Le 16 juillet 2021, le motu proprio a donc été un choc pour nombre de ceux qui affectionnent la "forme extraordinaire", appellation désormais supprimée. Avant de publier ce texte disciplinaire, le Saint-Père avait lu les conclusions d’une enquête menée par Rome auprès des évêques du monde entier pour évaluer les fruits de Summorum pontificorum. Soucieux de l’unité, il a estimé que celle-ci était menacée autour de la messe, signe et réalisation de la communion ecclésiale.
Les milieux traditionnels désorientés
Le texte, et la lettre aux évêques qui l’accompagne, ont suscité de vives réactions dans les milieux traditionnels. Notamment en France, où ces communautés sont vivantes et missionnaires. Cependant, le motu proprio ne rentrant pas dans les détails, des dubia ont été envoyées à Rome, c’est-à-dire des questions sur la mise en place concrète des décisions.
Les réponses de la Congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements, désormais en charge du dossier, publiées le 18 décembre 2021, ont surpris par leur fermeté. Interdiction de célébrer d’autres offices que la messe selon le missel ancien, impossibilité d’ériger des paroisses personnelles ou de faire la publicité d’une célébration traditionnelle dans une feuille paroissiale, nécessité pour un clerc de demander à son évêque pour assister à un office tridentin… le message est clair : désormais, le missel de saint Pie V est une dérogation, mais la lex orandi (loi de la prière) est celle du concile Vatican II.
Pour les traditionalistes, ces différentes décisions manifestent surtout un manque de connaissance du milieu et des communautés, en France en tout cas.
Les évêques, à qui Traditionis custodes a redonné la maîtrise sur les célébrations traditionnelles, ont ainsi pu prendre des mesures dans leurs diocèses pour appliquer le texte pontifical et faire en sorte que la communion soit mieux manifestée dans la célébration de l’eucharistie. Mais l’incompréhension a grandi quand le pape François, le 21 février 2022, a signé un décret autorisant la Fraternité Saint-Pierre à utiliser l’ancien missel. Cette communauté de prêtres dont le charisme repose sur la célébration tridentine a ainsi reçu confirmation de sa spécificité. Dès lors, certains se sont demandés pourquoi une telle exception, qui pourrait signifier la persistance d’une Église parallèle, était permise.
La réponse du Pape
Pour les traditionalistes, ces différentes décisions manifestent surtout un manque de connaissance du milieu et des communautés, en France en tout cas. Le texte, qui n’est toujours pas traduit en français sur le site du Vatican, semble ainsi estimer que les adeptes du missel tridentin se renferment et sont peu missionnaires. Une idée battue en brèche par le pèlerinage Notre-Dame de Chrétienté. Organisé autour de la Fraternité Saint-Pierre à la Pentecôte, il a rassemblé 15.000 pèlerins, avec une moyenne d’âge de 21 ans… et trois évêques venus les accompagner.
Conscient des incompréhensions et des divisions liturgiques, le pape François a donc essayé de sortir de l’ornière par le haut en publiant, le 29 juin dernier, une lettre sur "la formation liturgique du peuple de Dieu". Il y rappelle que la liturgie est d’abord une rencontre avec le Christ et que l’eucharistie ne doit pas être un lieu de polémiques. Il insiste surtout sur la nécessité de bien célébrer la messe de saint Paul VI, pour ne pas prendre en otage les fidèles mais leur donner ce qui leur est dû.
De façon plutôt nouvelle, le pape François met aussi en valeur l’émerveillement que doit d’abord être la liturgie. Ce n’est qu’avec cette manière d’être que la paix liturgique pourra revenir dans l’Église et porter du fruit, celui que Dieu veut.