Aleteia : Fleur, nous vous connaissons comme sculpteur et pour les aménagements d’églises comme celui de la basilique de Saint-Avold. En cette rentrée nous découvrons vos bijoux d’artistes. Racontez-nous cette nouvelle aventure !
Fleur Nabert : Cette aventure a commencé pendant le confinement. J’étais à la maison avec mes trois petites, tous mes chantiers de sculpture, de mobilier, de vitraux étaient arrêtés et j’avais un besoin vital de créer. J’ai trouvé la même liberté de rêver dans le moule de trois centimètres d’un médaillon que dans tout un chœur. C’est la même quête passionnée et lumineuse pour essayer de donner un visage à Dieu, une forme à la grâce. Ce qui est né de la contrainte est devenu un fruit de la Providence. Puisque j’habille les murs de nos églises il fait sens que j’habille "les temples de l’Esprit" (saint Paul) que sont nos corps. Moi-même j’ai toujours cherché dans les boutiques des sanctuaires des bijoux qui reflètent ce que mon cœur avait vécu et me le rappelle dans le quotidien. Pour moi un bijou est à la fois une souvenance et un témoignage, le signe de quelque chose que l’on aime et que l’on montre aux autres pour le partager. J’ai bien sûr ma médaille de baptême, mais j’ai toujours eu du mal à trouver d’autre « célébrations » de la vie chrétienne, qui soient à la fois belles à porter, spirituelles, élégantes et féminines. Alors je les ai créées !
Et votre source d’inspiration numéro un, c’est Thérèse de Lisieux, dont c’est d’ailleurs la fête le 1er octobre ?
Thérèse est une amie chère. Elle est venue me chercher un jour, au pied d’un grand bronze de trois mètres que j’inaugurais à la mutuelle Saint-Christophe, en la personne du père Lagoutte, le recteur de Lisieux à cette époque. Il me demanda de refaire du sol au plafond la chapelle Notre-Dame du sourire. À cette occasion, je rencontrais vraiment Thérèse par ses écrits et découvrais non pas l’image d’Épinal que j’en avais mais une âme audacieuse que les rayons du ciel traversent librement. Et notre histoire d'amitié n’a pas cessé depuis. J’ai également créé pour elle le cloître de la miséricorde à Lisieux, un reliquaire familial avec ses parents qui est aux États-Unis, et un autre qui est à la basilique Saint-Avold. À chaque fois j’ai travaillé pour essayer de mettre en image sa spiritualité : un mélange de force, de tendresse, de simplicité, d’humilité et de féminité. Car oui, Thérèse est vraiment un cœur de jeune femme et même de mère tant sa fécondité spirituelle est immense de par le monde, et pour les femmes elle est une belle amie… à appeler souvent !
Mais comment met-on tout cela dans un bijou ?
Je l’ai simplement prise au mot ! Au sens strict : j’ai repris ses mots. Quand je créais mes bijoux dans le petit matin, j’ai réentendu cette phrase : "Après ma mort je ferai tomber une pluie de roses". Qu’est-ce que cela veut dire ? C’est une promesse d’intercession. Se confier à Thérèse dénoue certaines des difficultés de la vie. Oh non, pas magiquement parce qu’elle jetterait un sort depuis le ciel. Ce n’est pas Harry Potter ! Mais parce qu’elle nous aide à remodeler nos cœurs et à changer de regard sur nos vies. Il n’y a aucune magie, il y a simplement une écoute plus attentive de la Providence à son école, une paix du cœur qui se met en place et nous fait vivre ce que dit le psaume 130 : "Je tiens mon âme égale et silencieuse ; mon âme est en moi comme un enfant, comme un petit enfant contre sa mère". Je crois à l’efficacité de Thérèse… pour nous transformer. Alors ces bijoux, tous inspirés de ses paroles, sont des rappels et des encouragements à nous abandonner à sa conviction : "Tout est grâce". Ces pétales de roses qui volent librement dans la résine, ces feuilles d’or qui rayonnent le murmurent tous les jours à nos oreilles. En tant qu’artiste, je ne sais pas fabriquer d’objet, même beau, qui serait dénué de sens. Je travaille la matière pour la transcender par la profondeur de ce qu’elle va signifier.
Selon la formule célèbre vous pensez que la beauté sauvera le monde ?
Non. L’amour seul. Mais la beauté est pour moi la trace sensible de Dieu dans le monde. Le beau est le signe du vrai et l’éclat, le sourire du bien. J’en ai fait une expérience forte par un autre biais pendant le confinement : j’avais travaillé avec les éditions Magnificat aux choix des œuvres d’art pour le livre Osez entrer dans la vie éternelle de Pierre-Marie Varennes. Ce livre est un OVNI, il est unique. C’est une retraite de vie intérieure à faire chez soi… qui pendant le confinement a pris un sens décuplé.
Vous travaillez souvent avec Magnificat ?
J’ai la joie d’y écrire les commentaires d’œuvres sculpturales et de participer à certains événements artistiques, notamment les Magnificat Days qui ont lieu aux États-Unis. Et c’est ma famille de cœur. Quand j’ai trouvé la foi il y a des années, Magnificat était dans ma poche le matin quand je montais la rue Soufflot, une petite flamme qui rayonnait sans s’éteindre alors que j’étais dans la mâchoire des classes prépa !
Et quels sont les projets des mois à venir ?
Ils sont nombreux ! Le cœur de mon travail reste la sculpture que ce soit en bronze, en bois ou en verre via les vitraux thermoformés. En ce moment, il y a de l’ouvrage sur le métier : un Christ en gloire et un tabernacle en Moselle, tout un ensemble liturgique en lien avec un orgue contemporain extraordinaire dans un village aux pieds des Alpes, un projet de grandes portes en verres sculptées pour créer une chapelle de semaine, l’envie de créer des icônes de verres et puis l’émotion rare d’avoir remporté le concours pour créer la statue du roi Saint Louis sur la façade arrière de l’église Saint-Louis-des-Français à Rome. Je me sens toute petite face à cette demande, mais j’y mettrai toute mes forces pour que mon cœur fasse son chemin, par mes mains, vers la matière et qu’elle se mette à rayonner.
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