À Plounévez-Quintin, dans les Côtes d’Armor, le village Saint-Joseph ouvre les portes de ses foyers aux cabossés.
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“Seigneur donne-moi la douceur avec mes frères, donne-nous d’être doux les uns envers les autres…”. La prière de Jean est spontanée. Il est 7h45, la quarantaine de personnes accueillies au village se retrouve à la chapelle. Jean et ceux qu’il appelle ses “frères et sœurs” sont un peu tombés de leur lit pour venir. Mais c’est l’unique temps de prière obligatoire de la journée : au village Saint-Joseph, on commence la journée tous ensemble autour du Saint Sacrement.
“Lui, c’est un ressuscité”
Cette association fondée il y a 18 ans par Nathanaël et Katia Gay veut être avant tout une famille : ici on accueille les écorchés, les cabossés. L’alcool, la drogue ou les maladies psychiques les ont terrassés. Sans plus aucun repère, ils sont envoyés par leurs proches, des prêtres ou par la justice dans ce petit village des Côtes d’Armor, afin de se reconstruire.
“Lui, c’est un ressuscité !” s’exclame Jean-Guy, co-fondateur du village en hélant Corentin qui fait du jardinage. Le jeune homme a 22 ans, et dix ans de cannabis derrière lui. Il est arrivé détruit, le voilà aujourd’hui sur ses deux pieds, prêt à repartir dans un monde plus sain. Des études, un logement, un travail, une stabilité. C’est la réinsertion à laquelle aspire chacun. Mais d’abord, il faut en passer par un chemin de guérison. Certains ne pourront jamais l’emprunter. Comme d’autres avant eux. Michel, un ancien SDF de 74 ans, et Pascal, sous tutelle judiciaire, passeront leur vie au village.
Mais pour la majeure partie des “accueillis”, l’objectif est de replonger dans la vie normale, libérés de leurs démons. Dans les foyers, dans les quatre petites maisons réparties sur deux sites, on renaît par la simplicité de la vie. Les repas, les temps de travail, de cuisine, d’ateliers artistiques viennent rythmer les journées et donner un cadre à des hommes et des femmes en perte de repère.
“J’ai appris à accepter les pauvretés… à commencer par les miennes”
Pas de téléphone ni d’ordinateur ! On se coupe volontairement du monde pour mieux se retrouver. “J’ai appris à accepter les pauvretés… à commencer par les miennes” sourit timidement Loïc. Les repas sont animés par les personnalités de chacun. On s’accueille et on s’aime dans une grande tendresse ; la schizophrénie de l’un, la mauvaise humeur de l’autre, la fatigue, le sevrage difficile. Joyeux bazar autour de la table.
Au service “traitement des dons”, les supermarchés sont devenus très généreux depuis que la loi les oblige à donner leurs invendus alimentaires, on retrouve Géraud. Lui n’a pas de guérison à opérer. Il a été envoyé en début d’année par le séminaire de Versailles, pour une année de service. Petit changement d’ambiance pour ce séminariste immergé dans le dépouillement. Mais qu’à cela ne tienne. “Ce que je vois surtout c’est l’œuvre du Bon Dieu” dit Géraud. Car si certains restent à la surface de la spiritualité du village, d’autres ouvrent leur cœur à l’amour de Dieu. Les “Amen !”, “Tout est grâce !”, “Soyez bénis !” fleurissent dans les foyers et la ferveur est grande à la soirée de louange du lundi soir : on chante, on danse et on vient réconforter d’un baiser ceux qui ce soir-là ne peuvent pas, trop accablés par la tristesse.
Cette œuvre, Jean-Guy la voit chaque jour depuis 18 ans dans ce village où deux couples n’avaient qu’un désir au commencement : être à l’image de la famille de Nazareth, où l’on accueille le pauvre, le différent, le cabossé. À chaque arrivée d’un nouveau frère, d’une nouvelle sœur, c’est une page blanche à noircir, avec en entête cette parole adressée à Jésus dans l’Évangile de saint Jean (Jean 11, 3 ) : “Seigneur, celui que tu aimes est malade” et sa réponse : “Cette maladie n’aboutira pas à la mort et servira à la gloire de Dieu.”