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« Votre problème, c’est que vous croyez qu’un père est forcément un mâle », affirmait Emmanuel Macron, lors d’une réception à l’Élysée le dimanche 26 janvier 2020 pour les trente ans de la Convention internationale des droits de l’enfant. Sans s’attarder sur l’emploi du mot « mâle », Emmanuel Macron considère qu’un père n’est pas forcément un homme ; c’est donc qu’il peut être une femme. Cette tendance à rejeter le réel en dénaturant le langage pour imposer de nouvelles idées n’est pas nouvelle.
L’expression politique, souvent idéologique, détourne le sens des mots pour nous faire entrer dans un nouveau monde, dénoncé par George Orwell dans son célèbre roman 1984, où tout est relatif car tout se vaut, où la vérité ne se distingue plus du mensonge, où les mots ont le sens qui leur est attribué tantôt par une loi, tantôt par une minorité, pour faire valoir ou imposer des idées. On assiste à une déconstruction du langage ou un hold-up des mots, pour nous influencer à penser autrement. Et cette manipulation linguistique entraîne notamment une déconstruction du droit, surtout lorsqu’il concerne les personnes, les liens entre les personnes (mariage, filiation), l’origine ou le terme de la vie.
Que signifie désormais le mot « père » lorsqu’il peut être une femme, comme a pu l'affirmer Emmanuel Macron et avant lui Agnès Buzyn, alors ministre de la Santé ? Que signifie le mot « animal » quand on remet ainsi en cause la frontière entre l’homme et l’animal, en autorisant avec le projet de loi Bioéthique la création d'embryons chimères animal-homme ?
Il importe d’être bien conscient des enjeux inhérents à l’utilisation politique de la sémantique.
Que penser du mot « égalité » quand il sert à justifier toujours plus de droits, parfois au profit de quelques-uns ? Du mot « dignité » quand il est utilisé pour faire valoir l’euthanasie ou le suicide assisté ? Quel sens donner au mot « république », tellement rabâché, mis à toutes les sauces, devenant le substantif des politiques en mal d’arguments ? À chaque attentat islamiste, voici le microcosme politique quasi unanime hurlant que « la République est en danger ». Pourtant, ce sont avant tout les hommes et femmes que l'islamisme met en danger, plus que le système républicain. Quand un musulman terroriste tue, il crie : « Allah Akbar », ce qui veut dire : « Dieu est grand », et non pas : « À bas la République » ! Si les dirigeants politiques osaient parler davantage de la « France » plutôt que de la « République », n’aurions-nous pas plus de facilité à comprendre ce que nous sommes et ce qui nous unit profondément ? Si le mot « conservateur » ne renvoyait pas à la notion de « rétrograde, hostile au progrès » mais à l’idée de conservation de certaines valeurs ou habitudes, comme en matière d’éducation des enfants par exemple, le débat public n’en serait-il pas changé ?
Peut-on réellement parler de « loi bioéthique » dès lors que la bioéthique n’a réellement de sens que pour limiter les excès de l’homme et fixer un cadre juridique à la science mais qu'elle devient un prétexte pour soi-disant faire « évoluer » le droit, approuver ce que l’éthique réprouve et donner une bonne conscience au législateur ? Face à la confusion savamment entretenue par ceux qui ont intérêt à ne pas débattre sur les sujets de fond et le sens des mots, il importe d’être bien conscient des enjeux inhérents à l’utilisation politique de la sémantique. Le Hold-up des mots (L’Archipel) a ainsi pour objectif de redonner du sens aux mots. Pas à tous les mots, bien évidemment — il ne s’agit pas d’un dictionnaire —, mais à certains couramment utilisés dans le langage politique et culturel. Pour rebâtir une pensée intelligente et des idées en adéquation avec la réalité, pour redevenir « maître » des mots et ainsi de soi-même, redéfinissons les mots, retrouvons leur sens. Il nous faut parler juste, toujours plus juste. N’ayons pas peur des mots…
Le Hold-up des mots, par Geoffroy de Vries, L'Archipel, juin 2021.