Journaliste et peintre, Caroline Montsarrat a toujours pensé qu’elle n’aurait jamais la foi… jusqu’au jour où sa vie a basculé. Elle a décidé de tout quitter pour rejoindre les sœurs franciscaines de Cracovie. Il y a tout juste un an, sœur Elia a prononcé ses vœux perpétuels. Récit de sa rencontre bouleversante avec Dieu.
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“Comme dans ma famille personne ne croyait en Dieu, on n’en parlait pas, j’avais à l’époque une image de ce monde très caricatural : les femmes, toutes les mêmes, jupe plissée bleu marine et serre-tête… Alors, je me disais que jamais, je n’aurais la foi”, raconte sœur Elia à Aleteia. Aujourd’hui, elle semble encore étonnée et émerveillée à la fois par sa progressive conversion spirituelle, événement personnel qui a radicalement changé sa vie. Elle qui pensait travailler comme journaliste pour l’hebdomadaire régional du Val d’Oise et continuer de vivre à fond ses deux grandes passions : la peinture et la quête d’expériences exceptionnelles…
Le jour où tout bascule
Cheveux violets, piercing à la lèvre, Caroline, 19 ans est encore étudiante dans une école d’art. Elle peint, se passionne pour la photographie, part en voyages aux quatre coins du monde. Issue d’une famille d’artistes dans laquelle Dieu n’existe pas, tout ce qui touche de loin ou de près à la religion ne l’attire pas du tout.
Un jour, je ne sais pas comment, Dieu m’est venu à l’esprit. J’ai conclu un marché avec lui : “Si tu me fais sortir de là, je ferais en sorte d’apprendre à te connaître” raconte-elle.
Mais un jour Caroline voit sa vie basculer. En 2003, toujours en quête d’aventures et de rencontres insolites, elle part en Inde pour découvrir de nouveaux horizons. Seulement, au bout de quelques semaines de voyage, elle doit se faire opérer en urgence à New Delhi. “Là-bas à l’hôpital, je me sentais très mal, je fixais juste du regard le mouvement du ventilateur de ma chambre sans réfléchir. Un jour, je ne sais pas comment, Dieu m’est venu à l’esprit. J’ai conclu un marché avec lui : “Si tu me fais sortir de là, je ferais en sorte d’apprendre à te connaître”, raconte-elle. Pensée furtive que Caroline oublie aussitôt…
De retour en France, son état ne s’améliore pas. Caroline a besoin impérativement de soins à domicile. Inquiète, sa mère Patricia cherche une infirmière disponible. Elle finit par appeler des religieuses polonaises qui sont en charge d’un centre de soins à Montmorency en pensant qu’une religieuse acceptera de soigner quelqu’un de non-croyant. Nous sommes le 25 août, sœur Gabriela sonne pour la première fois à la porte de Caroline. “Au début, je la regardais avec beaucoup de méfiance. Je l’observais en silence et de loin, sans vouloir répondre à ses questions, par peur qu’elle tente de me convertir”, raconte Caroline. Mais avec le temps, elle est de plus en plus intriguée par cette sœur toujours souriante, qui manifeste beaucoup d’intérêt pour ses tableaux à chacune de ses visites.
Cette découverte était vertigineuse : je ne savais pas comment accueillir l’amour de Dieu à bras ouverts en ayant 19 ans de vide derrière soi…
“C’est ainsi que Dieu a souhaité me toucher, lorsque je ne m’y attendais pas. Je n’ai pas rencontré Dieu en haut d’une montagne, ni même au milieu d’un désert. Je l’ai rencontré au cœur de ma vie quotidienne, comme s’il était niché en moi depuis toujours. Je l’avais cherché trop loin, mais jamais au fond de moi”, s’exclame-t-elle encore bouleversée. Pour elle, cet apprivoisement sera lent, rempli de doutes, de découragements, de certitudes aussi, de joies et d’émerveillement. Les rencontres avec sœur Gabriela deviennent essentielles, Caroline la bombarde de questions. Au fur et à mesure qu’elle tente d’y répondre, le chemin s’éclaire… “J’ai entendu en moi comme une Promesse. Elle m’indiquait un chemin où la liberté pouvait se gagner dans la découverte de Dieu… Seulement, cette découverte était vertigineuse : je ne savais pas comment accueillir l’amour de Dieu à bras ouverts en ayant 19 ans de vide derrière soi”, se rappelle Caroline. Pour elle, se laisser aimer est tout aussi difficile qu’aimer. Comme croire à l’amour d’un être invisible et insaisissable. Elle “résiste” deux ans avant de demander le baptême.
Elle est finalement baptisée lors de la veillée pascale, en la Collégiale Saint Martin de Montmorency. Émue, la jeune femme n’entend pas le prêtre la baptiser au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit. Mais en relevant la tête, elle a la conviction qu’elle vient de “revêtir le Christ, avec cette envie irrésistible de le suivre jusqu’au bout”, confie-t-elle. Dans sa famille où elle est la seule baptisée, Caroline vit une certaine incompréhension, elle sent que ses proches ont besoin de temps pour apprivoiser sa “nouvelle vie”. Ses amis ne comprennent pas toujours sa conversion. Lorsqu’elle en perd beaucoup, elle en retrouve d’autres. En même temps, ses relations avec ses proches s’apaisent. “Je n’avais plus besoin de provoquer, de partir loin. C’était comme un retour aux sources” confie-t-elle.
À Cracovie, le temps du discernement
Journaliste depuis un an pour l’hebdomadaire local l’Echo Régional, Caroline vit pleinement sa foi. Ses collègues sont ravis de lui demander de couvrir toutes les manifestations religieuses. Tout semble vouloir s’harmoniser entre sa vie professionnelle et spirituelle. Cependant, la jeune femme décide de quitter son travail et partir un an en Pologne. Les religieuses polonaises du centre de soins de Montmorency y sont-elles pour quelque chose ? Caroline est aussi motivée par la volonté d’apprendre la langue et de découvrir l’Église de ce pays qu’elle trouve jeune et dynamique.
