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Aucun texte de l'Église n'impose de se confesser toutes les semaines et aucun texte non plus ne l'interdit ! Une culture janséniste a longtemps intimidé les fidèles, en les éloignant de la Sainte Table sous prétexte qu'ils en étaient indignes. Des âmes ferventes ont souffert de cette sévérité et ont demandé le "privilège" de communier chaque dimanche et même en semaine, ce qui n'était pas habituel, mais pouvait être accordé.
Sainte Thérèse de Lisieux en a bénéficié. Finalement, le saint pape Pie X a non seulement permis, mais encouragé, la communion fréquente. Aujourd'hui, nous courons le risque inverse, qui est de communier trop facilement. Cela peut devenir un geste un peu machinal, sans préparation suffisante, peut-être même sans la conversion nécessaire. Mais faut-il pour autant se confesser toutes les semaines ?
Dieu a mis son Corps entre nos mains ! Nous ne serons jamais à la hauteur de ce pur Amour, de ce Don parfait, c'est sûr. Nous ne serons jamais « dignes » de recevoir le Christ, et on a raison de citer la prière du centurion, que la liturgie met sur nos lèvres juste avant la communion. Cependant, un minimum de loyauté nous est demandé. Sinon, nous pourrions faire semblant de L'accueillir, tout en Le rejetant dans les faits, par pensée, ou par action, ou par omission, contredisant gravement l'Évangile. C'est pourquoi il nous est demandé de recevoir le pardon sacramentel dès que possible après un péché mortel, en tout cas avant la prochaine communion, et nous sommes encouragés à confesser également les péchés véniels. Dans cet esprit, on ne peut que conseiller une pratique régulière du sacrement de réconciliation.
J'ai été étonné, mais finalement édifié, en fréquentant nos frères chrétiens orientaux. Les fidèles orthodoxes qui souhaitent communier lors de la divine liturgie du dimanche doivent se confesser la veille et jeûner depuis le samedi soir. Je vous entends vous récrier : « Ils exagèrent ! Que font-ils de la miséricorde ? Heureusement que nous n'en sommes plus là ! » Sans doute sont-ils trop exigeants. Mais je m'interroge : nous, catholiques latins, ne le sommes-nous pas trop peu ?
En Orient, la conséquence du rigorisme, c'est que les fidèles qui communient sont peu nombreux. Les autres viennent à la fin de la liturgie recevoir avec dévotion un morceau de pain bénit que le prêtre leur remet. C'est mieux que rien, mais ce n'est qu'un symbole. En Occident, la conséquence de notre ouverture, et peut-être de notre laxisme, c'est que tout le monde, ou presque, communie. Le risque est alors de communier des lèvres sans communier du cœur. On peut être troublé en particulier lorsque des personnes qui habituellement ne mettent jamais les pieds à l'église viennent "prendre l'hostie" comme on prend son ticket.
On peut rétorquer : « Dieu accueille tout le monde, l'Église ne doit exclure personne ». Sur le fond, cette position n'est pas fausse. Mais on ne peut la soutenir sans un complément très important : « Est-ce que j'accueille en vérité ce Dieu qui m'accueille ? Je sais bien que je suis un pauvre pécheur. Je sais bien aussi qu'il suffit qu'Il dise une parole et mon âme sera guérie. Mais suis-je décidé à suivre le Christ, ou au contraire suis-je décidé à continuer de Lui tourner le dos ? En ce cas, ni Lui ni son Église ne m'excluent ; je prononce moi-même mon auto-exclusion, et si je communie quand même, cette communion est sacrilège ». C'est cette contradiction terrible qui habite le cœur de Judas le soir du Jeudi saint. Il semble bien en effet qu'il ait communié, au moins au Pain eucharistique, au début du repas (Jn 13, 17-30).
On peut aussi dire : « On ne vient pas à un repas pour regarder les autres manger ». Mais on ne peut pas réduire la messe à un buffet. L'Eucharistie, avant d'être quelque chose à manger, est quelque chose à vivre, un événement : « Nous rappelons ta mort, nous célébrons ta résurrection, nous attendons ta venue dans la gloire ». Il est juste et bon de participer à la messe, même si on ne peut pas communier ; c'est le cas des petits enfants, des catéchumènes, des couples non mariés. Et de vous, et de moi, certains jours.
Père Alain Bandelier