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Tout commence à l'occasion de la restauration des œuvres d'art conservées dans l'église Saint-Nicolas de Givors (Rhône). Riche de plusieurs œuvres remarquables, la ville entreprend depuis plusieurs années une restauration minutieuse de ses trésors d'art sacré. Parmi les chefs-d'œuvre conservés, un tableau illustrant l'Adoration des rois mages.
Attesté dans la petite église depuis 1906 et noirci par le temps, le tableau n'attire pas spécialement l'attention des historiens de l'art jusqu'à ce que l'œil avisé de Benoît Faure-Jarrousson, de la société d'Histoire de Lyon, se penche dessus d'un peu plus près. Sur la toile, il remarque deux signatures : A. Magimel et A. Lagneau. "Nous pensions à l'origine qu'il s'agissait de peintres lyonnais mais nous n'avons rien trouvé dans les archives. C'est en m'intéressant à un autre tableau de l'église, acheté après la Révolution française et provenant d'une église de Paris, que j'ai commencé à fouiller du côté des archives parisiennes", confie le spécialiste à Aleteia. Et que ne fut par sa surprise en découvrant que les noms inscrits sur le tableau ne correspondaient pas à des peintres mais à des commanditaires appartenant à la corporation des orfèvres de Paris !
En effet, le contrat, daté de 1697 et conservé aux archives nationales, stipule qu'Antoine Lagneau et Antoine Magimel ont commandé un tableau au peintre Joseph Vivien (1657-1734) destiné à orner la nef de Notre-Dame de Paris. La confrérie des orfèvres de Paris avait pour usage d'offrir chaque année, de 1630 à 1707, un tableau de grand format à la cathédrale parisienne. La cérémonie qui accompagnait ce don, destinée à la Vierge Marie, se tenait tous les mois de mai. 76 may de Notre-Dame ont été réalisés en tout. Malheureusement, à la Révolution française, les biens de l'Église ont été saisis, vendus et dispersés. Aujourd'hui, 51 Mays conservés ont été localisés. Certains sont exposés dans plusieurs églises de France, d'autres roulés dans les dépôts du musée Louvre à Arras. Le tableau de Jospeh Vivien est le 52e May réalisé pour Notre-Dame de Paris. Représentant l'Adoration des Mages, sa composition était inconnue jusqu'alors. Aucun dessin préparatoire n'a jamais été retrouvé. "Seul un petit croquis très ressemblant dessiné par le peintre Gabriel de Saint-Aubin dans un petit carnet atteste qu'il s'agit bien du tableau", précise Benoît Faure-Jarrousson.
L'on ne sait pas exactement quand cette toile est arrivée à Givors, sa dernière mention se trouve dans le catalogue d’un marchand d’art parisien en 1810. Il n'a plus jamais été localisé par la suite. Comment est-il arrivé à Givors ? On sait que le principal acheteur de la vente de 1810 était le cardinal Fesch, oncle de Napoléon Bonaparte et archevêque de Lyon qui a amassé une collection considérable. La toile, dont la présence est attestée depuis 1906 dans l'église Saint-Nicolas, a pu être installée vers 1820 après la construction de l'édifice ou bien même en 1890 à la suite d'importantes transformations du sanctuaire.
Très abîmé par le temps et les infiltrations, le tableau va désormais être envoyé en restauration et présenté à la commission des Monuments historiques afin de procéder à son classement. Fera-t-il l'objet d'une exposition exceptionnelle ? "L'exposer dans la Notre-Dame de Paris avec d'autres Mays pour célébrer la réouverture de la cathédrale serait symboliquement très fort", conclue l'historien. "Après le dramatique incendie qui a touché la cathédrale Notre-Dame de Paris il y deux ans, retrouver un pan de son histoire à Givors a une saveur particulière" a déclaré Mohamed Boudjellaba, maire de Givors.