Audrey Kermalvezen est née d’une procréation médicalement assistée en 1980. Dans une interview au site Génèthique, elle explique quels sont les paradoxes de la PMA et du don de sperme, et de l’anonymat qui les entoure.
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La question de l’accès à ses origines pour un enfant né grâce à un don de sperme, même devenu adulte, ne se balaye pas d’un simple revers de main.
Le problème posé par les PMA faites suite à un don de gamètes est que l’enfant est souvent oublié dans le “projet parental”. “Le don de gamètes implique non pas deux mais trois personnes, et particulièrement l’enfant qui en est issu. Cet enfant est amené à devenir un adulte, mais on a tendance à l’oublier et à oublier son intérêt.” Le don de gamètes est considéré et présenté comme un simple don d’organe. C’est cependant oublier qu’ils sont fondamentalement différents : “Le don de gamète crée la vie, le don d’organes maintien la vie”.
La banalisation du don de gamètes, faite pour attirer les donneurs, occulte souvent les conséquences de cet acte, qui a in fine pour but de donner la vie. Audrey Kermalvezen explique en effet que “plusieurs ancien donneurs disent n’avoir réalisé que des années après leur don la portée de leur geste”.
Outre le fait de donner la vie, les conséquences de l’anonymat des donneurs sont nombreuses, peuvent s’avérer graves et s’étaler sur plusieurs générations. Ce ne sont pas que les couples et les donneurs qui en subissent les conséquences, mais aussi et d’abord les enfants qui naissent suite à ces opérations, et leurs potentiels descendants. Un enfant a besoin de connaître ses origines, pour pouvoir simplement répondre aux interrogations qu’il porte en lui. Lorsque l’enfant sait qu’il est né grâce à un don de sperme, il est confronté au vertige de la technique de sa procréation, qui est déshumanisante. Audrey Kermalvezen dit qu’elle souhaiterait “trouver un visage, de l’humain, pour contrer l’aspect médicalisé et aseptisé de [son] mode de conception”.
L’enfant est par ailleurs concerné toute sa vie par cet anonymat, et transmettra à son tour des risques à ses propres enfants. Deux d’entre eux sont majeurs : la possibilité de commettre un inceste avec une personne qui serait un enfant biologique du même donneur, et la possibilité de subir une PMA avec les gamètes de son géniteur. Le risque est faible, mais existe cependant et de doit pas être négligé. “L’anonymat, cet inconnu, est transmis de génération en générations. Il pose des problèmes inédits par rapport au don d’organes.”
En France, la PMA concerne environ 23 000 naissances par an (environ 3% du total des naissances), et parmi elles, un peu moins de 1 500 sont issues d’un don de gamètes. Si le nombre de demandeurs augmente, le nombre de donneurs, lui, baisse de plus en plus. Le taux de succès des PMA oscille entre 13 et 30%, selon l’Inserm.