À l’occasion de la 55e journée mondiale de prière pour les vocations, Aleteia a rencontré le père Stéphane Duteurtre, responsable du séminaire de Paris. Aleteia : On parle beaucoup de crise des vocations… Qu’en pensez-vous ?
Père Stéphane Duteurtre : L’expression « crise des vocations » est un péché contre l’Esprit saint. Il faudrait la remplacer par la réalité, à savoir une baisse du nombre de prêtres. En France, aujourd’hui, quelque 850 hommes se préparent à être prêtre. Quand on sait ce que c’est – répondre à l’appel de Dieu, rester célibataire, mettre sa vie au service de Dieu et des autres… – on ne peut qu’être émerveillé. En utilisant l’expression « crise des vocations », au lieu de se réjouir, on s’inquiète, et parfois même sans considérer à leur juste valeur ceux qui choisissent cette voie. Ce n’est pas parce qu’ils n’ont rien trouvé d’autre à faire que ces hommes choisissent de devenir prêtre. Ils sont plein de force, de grâces qu’ils ont reçues, de zèle, d’amour pour le monde et ils n’ont rien de marginal par leur histoire. Ce sont des gars de première classe que le Seigneur appelle.
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Qu’attendez-vous de cette journée de prière pour les vocations ?
En tant que prêtre, je trouve que cette journée est une belle occasion de rappeler que le peuple de Dieu a besoin de toutes les vocations… mais il a un besoin particulier de prêtres afin qu’il puisse vivre, au jour le jour, sa vocation de prêtre, prophète et roi ! Au quotidien, c’est d’abord de prêtres diocésains dont le peuple de Dieu a besoin. Ils ne sont pas indispensables pour eux-mêmes mais ils le sont pour le peuple de Dieu : pour qu’il soit un peuple de saints au milieu du monde, il faut que ces prêtres l’accompagne, l’aide, le fortifie par ses enseignements et les sacrements. Ce n’est pas pour rien que la journée de prière pour les vocations tombe le dimanche du Bon Pasteur !
Comment faites-vous pour discerner cette vocation à la prêtrise ?
C’est tout l’objet de la propédeutique, cette année de réflexion préalable à l’entrée au séminaire. Plus généralement, on discerne d’abord cette vocation quand un candidat est heureux d’annoncer l’Évangile. Par exemple, ce sont tous les petits apostolats qu’il prend comme l’animation d’une aumônerie, l’accompagnement de catéchumènes… Elle passe également par la capacité d’un candidat à entrer dans une étude sous le mystère de Dieu. Je m’explique : les études que suivent nos séminaristes n’ont pas pour objectif l’acquisition d’un diplôme mais visent à les amener à laisser leur intelligence être pénétrée par le mystère de Dieu afin qu’ils soient capables de se rendre compte de ce mystère de Dieu et qu’ils laissent leur raison en être façonnée. Un autre aspect, et c’est peut-être le plus important, discerner une vocation à la prêtrise passe par la capacité du candidat à prendre soin des autres, à s’y intéresser et à les faire passer avant lui. Quand quelqu’un quitte le séminaire, c’est très souvent d’un commun accord entre le candidat et les enseignants. Dans la majorité des cas le candidat réalise qu’il ne sera pas heureux et épanoui dans cette vie mais il est vrai que parfois cela peut être compliqué de le lui faire comprendre. Dans ces situations-là, c’est souvent un problème d’exercice de la liberté. En la lui redonnant pleinement, quelque chose se déclenche en lui et cela porte(ra) du fruit.
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Y a-t-il un profil type du séminariste parisien ?
Il s’agit du même profil que du jeune catholique parisien ! Une grande moitié des séminaristes parisiens sont des jeunes qui ont beaucoup reçu par leur famille et le scoutisme. Pour l’autre petite moitié, il s’agit de tout type de personne : des hommes qui se sont convertis à 40 ans, d’autres qui viennent de milieux totalement étranger au catholicisme… Finalement, les séminaristes sont à l’image des catholiques en France !
Dans quelles circonstances y a-t-il le plus de vocations ?
Si quelqu’un entre au séminaire vers 22- 23 ans, cela veut souvent dire qu’il aura fait du scoutisme, participé à des JMJ et certainement suivi un cycle de formation Even. En parallèle, il aura aussi certainement effectué une retraite de discernement, par exemple dans l’un des centres spirituels jésuites. Enfin, il aura eu un père spirituel un peu avant d’entrer au séminaire… Si on prend les trois “paniers” que sont le scoutisme, les JMJ et Even, on est sûr d’avoir tous nos candidats parisiens ! Pour ceux qui entrent au séminaire plus tardivement, il s’agit d’hommes dont la vie chrétienne intense s’est mise en route un peu plus tard ou qui était tout simplement bloquée avant.
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Comment faire naître des vocations ?
Il ne faut pas chercher à faire naître des vocations de prêtre mais chercher à faire naître des vocations de saints ! Jésus ne nous dit jamais qu’il doit y avoir un ratio, un nombre de prêtres à atteindre par ville ou par pays. Globalement, je dirais qu’il y a trois piliers : la vie de prière personnelle, le service et la formation de l’intelligence (si on en reste au catéchisme de sa confirmation, on est incapable d’avoir une vie chrétienne adulte). Si on a le souci de la prière, de la formation spirituelle des jeunes et du service, le Seigneur fera son œuvre ! Nous devons avancer sans peur et accompagner les vocations sans être absolument et systématiquement tendu vers elles. Enfin, tout comme il faut donner aux jeunes l’occasion de rencontrer des couples épanouis, il faut leur donner la possibilité de rencontrer des religieuses et des prêtres heureux et épanouis dans leurs ministères !