Avec Loupio, jeune orphelin troubadour à la mèche rebelle et au caractère attachant, le dessinateur et scénariste Jean-François Kieffer évangélise sans en avoir l’air depuis 24 ans que sa série existe. A l’occasion de la sortie de son dernier album, Les Archers et autres récits (tome 11), Aleteia est allé à la rencontre du père du jeune trouvère à la rouge houppelande, musicien et poète lui aussi.
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Père de quatre enfants, grand-père de cinq petits-enfants, diacre permanent dans le diocèse de Verdun (Meuse), engagé dans la pastorale familiale et conjugale, Jean-François Kieffer, 61 ans, trouve encore le temps et l’inspiration pour créer des bandes dessinées et composer des contes musicaux, à l’instar de son personnage fétiche, Loupio, jeune trouvère du Moyen-Age, ami de Saint François d’Assise. Entretien avec un troubadour des temps modernes, qui joue du sistre irlandais et raconte des histoires, qui, même si elles ne le clament pas haut et fort, se nourrissent de l’Evangile et de la spiritualité franciscaine.
Aleteia : Comment est né le personnage de Loupio ?
Jean-François Kieffer : C’était en janvier 1995, donc il y a bientôt 24 ans, au Festival de la bande dessinée à Angoulême. J’avais participé à une exposition sur saint François d’Assise, car je rêvais de faire une BD sur lui. Un évêque nous a interpellés en nous demandant pourquoi il n’existait pas de fiction chrétienne en bande-dessinée. C’était vrai ! Il y avait des vies de saints, des Bibles, mais pas de fiction ! Cette interrogation a résonné en moi car elle faisait se rejoindre deux désirs profonds que j’avais à l’époque : créer mon héros, comme d’autres avaient créé Tintin ou Lucky Luke, et faire un album sur saint François d’Assise. C’était la formule magique ! Les Aventures de Loupio ont d’abord paru dans la revue Louveteau des Scouts de France, puis dans le journal pour enfants Maximilien, avant d’être publiées sous forme d’album en septembre 2001.
À travers les onze tomes de Loupio, que cherchez-vous à transmettre à vos jeunes lecteurs ?
Au début, je cherchais à transmettre les valeurs du scoutisme, de saint François d’Assise et de l’Évangile. Les premières bandes dessinées ont un but quasi catéchétique. Puis au bout d’un moment, je me suis senti un peu prisonnier de cette forme. Même mes enfants me disaient : « Oh je sais, à la fin, ils vont tout partager, ils vont se pardonner, Alleluia ! » Je me suis rendu compte que cela touchait des lecteurs déjà sensibilisés à la foi chrétienne. J’ai voulu alors m’adresser aux autres ! J’ai abandonné les références bibliques systématiques. Et j’ai créé une BD tout public, qui certes s’inspire des valeurs de l’Évangile, mais pas de manière explicite, afin de ne pas décourager ou effrayer de potentiels lecteurs. J’avais en tête de pouvoir répondre à la demande des grands-parents qui, sur les lieux de dédicaces, ouvraient mon Évangile pour les enfants et me disaient : “Nous ne pourrons pas l’offrir à nos petits-enfants, ça ne “passera” pas”. Désormais, je peux proposer : « Commencez par leur offrir les tomes 4 (Le Tournoi) ou 9 (L’incendie) de Loupio, ils vous demanderont la suite ! » Je ne suis plus dans l’homélie, mais plutôt dans le témoignage de rue !
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En quoi le dernier Loupio, qui arrive quatre ans après le tome 10, se différencie-t-il des albums précédents ?
Déjà, il s’adresse à tous les enfants, quel que soit leur rapport à la religion. Il y a tout de même, à la fin, un cantique sur la Nativité, mais l’histoire relate avant tout un concours d’archers au Moyen Age. Pour l’anecdote, un enfant du coin, à qui j’avais donné le tome 10, Vers Jérusalem, dont la couverture montre une croix sur un étendard, me l’a rendu en disant : « Il ne nous plaît pas, celui-là ! », sous-entendu il ne convient pas aux parents. Je lui ai tendu le dernier en lui précisant que celui-ci parlait d’archers, et il a répondu « super ! ». Il était temps que le tome 11 arrive !
Et cet album est un clin d’œil à mes lectrices, parce que j’entends souvent : « Loupio, c’est pour les garçons ! » Non ! Dans ce tome, Loupio est au second plan, dans les histoires et sur la couverture, et c’est Joana, cette jeune bagarreuse avec un côté un peu Jeanne d’Arc, qui fait tout !
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Vous n’êtes pas uniquement le père de Loupio, mais aussi celui de Jeannette et Jojo, une BD qui paraît depuis 2012. S’adresse-t-elle au même public que celui de Loupio ?
Non, pour le coup, c’est une BD complètement profane, à travers laquelle j’ai voulu rendre hommage à ma région d’adoption, les Côtes de Meuse. J’y mets en scène mes voisins lorrains, meusiens, les gens de mon village… La maison de Jeannette et Jojo, c’est la nôtre, le village de Jeannette et Jojo, c’est le nôtre, j’ai juste transformé le nom Saint Julien-sous-les-Côtes en Saint Romain-sous-les-Côtes dans l’album. Je voulais raconter des histoires aux gamins qui vivent autour de moi, à la campagne, et aussi faire rêver les enfants des villes. Moi j’ai grandi à Créteil, et ce qui me faisait rêver, c’était la campagne chez mes grands-parents, La Guerre des boutons et La Gloire de mon Père.
Avez-vous des projets pour les mois à venir ?
Je suis en plein travail sur une Bible pour enfants, qui viendra, en automne prochain, compléter L’Évangile pour les enfants, qui existe depuis les années 2000, mais à qui il manque la partie Ancien Testament. J’ai écrit le scénario, et un autre illustrateur réalise les dessins. Et je continue à composer des chansons pour la catéchèse, et pour un troisième conte musical de Loupio : Le Chien ronchon, qui s’adresse à ceux qui ne savent pas encore lire !