Quand un homme marié est appelé au diaconat, se mêle à son oui un autre “oui” : celui de son épouse. Comment ces “épouses de diacre” accompagnent-elles leur époux dans cette vocation, comment le vivent-elles intérieurement ? Aleteia a rencontré deux d’entre elles, Aude et Paule.
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Nicolas et Aude habitent en Alsace, sont mariés depuis quinze ans et parents de quatre enfants âgés de 4 à 14 ans. Nicolas, comptable, a été ordonné diacre le 26 septembre 2020. Paule et Jean-Paul résident quant à eux dans la Meuse et sont mariés depuis 37 ans. Jean-Paul, ancien horticulteur, a été appelé au diaconat par surprise, après une vie déjà bien remplie. Si Aude a été convaincue très tôt, pour Paule le cheminement a été plus long.
“Dénoncé” par un prêtre, Jean-Paul a reçu une lettre de l’évêque du diocèse lui demandant de réfléchir à un éventuel diaconat. Si ce dernier a reçu cette lettre comme un appel, le cheminement a été plus long pour son épouse : “Ayant été éduquée à l’ancienne, dans le sud de la France, il me semblait évident de suivre la décision de mon mari, sans rien y trouver à redire. Au cours d’une des nombreuses retraites que nous avons pu vivre pendant les années de discernement de Jean-Paul, à Manrèse chez les Jésuites, j’ai compris que je devais également prononcer un “ou” tout à fait personnel et non pas un “oui” de soumission à la volonté de mon époux.” Chez Aude et Nicolas, le projet du diaconat a été pris comme un appel familial. Au cours d’un repas paroissial, le prêtre a évoqué l’idée à Nicolas, qui a fait son chemin et a particulièrement résonné aux oreilles d’Aude.
Se préparer, ensemble, au diaconat
Les années de discernement avant l’ordination sont l’occasion de nombreux temps d’échanges, de retraites et de partages avec d’autres diacres et “femmes de diacres”. Aude, très vite, a senti qu’elle devrait faire sienne cette vocation en couple du diaconat et se détacher des expériences des autres pour construire la leur, bien à eux. Si la jeune femme a écouté les témoignages et les appréhensions des autres couples avec intérêt, elle a pris soin de recevoir l’expérience des autres mais de ne pas la faire sienne, pour ne pas endosser des inquiétudes qui ne sont pas les leurs. Forte de cela, Aude a su très vite poser un cadre : apprendre à dire non, comprendre que les journées n’auront toujours que 24 heures et qu’il faudrait donner une priorité chaque jour à différents pans de leur vie, que ce soit professionnels, paroissiaux ou familiaux.
Paule de son côté a beaucoup apprécié l’accompagnement prévu pendant les années précédant le diaconat : “Nous avons été accompagnés par un groupe de proches, amis, paroissiens, moines, qui nous ont permis de cheminer ensemble vers l’engagement que nous allions prendre ensemble. J’avais quelques craintes comme celle d’aller à la messe sans mon mari. Cela parait anodin mais c’était une réelle souffrance pour moi d’imaginer y aller seule avec mes enfants et de ne pas être assise à côté de lui. Le Seigneur est bon car finalement je reçois chaque messe comme une grâce, je me sens unie par la prière avec lui et suis infiniment touchée, inlassablement, de le voir en habits à l’autel.”
Un quotidien prenant mais rempli de grâces
Chaque diacre est investi d’une mission bien particulière. Celle de Nicolas, l’époux d’Aude, concerne le baptême et la vie au sein de l’église. Un diacre officiait déjà au sein de leur paroisse, ce qui permet à Aude de bénéficier de la précieuse expérience de Micheline, l’épouse du diacre déjà en fonction. Si la jeune femme a toujours été engagée au sein de sa paroisse en tant que catéchiste auprès des enfants, elle endosse aujourd’hui un rôle nouveau, tacite mais qu’elle prend très à cœur : l’écoute et le témoignage auprès de paroissiennes ou de mères de famille à l’école qui viennent la voir afin d’échanger autour de la foi, de leur vie de femmes et de mères catholiques. Aude en témoigne : “Si je n’étais pas devenue la “femme du diacre”, ces échanges si précieux n’auraient peut-être jamais eu lieu. J’en suis très touchée et nourrie au quotidien dans ma foi.”
Mon oui le jour de son ordination a été un vrai “oui”, sorti au forceps mais un vrai “oui” !
La mission de Jean-Paul est davantage tournée autour du sens de l’accueil de l’autre. Au sein de leurs chambres d’hôtes Saint-Joseph des Tassons, ils cultivent leur sens de l’hospitalité comme ils le précisent sur leur site internet : “Mieux qu’un hôtel, c’est vous que nous avons le plaisir d’accueillir.” Paule nous explique dans un sourire qu’en théorie “le sacrement premier reste celui de notre mariage, mais dans les faits je le ressens différemment. L’engagement de mon mari prend une place extrêmement importante dans notre vie aujourd’hui. Cependant mon oui, le jour de son ordination, a été un vrai “oui”, sorti “au forceps” mais un vrai “oui” ! Et il l’est toujours, je suis très émue devant l’engagement de mon mari. J’ai également pu, grâce à lui et à notre récitation en couple de la prière des Laudes, découvrir la beauté des Psaumes, très peu connus plus jeune, ayant reçu une éducation spirituelle très traditionnelle.”
Les enfants d’Aude, encore jeunes, ont posé des questions très pragmatiques lors de l’ordination de leur père : “Est-ce qu’il sera toujours présent à la maison ? Est-ce qu’il va devenir prêtre?”. Questions auxquelles les parents ont pu répondre sans trop de difficulté afin que chacun accueille sereinement ce nouvel engagement de leur père. Ceux de Paule et Jean-Paul, déjà adultes, ont souhaité témoigner de l’exemple de foi qu’avaient été leurs parents lors de leur jeunesse. Chacun des enfants, ainsi que leur “enfant adoptif de cœur”, a dessiné un motif pour les étoles de leur père. “La démarche était aussi symbolique que touchante, témoigne Paule. Nos enfants ont témoigné de l’émotion qu’ils avaient plus petits devant leur père, à genou, lors de la prière chaque soir. Avoir un retour sur leur vie de prière familiale a été formidable pour moi, très émouvant.”
Une confiance en la Providence et une reconnaissance des grâces reçues
Pour Paule, la vie de “femme de diacre” n’a pas été anticipée mais accueillie dans la grâce et la confiance. Si elle reste volontairement en retrait de la vie paroissiale, aujourd’hui ses mots d’épouse en disent long : “Le jour de son ordination reste un moment inoubliable pour moi, si émouvant ! Ces quatre dernières années m’ont vraiment ouvert le cœur ! Mon mari est une belle âme et il me rend meilleure.”
De son côté, Aude est encore dans une découverte de ce nouveau pan de sa vie, Nicolas ayant été ordonné fin 2020 dans un contexte de pause paroissiale, mais pas pastorale pour autant. Elle a été très marquée par la visite de son époux à une dame dont le mari était hospitalisé. La joie de cette dame et le réconfort permis par cette attention a été un beau cadeau pour tous. Comme en témoigne la jeune femme, “cette disponibilité improvisée, adaptée au quotidien, est possible aussi parce que ses missions se vivent en paroisse, ancrées dans notre réalité familiale.” Si elle ressent, comme Paule, une pointe au cœur à l’idée d’aller à la messe sans être physiquement aux côtés de son mari, Aude témoigne avec une joie palpable de sa nouvelle vocation de femme et d’épouse.
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