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Les greffes d’organes sont de plus en plus nombreuses en France. Un rapport, publié par l’Agence de biomédecine le 13 février 2024 comptabilise 5.634 greffes d’organes effectuées en 2023, soit 2,5% de plus que l’année précédente. De bons chiffres qui ont sans doute contribué à une baisse conséquente (22,6%) des décès de personnes en attente de greffe (823), malheureusement encore trop nombreux. Pourtant, le rapport traduit une réalité paradoxale : malgré un nombre de donneurs en hausse, celui des familles qui se sont opposées au prélèvement d’organes de leur proche décédé a augmenté de près de 10%. Pour mémoire, en France, le don d’organe est régi par trois grands principes : la gratuité du don, l’anonymat entre le donneur et le receveur et le consentement présumé. Sur ce dernier point, la loi indique désormais que chacun est "par défaut" donneur d’organes et de tissus. Il existe néanmoins un Registre National des Refus pour ceux qui ne voudraient pas donner leurs organes lors de leur décès.
Des refus fondés sur une croyance religieuse erronée
Dans le cas d’un don d’organes d’une personne déclarée morte, la France a adopté la définition la plus exigeante de la mort encéphalique, à savoir celle du tronc cérébral et celle du cortex. Dans le cas où la personne est donc déclarée morte (définition en vigueur en France), si le patient n’est pas sur la liste des refus, les proches sont consultés et leur avis est pris en compte. S’ils ne sont pas d’accord, les organes ne sont pas prélevés, même quand la personne a signifié son accord ou quand elle est porteuse d’une carte de donneur. Ainsi, en 2023, plus d’un tiers des personnes en état de mort encéphalique n’ont pas eu de prélèvement d’organes en raison du refus de la famille. S’il n’existe pas encore d’études sur les motifs de l’opposition, le rapport énonce cependant une raison liée à la croyance religieuse. Plus d’un Français sur deux estime en effet que le don d’organes et de tissus est incompatible avec les rites funéraires religieux. Cette conviction est pourtant fondée sur une fausse idée, puisque les trois grandes religions monothéistes y sont favorables. Le soutien de l’Église au don d’organes est d'ailleurs fréquemment exprimé.
Ce que dit l’Église
Sur ce point, le catéchisme est très clair : c’est une bonne cause s’il est fait avec générosité et solidarité (CEC, 2301). Il s’agit là de la première condition. La deuxième condition est le consentement explicite du donneur ou de ses proches. Jean Paul II voyait en ce "don" une nouvelle manière de servir la famille humaine. Et le cardinal Ratzinger, avant de devenir le pape Benoît XVI, est même allé s’inscrire sur le registre des donneurs potentiels, avouant un jour qu’il ne sortait jamais sans sa carte de donneur sur lui. S’il a dû personnellement y renoncer en devenant Pape (son corps, devenu propriété de l’Église, doit rester intact pour être inhumé, ndlr), cela ne l’a pas empêché d’encourager les catholiques à pratiquer cette "forme particulière de témoignage". L’Église ne cesse de sensibiliser au don d’organe, non pas pour "faire pression sur les consciences", mais pour "prendre conscience que la mort peut frapper chacun d’entre nous et de nos proches de manière inopinée, bien avant une vieillesse avancée, et que si douloureuse qu’elle soit pour ceux qui nous aiment et que nous aimons, cette mort peut aussi devenir l’occasion d’un acte de solidarité de très grande valeur", rappelle ainsi l’Épiscopat français.
Quels organes je peux donner ?
Après la mort, tous les organes vitaux peuvent être donnés, si la qualité de ce qui peut être donné est reconnue bonne par les professionnels de l’opération. L’important est que la dignité de la personne humaine soit sauvegardée et qu’il n’y ait pas manipulation ou commerce. En 1956, déjà, Pie XII, avait approuvé publiquement le prélèvement et la greffe de cornée au bénéfice d’aveugles ou de personnes menacées de cécité. L’Église condamne néanmoins la répartition des organes selon des critères "discriminatoires ou utilitaristes". Les bons critères sont ceux qui tiennent compte exclusivement "de facteurs immunologiques ou cliniques", et non ceux qui "se révèleraient arbitraires et subjectifs, et ne reconnaîtraient pas la valeur intrinsèque de chaque personne humaine en tant que telle, qui est une valeur indépendante de toute circonstance extérieur", a détaillé Jean Paul II.
Est-ce que je peux donner pendant mon vivant ?
L’Église souligne qu’aucun organe vital ne peut être prélevé sur une personne vivante. Un homme ne peut donner son cœur, donner sa vie, en l’ôtant à soi-même. La transplantation ne doit pas mettre en danger la vie du donneur, ni son état de santé, de sorte que le donneur ne soit pas lésé au point de devenir une nouvelle victime à son tour, à la place de celui qu’il a souhaité aider. Il est donc particulièrement nécessaire de vérifier que le consentement du donneur est véritablement libre et éclairé. Le don de sperme ou d’ovule est d’une tout autre nature ; il n’est pas fait pour guérir et il concerne la transmission de la vie ; celle-ci ne peut se faire que dans l’acte sexuel des époux ; ce don est contraire au respect du lien conjugal même s’il est fait avec amour.
Et si je suis dans le coma ?
Cette question pose le problème de la définition du critère de mort. Une personne est morte quand les fonctions spontanées du cœur et la respiration ont cessé définitivement et quand un arrêt irréversible de toutes les fonctions cérébrales est vérifié. Cela suffit pour savoir quel jugement moral porter sur la question. Jean Paul II a résumé le concept en ces termes : la mort consiste en "la désintégration totale de cet ensemble intégré qu’est la personne. Elle résulte de la séparation du principe de vie (ou âme) de la réalité corporelle de la personne (…) selon des paramètres clairement déterminés, également partagés par la communauté scientifique internationale, qui établissent l’arrêt total et irréversible de toute activité cérébrale "dans le cerveau, le cervelet, et le tronc cérébral".
Dans les cas de prélèvements sur des donneurs "à cœur arrêté", soit des personnes le plus souvent victimes d’infarctus, dont le cœur a cessé de battre, mais qui n’ont cependant pas cessé toute forme d’activité cérébrale, il faut qu’il n’y ait pas "le moindre soupçon d’arbitraire", et "le principe de précaution doit prévaloir là où l’on n’est encore arrivé à aucune certitude", avait indiqué Benoît XVI lors d’un congrès international sur le don d’organes organisé par l’Académie pontificale pour la vie. Surtout au vu des techniques médicales actuelles qui permettent de maintenir artificiellement les battements du cœur et la respiration chez un sujet ayant cessé toute activité cérébrale, et pouvant donc être considéré comme mort. Ce progrès technique a accru considérablement les potentialités de greffes à partir d’organes prélevés sur des cadavres. Mais il peut susciter la tentation d’effectuer des prélèvements sans être certain du décès de la personne.