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La fatigue est un signal de vigilance. Sur le plan physiologique, elle nous indique notre besoin de récupération. Sur le plan émotionnel, elle peut nous rendre attentifs au poids, à l’impact des événements que nous venons de traverser et nous appeler à les prendre en considération. Du point de vue psychologique, elle nous montre peut-être que nous ne sommes pas à notre place, ou que nous portons quelque chose qui nous dépasse. Spirituellement, elle nous invite à l’équilibre de vie, à nous reposer en Dieu, ou paradoxalement, à nous tourner vers les autres. Dans le couple, elle est une efficace révélatrice de défauts et une occasion de redoubler d’attention(s). En affaiblissant notre capacité à nous contrôler ou à prendre en charge notre quotidien, elle nous pousse à chercher du relais, principalement du côté de notre conjoint. S’il n’est pas aussi fatigué que nous...
L’épouse a un défaut : elle fait remarquer sur un certain ton un peu vexant qu’il n’a pas fait les choses comme il faut. L’époux a un défaut : il est susceptible. Et vice et versa. Quand il n’est pas fatigué, son ton n’est pas vexant. Quand elle n’est pas fatiguée, elle ne prend pas la mouche. Un jour, l’engrenage prévisible s’est arrêté d’un coup quand elle a dit : « Nous sommes fatigués. » La tension s’est relâchée en chacun, et aussi dans les enfants qui connaissent cet échange un peu absurde dont ils se moquent parfois.
Bien sûr, toutes les disputes ne sont pas liées à la fatigue. Mais la difficulté de contrôle de soi que provoque la fatigue peut être une chance. La dispute ou l’attitude moins ajustée est un moment de vérité sur soi-même. La fatigue attaque notre toute-puissance et notre perfectionnisme. Elle nous rend vulnérable, relativise notre autonomie et souligne notre besoin de l’autre. Elle nous rappelle que nous sommes un corps et le soin que nous lui devons.
Dans une famille chrétienne valorisant beaucoup le don de soi, la prise en compte de la fatigue peut être insuffisante. Le magnifique « Éloge de la fatigue » de Robert Lamoureux proteste d’une certaine manière contre un autre extrême culturel valorisant bien-être et développement personnel.
Jésus indique à ses disciples fatigués que le premier pas du repos, c’est de se mettre à l’écart. Ce retrait permet de prendre le temps de déterminer quelle sorte de repos convient. Sommeil, exercice physique, nature, écoute de musique, lecture de détente, soin du corps... et aussi de réfléchir au changement éventuellement nécessaire pour ne pas perdre son énergie, pour traverser autrement certaines circonstances.
Par exemple, le dialogue avec son conjoint peut s’avérer fatigant s’il vire au débat et ne privilégie pas l’écoute. Peut-être faut-il se fixer des règles pour parler sans s’épuiser ? Autre exemple : une situation d’injustice est très fatigante. Elle provoque une colère souvent intériorisée qui aspire l’énergie. Comment admettre que son conjoint n’assume pas telle ou telle responsabilité ? Une mise à l’écart s’avère nécessaire pour clarifier ce qui se joue. Parfois, il s’agit d’un sentiment d’injustice, qui repose sur une vision faussée qu’il faut examiner patiemment à deux. La fatigue nous détourne souvent du dialogue alors même que c’est un moment clé à saisir.
Sophie Lutz