, entre eux. Des absents aussi : des pans entiers du catholicisme français. Seulement 10% des pratiquants ont participé, ce qui relativise le poids réel des revendications citées chez les fidèles. En même temps, ceux qui ne se sentent pas représentés par la collecte ne se sont pas exprimés…et ils en sont les premiers responsables !