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Elle veut surtout profiter aussi de cette année sabbatique pour discerner ce à quoi Dieu l’appelle. Avec quelques économies en poche, Caroline arrive à Cracovie où elle s’inscrit aux cours de polonais de l’Université Jagellonne. « Cette année a été décisive pour moi. Tout naturellement, je me suis rapprochée de la communauté des sœurs franciscaines de Notre-Dame des Douleurs : les mêmes sœurs que celles qui sont venues me soigner en France cinq ans plus tôt. C’est cette congrégation qui a créé deux communautés en France dont une là où je vivais, à Montmorency”, explique Caroline.
La décision est prise un an plus tard : en 2010, la jeune femme entre chez les sœurs franciscaines de Notre-Dame des Douleurs pour une année de candidature à Cracovie. Elle ne dit rien à ses parents…
Mais la vie des sœurs en Pologne est tout à fait différente. Caroline y rencontre beaucoup de jeunes religieuses profondément heureuses d’être consacrées à Dieu. Tous les jours elle passe les voir, elle améliore son polonais à leur contact, prie avec elles tout en affirmant son désir de se consacrer à Dieu. La décision est prise un an plus tard. En 2010, la jeune femme entre chez les sœurs franciscaines de Notre-Dame des Douleurs pour une année de candidature à Cracovie.
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Elle ne dit rien à ses parents qui, certainement, s’opposeraient à sa décision. Ils croient plutôt qu’elle est partie vivre en Pologne, sans qu’ils se doutent de ses intentions profondes. C’est seulement au bout de deux ans, avant son entrée au noviciat et sa prise de voile, qu’elle décide de leur annoncer la nouvelle. “Ma mère, raconte Caroline, a juste conclu : “De toute manière, si tout a commencé, c’est de ma faute. C’est moi qui ai appelé la sœur infirmière. Donc je ne peux pas t’en vouloir !” Aujourd’hui, c’est même elle qui me coud mes robes”.
Caroline devient Sœur Elia
Depuis ses premiers pas de cette nouvelle vie, la jeune religieuse ne cesse de questionner Dieu pour savoir pourquoi Il l’a plongée dans toute cette grâce. Pourquoi Il a voulu qu’elle le cherche sans relâche, et pourquoi Il lui a permis de surmonter autant de doutes. Aujourd’hui elle sait qu’elle n’aura jamais de réponse précise à toutes ses interrogations. “La foi est une telle lumière qu’elle s’accompagne souvent d’une obscurité angoissante”, reconnaît-elle. La raison pour laquelle la jeune sœur est tentée à un moment de tout arrêter, de revenir en arrière. La vie sans le Christ lui paraît parfois plus tranquille. “Mais en fait, Jésus appelle-t-il à l’assoupissement ?”, se demande sœur Elia. En fait, ses doutes l’aident à faire grandir sa foi. Ils l’aident à croire, sans remettre en cause l’existence de Dieu dès qu’elle ne le sent plus à ses côtés.
Dieu n’est pas toujours dans ce qu’il y a d’exceptionnel comme ce que j’ai pu vivre lors de ma conversion. Souvent, il se cache dans ce qu’il y a de petit et de silencieux.
Quelques années avant ses vœux perpétuels qui ont lieu en 2019, sœur Elia découvre Marie, un peu par hasard. La veille de son départ à Varsovie pour y commencer un master en théologie, elle trouve une vieille statue de la Vierge dans la cave de la maison générale de Cracovie. “J’ai su qu’il fallait que je la prenne avec moi. En réalité, c’est elle qui m’a trouvée, comme elle avait cherché à le faire depuis mon enfance. C’est elle qui m’a doucement préparé à mes vœux perpétuels, grâce à des retraites mariales, mais surtout aussi en me montrant que Dieu n’est pas toujours dans ce qu’il y a d’exceptionnel comme ce que j’ai pu vivre lors de ma conversion. Souvent, il se cache dans ce qu’il y a de petit et de silencieux”, confie sœur Elia.
Les vœux perpétuels de sœur Elia ont lieu le 15 septembre 2019, jour où l’on commémore Notre-Dame des Douleurs. Ce jour-là, la Congrégation des Franciscaines de Notre Dame des Douleurs célèbre sa fête patronale. Pour sœur Elia, c’est un signe supplémentaire que Marie veille sur elle. Les vœux se déroulent à la Collégiale Saint Martin de Montmorency en France, en présence de la famille entière de Caroline réunie pour l’occasion, d’amis et d’une trentaine de sœurs, certaines venues de Pologne.
“Un long moment je me suis demandée où prononcer mes vœux, en Pologne ou en France. Mais lorsque la litanie des Saints a retenti, au moment où je me suis prosternée aux pieds de l’autel, là où précisément quelques années plus tôt je plongeais la tête dans le baptistère, j’ai su que j’appartenais à l’Église de France. Car malgré ses crises et ses difficultés, c’est là que Dieu a choisi que je naisse et que je grandisse. C’est au sein de cette Église que j’ai découvert ma vocation et que je souhaite l’accomplir”, souligne sœur Elia. Désormais, sa nouvelle vie est habitée par une confiance inébranlable en Dieu. “Voilà quelques années que je suis devenue enfant de Dieu. Pas un seul jour ne passe sans que je me réveille en pensant à Jésus. Ma foi est comme la sève d’un arbre. Elle m’aide à grandir, à me tenir droite. Dieu m’a mise debout”, conclut-elle.
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