Travail, loisirs, engagements associatifs ou paroissiaux… autant de bonnes raisons qui peuvent pousser le couple à l’extérieur de la maison. Si une vie sociale peut être un vrai ciment pour le couple, elle peut aussi le conduire à délaisser ses enfants et sa vie amoureuse. Alors, sur quel pied danser ?
Pour qu’Aleteia poursuive sa mission, faites un don déductible à 66% de votre impôt sur le revenu. Ainsi l’avenir d’Aleteia deviendra aussi la vôtre.
*don déductible de l’impôt sur le revenu
Les raisons de s’impliquer en dehors de chez soi ne manquent pas, et elles sont souvent très légitimes. Pierre et Caroline ont trois enfants. Ils sont très investis dans leur paroisse : « Nous avons beaucoup reçu, et il nous semble naturel de redonner, commente Pierre. Cette phrase de saint Paul nous aiguillonne sans cesse : ‘’Malheur à moi si je n’annonçais pas l’Évangile !’’ (1 Co 9, 16) ». Hélène, qui a deux adolescents, est la bouée de secours de son quartier. Un malade ? Elle se précipite pour lui rendre visite. Des amis partent en week-end ? Elle se propose pour garder les petits. « On ne rend jamais assez service », affirme-t-elle. Quant à Anne et Marc, parents de quatre enfants entre 19 et 10 ans, ils sont bénévoles dans un abri pour SDF. « Nous ne pouvons pas dormir tranquilles quand d’autres n’ont rien et vivent dehors », explique Anne.
Autre activité chronophage : les sorties avec les amis. Sophie travaille à domicile. Elle a un mari souvent absent pour des raisons professionnelles. « Je suis le pilier de la famille, je porte beaucoup. Si je veux garder mon équilibre, je dois me ressourcer avec mes amies. Cela permet ensuite de donner de soi plus sereinement. » Si une vie sociale enrichissante peut être un vrai ciment pour le couple, il faut toutefois faire attention à bien analyser les raisons qui nous poussent à l’extérieur.
Ne pas fuir ses autres responsabilités
Sophie Passot, conseillère conjugale et familiale, met en garde contre certains pièges que peut cacher le temps donné hors de la maison : « Je rencontre souvent des couples dont l’activisme excessif dissimule une fuite ». Fuite de soi-même pour ne pas voir son vide intérieur, fuite de l’intimité conjugale parce qu’elle est pauvre ou qu’elle fait peur, fuite de la sphère familiale, moins valorisante socialement que le travail. Une personne dévouée à sa paroisse ou à une association peut parfois camoufler un parfait égoïste qui esquive les tâches fastidieuses de la vie de famille et les cris des enfants. « Je préfère qu’un laïc soit à fond sur un engagement bien assumé, plutôt qu’un laïc investi partout. C’est une question d’équilibre. Souvent, je conseille à certains d’en faire moins et de s’occuper davantage de leur famille », évoque un jeune prêtre ses paroissiens.
Lire aussi :
Et si vous mettiez un peu de piment dans votre vie de couple ?
Mais quelle est la cote d’alerte ? Les signaux sont variés. Raphaëlle a sérieusement diminué ses sorties quand ses enfants ont grandi : « Petits, nous les couchions à 20h30 et sortions facilement. Mais, par la suite, la nécessité de notre présence s’est fait sentir : au moment de partir, l’excitation montait, l’un avait besoin de nous réciter une leçon, l’autre de nous parler d’un sujet très important. Nous avons résilié presque tous nos engagements ». Les occasions de discussions profondes avec un adolescent doivent, en effet, être saisies au vol. Elles ne se présentent pas toujours deux fois. Il attend des réponses, et il serait dommage qu’il se sente délaissé.
Timothée et Évelyne, qui s’étaient consacrés à l’accueil chez eux de jeunes en difficulté, ont été alertés par la souffrance d’un de leur fils. « Il ne supportait plus d’avoir à partager quotidiennement ses parents avec des étrangers. Sa déprime, à l’âge de 13 ans, a été le feu rouge, raconte Évelyne. Nous nous étions toujours dit que nos enfants étaient prioritaires, et nous avons décidé d’organiser notre activité autrement, même si nos trois autres enfants vivaient bien cette situation. » La fatigue peut aussi nous signifier que nous présumons de nos forces. Louis, jeune père de famille de trois enfants, investi à 300 % dans son travail comme dans ses engagements, a eu quelques alertes : « J’ai commencé par des retards, puis par des oublis, des actes manqués, et, enfin, j’ai eu deux accidents à quelques semaines d’intervalle. Autant de signaux pour m’indiquer que j’en faisais trop ».
Se poser les bonnes questions et gérer ses priorités
Si nos engagements se heurtent à des difficultés, gare à la tentation de les imputer trop vite à d’éventuelles attaques de l’Ennemi ! Pour en discerner la cause, chacun peut déjà commencer par un examen de conscience et se demander s’il a la certitude d’être vraiment à sa place. Préparation au baptême ou au mariage, service auprès de SDF, encadrement de groupes scouts, mais plus un créneau pour décompresser ni pour dîner avec sa femme avant l’an prochain ! Est-on en forme, en paix ? Serein ? Ou au contraire un apôtre un peu trop agité qui tient sur les nerfs ? Deuxième question à se poser : quelle est ma priorité ? Caroline et Pierre se sont vu proposer de s’occuper des préparations au mariage sur la paroisse, en plus de leurs autres engagements. Ils ont refusé : « Tant que nos enfants sont à la maison, notre priorité est d’être avec eux ».
Lire aussi :
La prière conjugale, une démarche qui transforme le couple
Face à un engagement, il est bon de prier pour savoir si l’appel est vraiment de Dieu. Évelyne parle de son expérience : « Nous sommes toujours sur une ligne de crête, à demander à l’Esprit-Saint si nos choix sont à réajuster, si nous faisons la volonté du Père. Rien n’est jamais acquis. La réponse nous vient quand nous nous écoutons l’un l’autre, quand nous écoutons nos enfants ». Avec peu de temps disponible, raison de plus pour choisir de privilégier ce qui nourrit le couple et la famille. « Quand nous avons mis un terme à nos activités, explique Raphaëlle, nous en avons gardé une seule, l’adoration, car, là, notre couple se ressource vraiment. » Pour Marion, dont le mari n’est pas croyant, la fécondité du couple se vit à deux. Jusqu’à présent, elle avait beaucoup d’engagements dictés par sa foi. Elle en a abandonné certains pour pouvoir en accomplir d’autres avec son mari. « C’est mon critère maintenant. »
L’avis des enfants compte aussi
Certains, avant de s’engager, demandent aux enfants leur avis. « Nous n’avons pas à leur imposer des choix qui risquent d’empiéter beaucoup sur la vie familiale, explique Vianney ». Si son travail la mobilise souvent pendant le week-end, Raphaëlle est très claire : « Les enfants savent que, tous les ans, nous refaisons le point ensemble, et que j’arrêterai s’ils trouvent cela trop lourd ». D’autres recherchent des activités familiales : les balades, le sport, danse… Évelyne conclut : « Attention ! il n’existe pas de règles générales pour l’organisation familiale, le temps consacré à des engagements varie beaucoup d’un couple à l’autre. Chacun d’eux est un univers, un monde à lui tout seul, et l’on aura surtout à cœur de s’ajuster à la volonté de Dieu ».
Florence Brière-Loth