Durant les premiers siècles, l’Église ne rend pas de culte particulier à saint Joseph car elle choisit des patrons et des modèles dont le caractère répond aux épreuves qu’elle traverse : la lutte face au paganisme et aux hérésies. Ainsi, l’accent est davantage mis sur les martyrs, témoins héroïques de la foi, et sur les apôtres, symbole de l’unité catholique.
Le développement du culte de saint Joseph a pour point de départ les croisades et les pèlerinages en Terre Sainte. En effet, à Bethléem et à Nazareth, les souvenirs de saint Joseph sont prégnants, intimement mêlés à ceux de Jésus. A la suite de cette dévotion populaire débute un travail liturgique et théologique. Le père adoptif du Christ est particulièrement honoré dans le monachisme, notamment chez les franciscains et les dominicains.
La France joue un rôle important dans le développement du culte à saint Joseph. Au XVe siècle, le théologien Jean Gerson, qui s’est placé très jeune sous le patronage du saint, œuvre particulièrement pour promouvoir son culte. Il compose le premier livre écrit en l’honneur de Joseph et, lors du concile de Constance (1414-1418), il plaide en faveur d’une solennité nouvelle, pour qu’une fête propre lui soit dédiée. La fête de saint Joseph est alors inscrite au missel romain.
Si les guerres de religion freinent l’expansion de cette dévotion en France, il n’en est pas de même pour l’Espagne, où sainte Thérèse d’Avila lui donne une impulsion décisive. Particulièrement attachée à l’image toute paternelle de Joseph, elle l’invoque et le prie sans cesse ; il est son soutien dans toutes ses tribulations. Sur les dix-huit monastères qu’elle fonde, treize portent le nom de saint Joseph. Lors d’une de ses extases, la sainte Vierge Marie lui révèle le plaisir qu’elle prend à l’entendre invoquer son époux Joseph.
Au début du XVIIe siècle, les papes Grégoire XV et Urbain VIII rendent la célébration de la solennité de saint Joseph obligatoire pour toute la chrétienté, la fête est alors fixée au 19 mars. Quelques années plus tard, au mois de juin 1660, saint Joseph apparaît à un jeune berger assoiffé, près du village de Cotignac, et lui indique une source miraculeuse. L’apparition est immédiatement reconnue par l’évêque du lieu, et les pèlerinages se multiplient. Depuis plusieurs années déjà, la Cour de France prend une part active à cette dévotion, d’autant plus que Bossuet exalte, avec le talent oratoire qu’on lui connaît, la mission terrestre de Joseph, gardien d’un dépôt sacré, l’Enfant-Dieu. Ce sermon, prononcé devant Anne d’Autriche, reine très pieuse et mère du jeune Louis XIV, est particulièrement remarqué. Le 10 mars 1661, après la mort du cardinal Mazarin, débute ce que les historiens appellent le règne personnel de Louis XIV. Une des premières décisions du roi est de décréter que le 19 mars, jour de la fête de saint Joseph, serait désormais un jour chômé dans tout le royaume de France. Bossuet prononce alors un second sermon sur les vertus de saint Joseph, panégyrique dans lequel il remercie le roi pour cette marque d’honneur rendue à l’époux de la Sainte Mère de Dieu.
La Révolution française supprime toutes les festivités et jours fériés liés aux fêtes religieuses ; et au XIXe siècle, les différents gouvernements ne restaurent pas la célébration temporelle de la fête du 19 mars, même si la dévotion à saint Joseph redevient très vigoureuse en France, en raison de la place toute spéciale qu’il a eu sur la terre. En effet, Joseph a partagé avec Marie les premiers sourires et les premières caresses de Jésus, il a eu la possibilité de le cajoler aussi souvent qu’il le voulait, de vivre dans une intimité de tous les instants. Dieu lui a confié son Fils, et en même temps qu’Il lui demandait d’assumer toutes les charges d’une vraie paternité, Il lui en conférait toute l’autorité et tous les droits. La paternité de Joseph s’est exercée pleinement sur Jésus ; mais elle s’étend également aux autres enfants de Marie, c’est-à-dire à l’humanité toute entière. C’est pourquoi saint Joseph a une place toute spéciale au ciel. Le pape Pie IX l’a bien reconnu, lui qui décréta saint Joseph patron de l’Église universelle, le 8 décembre 1870.
Outre cette glorieuse paternité, l’Église confia à saint Joseph beaucoup de missions. Si celles de patron des artisans et des familles sont bien connues, celles de patron des éducateurs, de la bonne mort et de la vie intérieure sont parfois plus ignorées. Elles correspondent pourtant bien aux vertus que Joseph a pratiquées durant sa vie. Ayant été chargé par Dieu de veiller sur son Fils, de le défendre, de l’élever, Joseph reçut des grâces particulières pour s’acquitter de cette mission. D’autre part, sa douce et belle mort, entouré de Jésus et Marie, invite les fidèles à demander la grâce du bien mourir. Enfin, saint Joseph est un parfait modèle de vie intérieure de l’âme, en raison de sa grande union spirituelle avec les cœurs de Jésus et Marie, au sein de la Sainte Famille.
Saint Joseph fait partie des quelques saints à avoir deux fêtes : le 19 mars, qui est sa fête principale, et le 1er mai où nous sommes invités à contempler le travailleur Joseph. En effet, en 1955, le pape Pie XII a institué le 1er mai la fête de Saint Joseph artisan. Il s’agit d’une fête spécifique : une fête du travail sanctifiée, construite autour d’un des aspects de saint Joseph : son activité professionnelle.