Se consacrer à sa carrière ou à ses enfants ? C’est une des grandes questions évoquée lors du colloque Le Défi des Femmes, qui s’est déroulé à Paris le samedi 14 octobre 2017, organisé par l’association Femmes Actives et Foyer (FAEF). Véronique d’Estaintot, Claire de Saint Lager et Marie Oliveau, ont donné leurs pistes de réflexion, afin de poser un choix libre, selon une approche psychologique pour la première, intimiste pour la seconde, et pragmatique pour la troisième.
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En 1962, à une époque où les femmes devaient demander l’autorisation de leur mari pour travailler, 45 % des femmes ayant entre 30 et 50 ans étaient déclarées « actives ». Désormais, la proportion de femmes « actives » dans cette fourchette d’âges est supérieure à 80 % (Source Insee). C’est un fait, la grande majorité des femmes travaille. Il arrive cependant, au cours des étapes de la vie, que certaines aient à se poser la question : « Et si j’arrêtais de travailler ? » Ce n’est pas parce que la plupart des femmes travaillent que cela correspond à mes désirs profonds, en tant que femme unique et singulière, dont les besoins fondamentaux sont différents de ceux de ma voisine. Alors comment discerner ?
Ne pas laisser une formulation, bien ancrée dans le langage courant, influencer ses choix
« J’ai arrêté de travailler ». C’est l’expression employée le plus couramment pour signifier qu’une femme, ou un homme, a décidé de quitter son emploi pour se concentrer pleinement sur sa vie de famille et être disponible pour ses enfants et son conjoint. Pourquoi utilise-t-on une expression par défaut, au lieu d’une formulation positive ? Tout se passe comme si être au foyer était franchement honteux et dévalorisant, alors pour redorer un peu son blason, on rassure son interlocuteur en lui faisant comprendre qu’avant, on travaillait ! Même lorsqu’une mère de famille est à la maison depuis 10 ans, bien souvent, elle continue de dire « j’ai arrêté de travailler » ! Pourquoi ne pas valoriser ce choix en employant les mots qui représentent la situation réelle, au lieu de faire apparaître une perte. Exemples : « J’ai décidé de me rendre disponible à temps plein pour les enfants », « Je souhaitais m’occuper moi-même de mes enfants », etc…
Véronique d’Estaintot, accompagnatrice de jeunes, et de moins jeunes, dans leur (ré-)orientation professionnelle, docteur en psychologie de la décision, fondatrice de Au fil de vos choix, pose la question suivante : la formulation utilisée pour exprimer une même réalité aurait-elle, à notre insu, une influence sur nos décisions ? La formulation « arrêter de travailler » induit une perte. Or, la recherche en psychologie de la décision montre que nos choix sont orientés de manière systématique selon que les options sont décrites en termes de gains ou de pertes. Ceci s’explique par le mécanisme de l’aversion à la perte : nous autres, êtres humains, attachons plus d’importance à une perte qu’à un gain de même valeur. Nous sommes plus sensibles aux perspectives de pertes qu’à celles associées aux gains. Dans l’expression « arrêter de travailler », le travail est présenté comme le point de référence. Mais pour que la prise de décision soit la plus juste possible, il convient de faire de l’option « au foyer » un autre point de référence, tout aussi légitime que celui de l’activité professionnelle.
Être à l’écoute de ses désirs profonds
Dans une société où les codes du masculin (l’action, la logique, l’efficacité) priment sur les valeurs intrinsèques au féminin (l’intelligence du lien, la sensibilité, les émotions, l’intuition, l’intériorité), les femmes se sentent partagées, éclatées, entre les différents rôles qu’elles remplissent : épouse, mère, professionnelle… Claire de Saint Lager, fondatrice des sessions Isha Formation et auteur d’un essai sur le féminin, La voie de l’amoureuse, est convaincue que « les femmes ont toutes, en elles-mêmes, les ressources pour leur épanouissement ».
Elle invite chaque femme à identifier ses désirs profonds, à retrouver une unité intérieure nécessaire au rayonnement de toute sa personne. Cela passe par l’écoute intérieure : le cerveau n’a pas toutes les réponses, il est important d’être aussi à l’écoute de son cœur, de son désir. C’est à partir de son centre intérieur que la femme peut prendre les décisions qui la fait rayonner, et s’enraciner dans une mission choisie à chaque étape de sa vie.
Savoir qu’il existe des solutions alternatives
Travailler, et être rémunérée, ne signifie pas nécessairement passer 40 heures derrière un bureau à des kilomètres de chez soi. Il peut être difficile, mais ô combien gratifiant, d’oser toquer à la porte de son patron pour tenter une négociation (qui ne tente rien, n’a rien !). Et il est sûrement possible de trouver, ou de créer !, LE métier qui remplit les critères qui vous tiennent à cœur. Une réponse à votre questionnement réside peut-être dans un temps partiel, ou dans le télétravail, encore peu répandus mais qui existent ! Marie Oliveau a fondé et dirige Talent sur Mesure, un cabinet de recrutement spécialisé en travail flexible.
Joëlle, responsable juridique, témoigne : « Après 20 ans passés dans des directions juridiques de grands groupes internationaux, j’aspirais à davantage d’équilibre entre ma vie familiale et ma vie professionnelle. Avec Talent sur Mesure, j’ai trouvé une organisation idéale : je travaille à 3/5ème, en tant que responsable juridique d’un groupe dynamique en pleine croissance. Ce temps partiel est réparti sur 4 jours dont une partie est effectué à mon domicile. »
Et les patrons y trouvent aussi leur compte ! Frédéric Granotier, PDG de Lucibel, patron de Joëlle, raconte : « Notre entreprise se développe rapidement, nous avions besoin de confier toutes nos questions d’ordre juridique à quelqu’un de solide, pour une vingtaine d’heures par semaine. Talent sur Mesure a bien saisi notre besoin et au bout de 3 jours, nous étions mis en relation avec Joëlle. Grâce à Talent sur Mesure, nous avons aussi recruté une responsable Service Client plein temps avec une petite partie en télétravail, une responsable Cash Management et un ingénieur brevets à 3/5ème. Nous savons que nous pouvons compter sur cette solution fiable et pertinente. »
Simone de Beauvoir écrivait dans Le deuxième sexe: “C’est par le travail que la femme a en grande partie franchi la distance qui la séparait du mâle; c’est le travail qui seul peut lui garantir une liberté concrète“. Dépassons ce féminisme, en définissant la liberté, non pas comme l’autonomie financière, mais comme la capacité de se reconnaître dans ses choix et dans ses actes.