La maison Christie’s présentera aux enchères le 24 novembre prochain un fabuleux bénitier en corail de Trapani du XVIIe siècle. Véritable produit de luxe, le corail est, à cette époque, apparenté au sang du Christ dans l’iconographie chrétienne.
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“Dans la dense bibliographie consacrée aux ouvrages des XVIIe et XVIIIe siècle, pas un exemple recensé ne peut rivaliser en harmonie, en taille et en maîtrise”, explique la maison Christie’s, chargée d’organiser la vente d’un formidable bénitier en corail.
Réalisé en Sicile dans la première moitié du XVIIe siècle, ce bénitier est unique, tant par sa forme que par les matériaux utilisés. Simulant la façade d’une église baroque de la Contre-Réforme, son décor, constitué de différents rinceaux, guirlandes, colonnettes et putti, est entièrement réalisé en corail de Trapani — petite ville en bord de mer sur la côte ouest de la Sicile — sur un fond en cuivre doré. Au centre, le Dieu rédempteur abrité dans sa niche centrale se déploie dans une gloire dorée associée sur un fond de lapis lazuli.
Un ouvrage de dévotion privé
Pour la Maison Christie’s, ce bénitier, ouvrage de dévotion personnel, est sans aucun doute le plus beau jamais présenté. “Il faut comprendre pour apprécier la beauté de cette œuvre que le corail est, à l’époque des ateliers trapanais, un matériau magique”.
Pour comprendre, il faut remonter à l’époque d’Ovide, qui nous explique la naissance du corail. Le poète raconte que lorsque Persée décapita la Gorgone Méduse, le sang qui coula de sa tête fut pétrifié et changé en corail. Avec le temps, l’iconographie chrétienne s’approprie cette image : suivant le glissement fréquent du mythe antique au mystère chrétien, le corail devient dans l’iconographie catholique symbole du sang du Christ et de la Rédemption.
À partir de là, des propriétés miraculeuses lui sont attribuées. Utilisé en talisman, on lui prête volontiers une fonction apotropaïque mais on lui reconnaît aussi le pouvoir de résoudre les problèmes de saignement et de fertilité, et même de détecter le poison dans la nourriture.
Ainsi, du fait de sa rareté et de ses vertus, le corail devient un des matériaux les plus appréciés pour la création d’objets d’art, qu’il soit utilisé dans sa forme naturelle ou sculpté. La petite ville de Trapani, qui excelle dans l’art du corail, devient l’un des principaux ports commerciaux de la Méditerranée. Si les commanditaires profanes s’intéressent à ce matériau, le clergé n’est pas en reste et commande crucifix, monstrances, objets, vêtements liturgiques, bénitiers et autels pour enrichir les trésors de son église.
Si l’on ignore à qui était destiné le bénitier présenté, sa rareté et la grande maîtrise de l’artiste qui l’a réalisé en font une pièce maîtresse de l’art sacré du XVIIe siècle. Il est aujourd’hui estimé entre 100.000 et 200.000 euros.
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